Avant le feu d’artifice cinématographique promis par le film d’ouverture, « Annette », le président du jury du
Festival de Cannes, le réalisateur américain Spike Lee, a placé, ce mardi,
les retrouvailles du cinéma mondial sous le signe de la lutte, avec un cri pour les droits des Noirs aux Etats-Unis.

« Ce monde est dirigé par des gangsters », a déclaré le premier cinéaste noir à ce poste, s’en prenant notamment aux dirigeants russe Vladimir Poutine et brésilien Jair Bolsonaro, en conférence de presse, casquette noire siglée « 1619 » sur la tête, en référence à l’année d’arrivée des premiers esclaves aux Etats-Unis.

Racisme, féminisme et écologie

Il avait d’abord évoqué le sort des Noirs aux Etats-Unis, cœur de son engagement politique et artistique, qu’il n’a cessé d’explorer dans ses films, notamment « Do The Right Thing ». Plus de « 30 putains d’années après » ce film, « on aurait pu croire que les personnes noires auraient arrêté d’être traquées comme des animaux », a-t-il déclaré, avant de faire référence aux Noirs victimes de violences policières aux Etats-Unis comme « le frère Eric Gardner » ou « le roi George Floyd », qui ont été « tués, lynchés », a-t-il ajouté.

Plusieurs membres de son jury ont embrayé, du réalisateur brésilien Kleber Mendonça Filho sur la situation politique dans son pays, à l’actrice Maggie Gyllenhaal, sur la place des femmes dans le cinéma, en passant par la Française Mélanie Laurent qui a fait le lien avec l’écologie. Ils avaient auparavant fait part de leur joie de célébrer à Cannes les retrouvailles du cinéma mondial, après des mois de diète imposées par le Covid : « C’est un miracle d’être ici », s’est enthousiasmé le Coréen Song Kang-ho, l’acteur principal de « Parasite », Palme d’Or 2019.

« Vibrer » à nouveau

Après ces prises de parole et une séance photo où ils ont pu enlever le masque, – Spike Lee en sweat siglé PSG, Mylène Farmer en robe rouge et chevelure flamboyante – les jurés entameront mardi soir leur marathon cinéphile, avec 24 films, de la jeune Julia Ducournau à Paul Verhoeven en passant par l’Italien Nanni Moretti ou le Russe Kirill Serebrennikov, et une compétition qui doit s’achever par la remise de la Palme d’Or le 17 juillet. Mardi soir, c’est « Annette », un flamboyant opéra rock signé de Leos Carax, cinéaste aussi culte que rare, et du duo musical légendaire des Sparks, qui ouvre les festivités (et sort simultanément dans les salles françaises).

« Le Covid est toujours là, mais être présent pour le retour du festival, dans le film d’ouverture (…) c’est un grand sentiment de soulagement et d’excitation », a confié Adam Driver, tête d’affiche avec Marion Cotillard de cette comédie musicale inclassable, et premier film du réalisateur français depuis « Holy Motors » il y a neuf ans. En plein tournage et venu spécialement à Cannes le temps de la cérémonie, l’acteur, qui n’aime pas voir ses films, a déjà prévu… de quitter la salle pour se réfugier dans un bureau quand « Annette » commencera : « Là, je joue avec l’agrafeuse ou le scotch et je reviens quand les lumières se rallument », a-t-il confié, « et je fais comme si j’étais resté là ! ».

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