Croquettes véganes, jouets et litières connectés, colliers GPS… Le marketing se surpasse pour améliorer le bien-être de nos animaux et, au passage, alléger nos comptes en banque.
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Avec 14,2 millions de chats, 7,6 millions de chiens et 4,7 millions d’oiseaux d’ornement – sans compter les lapins, furets et autres cochons d’Inde –, plus de la moitié des Français ont un animal de compagnie. Tous fous de leurs bestioles ? Sans aucun doute ! Pour preuve, 68 % d’entre eux y voient un membre de leur famille à part entière et 29 % s’avouent très attachés même s’ils pensent faire la part des choses, d’après un récent sondage. Pas étonnant dès lors de voir, depuis plusieurs années, le commerce lié aux animaux de compagnie en pleine croissance : en 2019, il enregistrait une augmentation de 5 %, flirtant avec les 5 milliards d’euros. Et les seules ventes d’accessoires auraient augmenté de 48 % au cours des dix dernières années. Un marché juteux qui ne semble pas connaître de limites, tant chez les professionnels du marketing que chez les heureux maîtres.
« Isis est bien plus qu’une chienne à mes yeux, nous raconte Céline, propriétaire énamourée d’un petit yorkshire qui vient de fêter ses 11 ans. Je sais que cela paraîtra étrange à certains, mais elle est un peu l’enfant que je n’ai pas eu, ou une amie fidèle. Elle, au moins, ne me déçoit pas ! Alors tout cet amour qu’elle me donne vaut bien quelques efforts ! » Cette célibataire ne rechigne d’ailleurs pas à la dépense : « C’est un budget mais je lui offre toujours le meilleur. Côté pâtée, je lui prends du haut de gamme ; je veux être sûre de ce qu’elle mange. Et quand je pars en vacances, je m’assure qu’elle sera bien gardée. L’an dernier, je l’ai mise dans une pension grand luxe. Je crois qu’elle y a été heureuse. De toute façon, je ne lui refuse jamais rien. Là, par exemple, je lui ai acheté un petit manteau en flanelle. Et pour son anniversaire, je lui ai pris plein de jouets. En fait, je me fais plaisir, je le reconnais ! »
Gadgets à gogo
Si le business fonctionne à plein régime, c’est que Céline n’est pas un cas isolé, loin s’en faut ! Conséquence : dans les grandes surfaces, les rayons dédiés ne désemplissent pas, les sites internet fleurissent… Sans parler de l’apparition incessante de nouvelles gammes de croquettes dites « premium » (vendues parfois sur abonnement), de produits anti-puces ou vermifuges, de shampooings garantis 100 % naturels. Même les geeks ont de quoi trouver leur bonheur : des colliers GPS, des litières connectées, des jouets pourvus d’intelligence artificielle… Les contrats d’assurance spécialisés cartonnent, les applications dédiées pullulent et de nouveaux services se sont développés à l’image des dog-sitters, des pensions quatre-étoiles comme celle choisie par Céline, des thérapeutes pour chiens, des masseurs félins, etc. Et on en passe !
Jean-Philippe Darnault est le PDG d’Animalis, une société qu’il a fondée en 1998 et qui compte 41 animaleries en France. Pour lui, plus qu’un secteur en pleine expansion, il faut d’abord voir une évolution des mentalités. « Entre les réseaux sociaux et les nouvelles mesures encadrant le bien-être animal, il y a davantage d’éclairage qu’autrefois. Les habitudes de consommation ont elles aussi complètement changé. Mais je ne suis pas certain qu’on puisse parler d’une explosion du marché. » Toutefois, le spécialiste le concède : les offres sont nombreuses et le marketing, bien souvent, triomphe. Au profit du bien-être de nos compagnons, évidemment.
« Il y a une trentaine d’années, poursuit le PDG d’Animalis, on comptait cinq sortes de croquettes. Depuis, les progrès en matière de nutrition ont été colossaux, et il existe désormais une offre pour chacun selon son poids, son âge, ses problèmes de santé. Nous dépassons les 500 références ! » Certes, mais quoi qu’on en dise, au moment du passage en caisse, ce n’est pas seulement le profil de l’animal qui entre en ligne de compte. Pour suivre la tendance ou par philosophie de vie, on lui impose de plus en plus souvent le bio, le végan et même, depuis peu, les croquettes aux insectes ! Et tant pis s’il faut payer le prix fort. « Pas tant que ça, tempère Jean-Philippe Darnault. Le panier moyen n’a pas augmenté. Les prix ont même souvent baissé. Par exemple, la gamme de croquettes la plus vendue s’affichait il y a dix ans à 70 euros les 15 kilos, elle est aujourd’hui à moins de 50 euros. L’e-commerce et la concurrence sont venus casser les prix. »
Ça roule pour les poules
Nul besoin d’être riche pour posséder un animal, donc. Mais la dépense est d’autant plus facile que les sollicitations sont nombreuses. « Pour se développer, ce marché a besoin de rendre légitime la relation d’attachement entre humains et animaux de compagnie, nous explique le sociologue Jérôme Michalon. L’une des façons de le faire est, par exemple, de financer des recherches qui montrent que posséder un animal est bon pour notre santé. Du coup, les gens dépensent davantage. À l’image d’autres marchés (comme la puériculture, notamment), celui-ci capitalise sur ces liens et les renforce. » Et plus encore dans les périodes de confinements successifs, quand présence et réconfort étaient particulièrement bienvenus ! Jean-Philippe Darnault avoue même avoir été un peu surpris par ses propres observations en magasins. « En cette année 2020 si particulière, s’il y a eu une explosion du marché, c’est avant tout celui de la poule. Pas pour les manger, entendons-nous bien ! Non, les gens en ont acheté (et ils continuent de le faire) pour les mettre dans leur jardin car cela accompagne leurs désirs accrus de changement de vie, le besoin de retour à la nature. De même, il faut noter un développement de l’aquariophilie. Il y a trente ans, elle représentait 30 % du marché. Aujourd’hui, c’est moins de 10 %, mais depuis les confinements, la progression est très forte. »
Nos animaux viennent par ailleurs occuper des secteurs plus inattendus. Comme ceux des médecines alternatives et de l’ésotérisme, avec des kinésiologues, des magnétiseurs, des médiums spécialisés et même… des communicateurs animaliers ! En Bretagne, Sylvie Alliaume reçoit des dizaines d’appels à l’aide de maîtres perturbés par les soucis de leurs bêtes. Elle propose des communications à distance. « Un communicateur intervient le plus souvent sur les problèmes de comportements : fugues, agressivité, malpropreté… Tout cela exprime un mal-être qu’il faut savoir entendre. Pour accéder à leurs pensées, nous nous mettons en état de conscience modifiée. C’est là qu’ils nous parlent. Par télépathie, par des images ou par des sensations olfactives. » La praticienne cite en exemple le travail effectué avec sa propre chatte, devenue fugueuse. « J’avais beau entrer en communication avec elle, rien ne changeait. Jusqu’au jour où j’ai compris que son absence de maternité la rendait malheureuse. La stérilisation est un réel problème : nous l’imposons aux animaux qui la vivent souvent mal. J’ai expliqué à ma chatte pourquoi je l’avais fait stériliser, je lui ai demandé pardon. À partir de là, elle est redevenue câline ! » La démarche vous convaincra ou pas, peu importe. Elle donne en tout cas la mesure des démarches et dépenses que sont prêts à consentir un certain nombre de propriétaires d’animaux.
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