• Parkinson, Alzheimer : des précédents inquiétants
  • Des hypothèses qui devront être étudiées grâce à un suivi long des patients
  • CoCo Neurosciences, une étude aux résultats très attendus

Il est encore trop tôt pour connaître les effets à long terme de la Covid-19 sur notre organisme, mais des scientifiques s’inquiètent déjà des éventuelles maladies neurodégénératives qu’elle pourrait induire dans les années à venir chez les patients. 

Ainsi, on apprend dans un article publié le 5 janvier dernier par la revue Alzheimer’s Association, la création d’un consortium international dont la mission sera d’étudier les conséquences à court et à long terme du SRAS-CoV-2 sur le fonctionnement cérébral.

Parkinson, Alzheimer : des précédents inquiétants

Dans cette publication, les chercheurs expliquent que des précédents existent. « Les virus respiratoires neurotropes (capables d’envahir les cellules nerveuses, NDLR) sont connus depuis longtemps pour entraîner une pathologie cérébrale chronique. La pandémie de grippe de 1918 était et continue d’être soupçonnée comme la cause sous-jacente de l’encéphalite léthargique. » Ils évoquent également un lien suspect entre le virus de l’herpès simplex 1 (HSV1) et la Maladie d’Alzheimer.

Comme le rappelait récemment Newsweek, « avant l’introduction des thérapies antivirales contre le VIH dans les années 1980, la démence était observée chez environ 25%des patients infectés. Le virus du Sida a souvent envahi le cerveau au cours des deux premières semaines de l’infection, s’introduisant à travers les cellules immunitaires infectées et inondant le cerveau de protéines neurotoxiques. » 

Une étude menée par le Centre de recherche Bordeaux Population Health à partir de données recueillies auprès de plus de 1 000 personnes de plus de 65 ans, avait elle établi en janvier 2020 que « parmi les personnes porteuses d’une mutation particulière du gène de l’apolipoprotéine E (APOE), connue pour augmenter le risque de maladie d’Alzheimer, celles présentant en plus des réactivations fréquentes du virus HSV1 (herpès) ont trois à quatre fois plus de risques de développer une maladie d’Alzheimer. À l’inverse, chez les sujets ne présentant pas cette mutation, les réactivations du virus HSV1 ne sont pas associées à une augmentation du risque. »

Nous avons un aperçu des conséquences neurologiques que la pandémie de grippe espagnole de 1918 (…) À l’époque, le risque de développer la maladie de Parkinson a été multiplié par deux ou trois. »

En août 2020, une équipe de neuroscientifiques et de cliniciens australiens du Florey Institute of Neuroscience and Mental Health, a publié ses travaux sur un lien potentiel entre la Covid-19 et la Maladie de Parkinson.

« Nous avons constaté qu’une perte d’odorat ou une diminution était en moyenne signalée chez trois personnes sur quatre infectées par le virus SRAS-CoV-2, détaille dans un communiqué Leah Beauchamp, chercheuse au sein de l’institut. Alors qu’en surface ce symptôme peut sembler peu préoccupant, il nous en dit beaucoup sur ce qui se passe à l’intérieur, à savoir une inflammation aiguë dans le système olfactif responsable de l’odorat. Nous pensons que la perte d’odorat représente une nouvelle voie pour détecter précocement le risque de développer la Maladie de Parkinson, car nous savons que la perte d’odorat apparaît chez environ 90% des personnes aux premiers stades de la maladie de Parkinson et dix ans avant les symptômes moteurs. »

« Nous avons un aperçu des conséquences neurologiques que la pandémie de grippe espagnole de 1918 à pu avoir, ajoute son confrère, le professeur Kevin Barnham. À l’époque, le risque de développer la maladie de Parkinson a été multiplié par deux ou trois. Étant donné que la population mondiale a de nouveau été frappée par une pandémie virale, il est en effet très inquiétant de considérer l’augmentation mondiale potentielle des maladies neurologiques. »
Selon lui, l’une des causes qui déclencherait une Maladie de Parkinson serait une inflammation au niveau du cerveau. « Elle déclenche une cascade d’événements qui peuvent finalement conduire à la maladie de Parkinson. Le SARS-CoV-2 semble contribuer à stimuler cette inflammation ».

Des hypothèses qui devront être étudiées grâce à un suivi long des patients

« Des hypothèses ont été formulées sur le lien entre la Covid-19 et les maladies neurodégénératives comme la Maladie d’Alzheimer ou de Parkinson, puisque que le virus atteint les structures cérébrales, abonde Thibaut Dondaine, neuropsychologue et chercheur au CHU de Lille. La Covid-19 peut entraîner une neuro-inflammation, un accident ischémique transitoire ou encore une hypoxie qui mettent le cerveau en souffrance. Cela peut mener à long terme à une ‘cascade physiopathologique’ qui déclencherait des troubles pouvant correspondre à ceux rencontrés dans la Maladie d’Alzheimer. »

La Covid-19 peut entraîner une neuro-inflammation, un accident ischémique transitoire ou encore une hypoxie qui mettent le cerveau en souffrance. 

Cependant, il ne s’agit pour l’instant que d’hypothèses, tempère le chercheur.  « Nous avons besoin de recul ainsi qu’un suivi long des patients. Il n’est pas question de faire directement le lien entre l’infection et l’induction d’un trouble neurodégénératif pour le moment. » Selon lui, seule l’épidémiologie pourrait nous aider à y voir plus clair dans les années à venir.

Et de rappeler que « les maladies neurodégénératives sont induites par plusieurs facteurs : biologiques, génétiques, environnementaux ». Il est donc trop tôt pour tirer des conclusions alarmistes. 

CoCo Neurosciences, une étude aux résultats très attendus

Depuis avril 2020, l’Institut du Cerveau et de la Moelle (ICM) a lancé une étude intitulée CoCo Neurosciences. Elle devrait se terminer en avril prochain.

« À l’Institut du Cerveau, nous savons que les grandes pandémies peuvent donner lieu à des complications neurologiques aiguës ou retardées, précise un communiqué. Un fait qui se confirme aujourd’hui puisque la perte de goût ou d’odorat observée chez certains patients relève des fonctions nerveuses. Pour autant, nous n’en savons pas plus des répercussions de ce coronavirus sur notre système nerveux, alors qu’à ce jour, plus d’un million de personnes sont touchées dans le monde.« 

À l’Institut du Cerveau, nous savons que les grandes pandémies peuvent donner lieu à des complications neurologiques aiguës ou retardées.

Le but sera d’évaluer rapidement et de manière précise les impacts éventuels de la Covid-19 sur le système nerveux des personnes touchées ; les conséquences psychiatriques pour les patients eux-mêmes (dues notamment à de très longues périodes de réanimation) ainsi que pour leur entourage (dues par exemple au confinement) ; les patients déjà atteints de pathologies neurologiques comme les maladies inflammatoires (sclérose en plaques…) et les maladies neurodégénératives (Parkinson, Alzheimer…).

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