Le légendaire pianiste et chef d’orchestre Daniel Barenboim, atteint d’une maladie neurologique, a annoncé vendredi sa démission pour raison de santé de l’Opéra de Berlin, qu’il dirigeait depuis 30 ans.
« Malheureusement, mon état de santé s’est nettement détérioré au cours de l’année dernière. Je ne peux plus fournir les prestations que l’on exige à juste titre d’un directeur musical », a confié le maestro israélo-argentin, précisant qu’il cesserait cette activité le 31 janvier.
Ovation du Nouvel an
Barenboim avait fait un retour au pupitre pour diriger la 9e symphonie de Beethoven, lors de deux concerts du Nouvel an à Berlin, les 31 décembre et 1er janvier, dans un Staatsoper plein à craquer qui lui avait réservé une ovation.
Il dirigeait l’Opéra d’Etat de Berlin et son orchestre, la Staatskapelle, depuis trois décennies. Son contrat courait jusqu’à 2027. « Ces années nous ont donné des ailes à tous points de vue, tant sur le plan musical qu’humain », selon le chef d’orchestre. « Au fil des années, nous sommes devenus une famille musicale et nous le resterons », estime-t-il dans son communiqué, exprimant son « admiration pour les chanteurs, les membres du choeur et tous les autres collaborateurs de l’Opéra national ».
« Il va de soi que je resterai – tant que je vivrai – très étroitement lié à la musique et que je suis prêt à continuer à diriger, aussi et surtout la Staatskapelle Berlin », conclut-il.
« C’est avec beaucoup de respect que Daniel Barenboim franchit cette étape dans l’esprit de l’institution et quitte ses fonctions », a réagi l’intendant de l’Opéra de Berlin, Matthias Schulz. « On ne peut qu’imaginer à quel point cette décision a dû être difficile » pour le chef d’orchestre.
« Messager de la paix »
Né en Argentine, M. Barenboim a débuté sur la scène internationale en tant que pianiste à l’âge de 10 ans, avant de devenir un chef d’orchestre de premier plan. « A 11 ans, Daniel Barenboim est déjà un phénomène », écrit alors le grand chef allemand Wilhelm Furtwängler. Ses enregistrements des cinq concertos pour piano de Beethoven ou encore de l’intégrale des concertos pour piano de Mozart feront date.
Avec son épouse, la violoncelliste britannique Jacqueline du Pré, il formera un des plus beaux duos musicaux du siècle. Jusqu’au décès en 1987, à 42 ans, de la musicienne, vaincue par une sclérose en plaques.
Enchaînant les enregistrements, Barenboim dirige pendant 14 ans l’Orchestre de Paris (1975-1989). Nommé directeur artistique et musical du nouvel Opéra Bastille, il est limogé par Pierre Bergé six mois avant l’ouverture. Le chef débute une carrière américaine à la tête du Chicago Symphony Orchestra (1991-2006), parallèlement à la direction du prestigieux Staatsoper de Berlin. Il deviendra « chef à vie » de son orchestre, la Staatskapelle. Il deviendra aussi un fidèle de Bayreuth, au risque de recevoir des critiques en Israël pour le fait de diriger des oeuvres de Wagner.
Son statut de maestro tout-puissant lui vaut en 2019 des accusations d’autoritarisme de la part d’ex-collaborateurs de l’Opéra berlinois.
Israélien, Argentin, Espagnol et détenteur depuis 2008 d’un passeport palestinien, Barenboim n’a pas hésité à utiliser sa notoriété pour servir ses convictions. Il a notamment créé une fondation et un orchestre chargés de promouvoir la coopération entre les jeunes musiciens d’Israël et des pays arabes. Nommé « messager de la paix » de l’ONU en 2007, il dirige un concert historique à Gaza en 2011.
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