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  • Olivier Marchal, réalisateur de, entre autres, 36 quai des Orfèvres, Les Lyonnais ou encore Bronx, est revenu à Marseille caméra au point y tourner Pax Massilia, une série Netflix disponible le 6 décembre.
  • Entre trafiquants de drogue et policiers aux méthodes à l’ancienne, l’ancien flic signe une série nerveuse..

Il a débarqué à Marseille avec ses caméras pour tourner Pax Massilia et s’apprête à y poser ses valises dans un mélange de vie professionnelle et personnelle. Pour 20 Minutes, Olivier Marchal revient sur sa nouvelle série disponible le 6 décembre sur Netflix et sur une ville où policiers et trafiquants se livrent quotidiennement, en fiction comme dans le réel, une guerre nerveuse.

Vous avez travaillé, joué et filmé plusieurs fois à Marseille. Que trouvez-vous cinématographiquement dans cette ville ?

C’est un mélange de bruits, de couleurs, de cris, d’odeurs… On disait d’un peintre qui était l’un des meilleurs amis d’Ernest Hemingway et dont le nom m’échappe, que sa peinture sentait la transpiration et ressemblait à un grand éclat de rire. Pour moi, Marseille, c’est ça. Une ville qui transpire, vit, chante, rit. Évidemment, je fais du polar. Donc il y a la violence et la noirceur inhérentes, mais le cadre de la ville fait que tout est magnifié. Et moi j’aime bien magnifier la violence.

L’ancienne procureure de Marseille, Dominique Laurens, a inventé le terme de « narchomicide » pour décrire une évolution où, disons, qu’avant on fumait plutôt les têtes de réseau et qu’aujourd’hui on peut rafaler des minots…

Quand j’étais flic dans les années 1980, c’était des mecs de 40-45 ans qui se flinguaient. Mourir à 16 ans pour de la coke, je trouve ça terrible. Le trafic de came, il n’y a plus que ça de toute façon. Il n’y a plus d’argent dans les banques, dans les fourgons. En plus, le mec qui braquait un fourgon prenait vingt piges, un trafiquant de drogue, il en prend sept-huit. Voyez, au finish, le mec préfère la came que monter au charbon. Et de toute façon il n’y a plus rien à braquer, donc voilà.

Est-ce qu’une guerre contre la drogue est gagnable ? La drogue est partout aujourd’hui, chez les riches, chez les pauvres, dans tous les quartiers, est-ce foutu ?

Qui n’en a pas pris ? Tout le monde en prend, il y en a partout, on vous sort ça maintenant comme un paquet de clope. A mon époque c’était 2.000 francs le gramme – l’équivalent de 400-450 euros. Là vous le touchez pour 40 balles. C’est facile, tout le monde fait la fête avec ça. Je ne sais pas si c’est gagnable. Surtout ça engendre une économie parallèle incroyable. J’ai un copain des stups qui a fait tomber un gros trafic. Et à un moment donné il y a eu des plaintes parce que les loyers n’étaient plus payés. Il n’y avait plus d’argent qui rentrait, c’est aussi simple que ça. Alors, je n’ai pas été le dernier, j’ai fait le con comme tout le monde. Voilà, l’alcool, la came, et tout. Après c’est la prise de conscience des états de décérébration, et surtout de ces putains de descentes. On fait les grands huit moralement et c’est de tout ça qu’il faut parler. Le combat viendra de là : dégoûter les gens d’en prendre.

Dans « Pax Massilia », un nouveau réseau s’installe avec un nouveau produit, du crack, qu’on a encore assez peu à Marseille, fout le bordel et les morts s’empilent. Est-ce que Marseille a besoin de retrouver un parrain à la Zampa, à la Campanella pour retrouver la paix ?

(rires) On aimerait bien qu’ils reviennent les vieux, les anciens. Il y a la Brise de mer encore, mais bon, ils se sont assagis. Comme dans toutes les familles, il faut un papa, un tonton. La grande connerie a été de supprimer la police de proximité qui permettait d’avoir des grands frères flics. Pourquoi on n’irait pas dans les banlieues parler avec les gamins ? Nous, on est condés, on a la carte bleu-blanc-rouge, mais on vient d’un milieu comme vous. Sauf que nous, on a eu les codes que vous n’avez pas parce que votre frère est en prison, ou la maman est morte, que les gamins sont laissés dans les quartiers qui ont été méprisés par une partie de l’administration. A Consolat [une cité de Marseille] – où on a tourné pendant une semaine – franchement, tu vois l’état, tu te dis : « Comment font les gamins ? » Alors, beaucoup s’en sortent avec le trafic de chichon parce qu’il faut bien qu’ils bouffent.

Vos personnages sont un peu gris, toujours, vos films sont noirs, est-ce un peu le reflet de ce que vous êtes, de ce que vous pensez ?

Je suis un pessimiste joyeux. En même temps, je suis très mélancolique et surtout cette époque me désespère. Le manque d’envie et de curiosité, surtout des gamins. Nous, on s’ennuyait. L’ennui me faisait aller dans la bibliothèque de mon père, qui n’était pourtant pas un intello, mais j’y ai découvert Thomson, Chandler, San Antonio… J’avais envie d’être comme Jack London, d’avoir la vie d’Hemingway. Aujourd’hui il y a une inculture, même dans nos milieux artistiques. La génération qui arrive ne sait pas même qui sont Lino Ventura, Jean Gabin, Marlon Brando… Les gens, aujourd’hui, ils veulent être connus, célèbres, et ne font pas du cinéma ou de la musique pour en adopter le style de vie. Je ne veux pas dire que c’était mieux avant, mais je le pense quand même très fortement. C’était beaucoup mieux avant.

Vos flics sont toujours des super flics mais ils ont des problèmes avec l’administration, leur hiérarchie. On le voit encore dans « Pax Massilia », ils ont l’IGPN sur le dos. Les flics devraient-ils être moins contrôlés ? Et est-ce qu’un bon flic est forcément un peu voyou ?

C’est le fameux dicton « un flic est un voyou qui a mal tourné ». Moi, mes flics aujourd’hui seraient tous en prison. Je pense que c’est nécessaire de contrôler, que le rôle de l’IGPN est très important. Mais, et c’est l’autre dicton que je mets en début de série : « Un loup élevé par de chiens reste un loup ». Faut qu’un loup soit un loup et que quand on a affaire à des loups il faut se comporter comme des loups, pas comme des chiens. Les techniques doivent être adaptées à l’adversaire, pour moi. Je ne suis pas pour la violence. On n’entrait pas flics pour être violent mais pour servir et protéger. C’est toujours ça. Après, on appuie toujours sur le bouton, la pustule qui est là. Mais bon, tout va bien quand même. Car lorsqu’on voit tout ce qu’il s’est passé en France, il n’y a quand même pas eu de bavures et de débordements à outrance, malgré toutes les situations qui ont dégénéré.

Si vous aviez été ni flics, ni cinéaste, ni acteur, auriez-vous pu être voyou ?

Moi, non (sourire). J’ai la fascination des beaux voyous, mais je leur laisse leur vie. Finir sur un trottoir ou en prison, j’ai trop peur de ça. J’aime trop la liberté. Je ne sais pas, j’aurais tenu un bar. Barman, voilà ! Ça, j’aurais adoré (rire).

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