Avec son esthétique de clip et son rythme frénétique, cette version ovni de la tragédie de Shakespeare offre une partition en or à Claire Danes et Leonardo DiCaprio, dont le duo est devenu iconique…

De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace : tel pourrait être le mantra du cinéaste australien Baz Luhrmann. En 1996, avec un courage inouï, une inconscience totale, selon certains, ce quasi inconnu offre une variation déjantée et rock’n’roll de la plus célèbre histoire d’amour de l’Histoire, écrite par William Shakespeare quatre siècles plus tôt. De prime abord, toucher aux amants de Vérone n’a rien de révolutionnaire, tant Roméo et Juliette ont connu d’incarnations à l’écran depuis la version de… Georges Méliès, en 1902 ! Lhurmann se veut iconoclaste dans la forme : « Il fallait que le public reçoive une claque, qu’il arrête de manger du pop-corn », mais revendique sa fidélité à l’auteur. Du bruit, de la fureur, le dramaturge anglais n’est pas trahi. Bien au contraire, l’académisme n’était pas sa tasse de thé. Mission accomplie, Mister Luhrmann, votre opéra glam-rock dopé à l’adrénaline et porté par une B.O. de dingue qui s’écoulera à des millions d’exemplaires) est une expérience unique. « Roméo + Juliette est un film “psychographique”, clame-t-il. La tragédie est envisagée sous un angle coloré. L’art est par nature imaginatif. On doit toujours le remettre en question. »

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Un Shakespeare débridé 

Dont acte. Le rideau se lève à Verona Beach où deux gangs, Montaigu et Capulet, s’opposent. Les flingues chromés, les chaînes en or sur les chemises hawaïennes remplacent les armures et les dagues d’antan. On se toise, on se provoque, et les duels sont des fusillades chorégraphiées. Seuls les vers de Shakespeare sont sacrés. Passé la surprise, on adhère avec enthousiasme. Vous avez dit audacieux ? Casse-gueule ? Les deux, et c’est un pari gagné ! Choisi pour incarner Roméo Montaigu (d’après une photo de paparazzi !), Leo DiCaprio se souvient avoir été bousculé : « Ça me semblait saugrenu de m’exprimer dans la langue de Shakespeare tout en évoluant au sein d’un univers alternatif et musical aussi débridé. Au final, cet amalgame fonctionnait très bien. »

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Une fièvre contagieuse 

À 21 ans, l’acteur a le vent en poupe mais n’est pas encore star. Il tournera Titanic dans la foulée : c’est déjà un immense comédien. Il prête à son Roméo une fougue juvénile, une rage intérieure et une fièvre contagieuse. Il est chez lui dans la démesure, le baroque et le kitsch assumé. Au style flamboyant, voire outrancier, de la mise en scène, Leonardo confère une âme, une profondeur fidèle au texte. L’Ours d’argent du Meilleur acteur au Festival de Berlin saluera sa performance. À un tel Roméo, il fallait une Juliette renversante. Natalie Portman a renoncé : elle n’avait que 13 ans et la différence d’âge choquait à l’écran. La réalisatrice Jane Campion conseille alors au réalisateur de jeter un oeil à l’héroïne de la série Angela, 15 ans. Claire Danes, qui n’en a que 14, sera sa miss Capulet. « Même si elle était encore très jeune, comme Juliette, elle avait une sagesse que les filles de son âge n’ont pas. C’était incroyable » Au premier essai, Leo est conquis : « Quand elle est entrée, Claire a irradié la pièce. » La même magie au carré opère à l’écran. La force de l’amour est avec eux.

Roméo + Juliette : dimanche 14 février à 20h55 sur Arte

Julien Barcilon 

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