« On est heureux de pouvoir accueillir des cinéastes ukrainiens », s’est réjoui ce jeudi sur franceinfo Thierry Frémaux, délégué général du Festival de Cannes qui vient de révéler sa sélection. Le plus grand festival du 7e art du monde aura, comme souvent, une résonance géopolitique avec la présence du cinéaste ukrainien Sergueï Loznitsa et le russe Kirill Serebrennikov qui vit maintenant à Berlin. « On va penser beaucoup » à l’Ukraine, affirme Thierry Frémaux.

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franceinfo : La présence du réalisateur russe Kirill Serebrennikov est symbolique ?

Thierry Frémaux : C’est presque une histoire dans l’histoire puisqu’il faisait partie des dissidents à Vladimir Poutine. Il était assigné à résidence. Il ne voulait pas quitter la Russie de peur de ne pouvoir jamais y retourner.

« Et à la suite de la guerre en Ukraine, il a décidé de quitter la Russie. Il est passé en effet par Paris. Il vit maintenant à Berlin. Il fera d’ailleurs l’ouverture du festival. »

à franceinfo

C’est un homme de théâtre, du Festival d’Avignon, C’est important d’avoir ce film qui, pour le coup, n’est pas un film de dissident ou un film polémique. Mais c’est important de l’avoir, lui, en pleine liberté et à l’intérieur, bien entendu, de la situation géopolitique mondiale qui est particulière. Il sera là à un moment où on est aussi heureux de pouvoir accueillir des cinéastes ukrainiens qui permettront in vivo et de manière pratique, de penser à l’Ukraine. On va y penser beaucoup, mais là, il y aura des films et des films qui évoquent l’histoire de ce pays particulier.

Il y aura notamment le cinéaste ukrainien Sergueï Loznitsa qui a été plusieurs fois en compétition à Cannes…

Oui, c’est un cinéaste qui a fait d’ailleurs un film qui s’appelle Donbass, qui montrait déjà les exactions russes ou russophones dans cette partie du pays. Et puis, c’est aussi un documentariste célèbre. L’an dernier, il a proposé un film qui s’appelle Babi Yar sur le massacre de Babi Yar.

On a le premier film d’un jeune cinéaste ukrainien qui raconte l’histoire d’une militaire et d’une fille des renseignements qui, dans le Donbass, a fait la guerre contre les Russes et qui a été enlevée, torturée et qui revient.

à franceinfo

C’est quoi revenir de la guerre? William Wyler, avec Les plus belles années de notre vie, avait déjà traité cela. Le cinéma l’a fait beaucoup. Et ce film-là, c’est comme s’il avait été tourné il y a trois semaines, un mois. C’est-à-dire qu’on a l’impression que nous sommes là-bas et que nous vivons avec cette jeune héroïne qui a du mal à raconter ce qu’elle a vécu. Comment raconter la guerre et comment faire comprendre à ceux qui ne l’ont pas vécue ? On est tous un peu dans ce cas-là et le cinéma est là pour essayer de nous aider à comprendre.

Combien de réalisateurs et de réalisatrices à Cannes sont présents cette année ? La parité est respectée ?

L’important, c’est les tendances. Ce n’est pas une situation d’une année donnée et la tendance est quand même à ce qu’il y ait de plus en plus de réalisatrices dans le monde du cinéma en général et à Cannes en particulier. Il ne faut pas lire la seule sélection, mais nous avons surtout de jeunes réalisatrices, une nouvelle génération de réalisatrices qui vient d’Afrique du Nord, par exemple Maroc, Algérie, Tunisie. Donc, sur cette question-là, le cinéma opère une mutation lente, certes, mais il y avait 90 ans d’histoire du cinéma sans réalisatrices et aujourd’hui, elles sont de plus en plus nombreuses.

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