Un shooting de la marque parisienne au Mexique est à l’origine d’une polémique qui ne s’arrête pas.
- Bad buzz au Mexique
- Le style Sézane
- Où acheter ?
- Soldes
- Demain
En quelques années, Sézane a su fédérer une vraie communauté de fans autour de ses créations faciles à adopter et à s'approprier. La recette du succès de la griffe créée par Morgane Sézalory ? Ses collections dropées régulièrement sur son site Internet, qui a longtemps été le seul point de vente de la marque. Pour mettre en avant ses créations, l'entrepreneure a l'art et la manière. Des shootings photos gais et colorés également relayés sur l'Instagram de Sézane suivi par 2,4 millions d'abonnés.
Que se passe-t-il au Mexique avec Sézane ?
C'est précisément l'une de ces séances photos qui vaut à Sézane un bad buzz croissant ces derniers jours, relayée par le compte Instagram @lienzos.extraordinarios via une vidéo le lundi 10 janvier. On y voit une femme zapotèque (un peuple originaire de la région de Oaxaca) portant un gilet vert, immortalisée par une équipe de photographes qui lui fait effectuer quelques pas de danse.
https://www.instagram.com/p/CYeiwbILGnr/
Une publication partagée par Bupu Cortés (@lienzos.extraordinarios)
Bupu Cortés, créatrice textile mexicaine et propriétaire du compte @lienzos.extraordinarios, accompagne sa vidéo d'une légende explicite : "Pourquoi est-ce que nous nous sentons gênés quand une marque vient à Oaxaca pour créer des modèles, des campagnes ou des collaborations ? Ce n'était pas suffisant de dénoncer Isabel Marant [qui en 2015 et en 2020 a été accusée d'utiliser des motifs traditionnels mexicains dans les collections de la griffe à son nom, ndlr]; maintenant, c'est la marque française Sézane qui arrive à Oaxaca avec ses gros sabots. (…) On ne peut que se sentir mal en regardant cette vidéo. L'équipe de Sézane a pensé que ce serait facile de filmer une vieille femme du marché de Teotitlán Del Valle, peu importe qu[e la griffe] ait au préalable convenu avec la ville qu'elle n'importunerait pas la population. Sézane n'en a rien eu à faire et a habillé cette femme presque comme si elle était un accessoire (le gilet qu'elle porte fait partie de la collection de la marque) et l'a fait danser en lui proposant 200 dollars mexicains, soit à peu près 10 dollars américains. Est-ce que ce sera présenté comme une inspiration ? Est-ce que les gens seront fiers de voir le Mexique représenter une marque internationale ? Assez, assez, assez. Les cultures originelles du Mexique ne sont pas un zoo. Nous ne somme pas des accessoires. Nous ne sommes pas un catalogue de designs en libre service. Nous ne sommes pas au service de marques internationales".
Une polémique nationale
Le 10 janvier, toujours, l'organisation gouvernementale mexicaine INPI, l'institut national des peuples indigènes, annonce l'ouverture d'une enquête et lance "un appel ferme aux marques privées et aux entreprises pour qu'elles cessent d'exploiter le capital culturel des peuples et communautés autochtones et afros-mexicaines". L'INPI précise, en référence au shooting photo de Sézane susmentionné : "Ces actions menacent la dignité des peuples et des communautés et renforcent les stéréotypes racistes à l'égard des cultures et traditions autochtones".
De son côté, Bupu Cortés a relayé le mercredi 12 janvier sur son compte @lienzos.extraordinarios un message d'excuses envoyé par Morgane Sézalory.
https://www.instagram.com/p/CYnXsaUDeHp/
Une publication partagée par Bupu Cortés (@lienzos.extraordinarios)
La fondatrice de Sézane y écrit entre autres : "Je vous entends sincèrement et je veux vous présenter mes profondes excuses pour mes erreurs en ne réussissant pas à partager tout mon respect, mon admiration et mon désir de rencontrer et d'échanger avec la communauté locale (…). J'espère que vous pourrez croire que je n'ai jamais voulu blesser quiconque ou manquer de considération. Ma seule intention depuis que j'ai commencé à travailler et voyager a toujours été de faire les choses de la plus belle et plus juste des façons, avec tout mon cœur et ma passion. Et j'ai toujours rendu et essayé d'agir de la meilleure façon à travers des actions concrètes (…) J'ai toujours construit une collaboration entre ma marque et les communautés locales en aidant concrètement chaque partie du monde qui nous accueille à travers notre programme caritatif Demain (…) Je veux dire à quel point je n'ai jamais voulu faire quelque chose de mal. Mais je comprends que je l'ai fait malgré mes meilleures intentions; je me sens vraiment triste et veux par-dessus tout réparer mes erreurs." La créatrice précise également : "Ces photos avec les personnes indigènes étaient pour moi et non pour ma marque, lors de notre traditionnel déjeuner d'au revoir – elles n'étaient pas prévues pour des communications commerciales mais pour partager mon voyage", détaillant les conditions du shooting et la rencontre avec la vieille dame immortalisée dans le gilet vert.
https://www.instagram.com/p/CYnqeWYOe5E/
Une publication partagée par Bupu Cortés (@lienzos.extraordinarios)
Un texte qui a suscité une réponse immédiate de Bupu Cortés : "Le contenu de votre message est qualifié dans mon pays de "larmes blanches"", ajoutant "Comment pouvez-vous utiliser les mots collaboration et programme caritatif dans la même phrase quand vous parlez de communauté indigène ? Vous arrivez dans un territoire auquel vous n'appartenez pas et que vous ne comprenez pas et vous voulez immédiatement y intégrer votre programme caritatif ? La communauté vous l'a-t-elle demandé ? Nous n'avons pas besoin d'un programme caritatif. Nous avons besoin de compensations financières justes pour les différents lieux que vous avez utilisés. Nous avons besoin que vous versiez les mêmes salaires que ceux que vous versez à vos mannequins. (…) Et par dessus tout, nous avons besoin que vous arrêtiez d'extraire le capital culturel des cultures indigènes comme si ce n'était rien. Ça n'a rien à voir avec des programmes caritatifs; il s'agit de montrer du respect à travers des actions concrètes". Bupu Cortés insiste aussi sur le savoir-faire et l'histoire liés aux vêtements et aux tissus zapotèques. Un message clôt avec fermeté : 'Les communautés indigènes du Mexique ne sont pas des studios ou des boutiques de souvenirs que vous pouvez admirer comme lors d'un safari. Est-ce que vous comprenez la grande différence qu'il y a entre votre réalité et la nôtre ?"
Qu'est-ce que Sézane (et les autres marques) peuvent tirer de cette polémique ?
Si on entend de plus en plus parler d'appropriation culturelle en mode et des bad buzz que les marques provoquent ces dernières années, c'est parce que les réseaux sociaux permettent une caisse de résonnance énorme à des voix qui jusqu'ici n'arrivaient pas forcément à se faire entendre (et que peu de gens étaient prêts à écouter). Grâce à Instagram, Twitter et consorts, les pays vivent tous à la même heure et un scandale au Mexique peut presque instantanément avoir une portée mondiale. Mais la question qui se pose toujours, c'est pourquoi personne au sein des équipes des marques ne se rend compte que les actions entreprises, les vêtements crées ou les propos tenus peuvent être offensants. La réponse que certains apportent est le manque de diversité raciale criant dans le milieu de la mode. C'est l'une des raisons pour lesquelles les grands groupes de luxe commencent à nommer des personnes responsables des questions de représentativité, comme, en 2019, Kalpana Bagamane, directrice de la diversité, de l'inclusion et des talents chez Kering, ou en 2021 Vanessa Moungar directrice de la diversité et de l'inclusion chez LVMH… Autres solutions invoquées : soutenir financièrement les créateurs issus de la diversité en investissant dans leur marque, les nommer à la tête de grandes maisons et à la direction de marques qui cartonnent. Ce serait déjà un bon début.
À quoi ressemble le style Sézane ?
C'est en 2013 que Morgane Sézalory fait naître Sézane (contraction de son nom et de son prénom). L'entrepreneure, qui n'a alors pas encore la trentaine, compte déjà à son actif le site de vente en ligne Les Composantes, où elle a proposé pendant cinq ans des pièces chinées aux quatre coins du monde. Avec Sézane, elle amorce un virage créatif et propose sur son site Internet des collections de vêtements léchées tout au long de l'année.
À chaque saison, la griffe crée l'événement. Les petites robes imprimées, les mailles Sézane dans lesquelles on rêve de se lover, les pantalons bien coupés… C'est simple, les filles s'arrachent les créations colorées de la griffe, qui dévoile ses pièces en édition limitée au fil des mois à coups de capsules, de collections mensuelles et de pré-collections pour susciter l'envie tout au long de l'année.
Jamais à court d'imagination, les stylistes de la griffe multiplient les propositions créatives. Après les jeans ou la maroquinerie, ce sont les pièces de décoration et les bijoux Sézane qui ont fait leur apparition au sein des collections. Dorées à l'or fin, ces pièces fines et délicates apportent la touche finale aux looks de la griffe, histoire de prolonger le plaisir. La marque propose aussi désormais une ligne sport (EPS) éco-responsable et des capsules pour la mariée et ses invitées. Une façon d'accompagner la femme dans toutes les étapes de sa vie. Mais pas que. Morgane Sézalory, associée à l'entrepreneur Corentin Petit, a aussi initié Octobre Editions en 2017. Souvent considéré comme le pendant masculin de Sézane, la griffe imagine pour les hommes, donc, des pièces aussi intemporelles que stylées.
Où acheter du Sézane ?
Pour essayer en vrai les jolies robes Sézane, les gilets cosy et autres hits de la griffe, direction sa boutique. Nommée l'Appartement Sézane, le lieu a ouvert en octobre 2015 est installé au 1, rue Saint-Fiacre, dans le IIème arrondissement parisien. Portes battantes en bois, parquet et mosaïque clamant "Paris mon Amour" au sol créent l'atmosphère chaleureuse et hautement instagrammable du lieu. Ici, les clientes peuvent essayer et acheter les vêtements, découvrir les sélections beauté et déco de Morgane Sézalory ou encore s'offrir l'une des multiples collaborations de la griffe. Parmi les plus incontournables, celle réalisée chaque été avec Ysé. La marque de lingerie, dont la fondatrice, Clara Blocman, et l'épouse de Corentin Petit, le co-fondateur de Sézane, s'associe avec la griffe pour des lignes de maillots de bain qui font carton plein dès que les beaux jours arrivent.
En 2019, un nouveau magasin né de l'imagination de Morgane Sézalory a ouvert au 63, boulevard des Batignolles, dans le XVIIème arrondissement de Paris. Nommée Libre Service, cette nouvelle boutique s'est établie dans ce qui fut un jour un grand bazar à l'image du BHV, où le quartier convergeait pour tout type de produits et services. Plus de 400m2 sur deux niveaux, prêts à digérer l'affluence dingue des boutiques de la marque mais aussi à devenir le carrefour des envies. Le vintage y a une place prépondérante, avec des pièces qui tapent dans le mille des caprices du moment (Ceintures, T-shirts imprimés, jeans Levi's que l'on peut faire ajuster sur place ou encore foulards chinés par l'équipe). On peut également y trouver les fruits de la collaboration avec des marques d'upcycling comme Les Récupérables et Hôtel Vêtements. S'ajoutent à cela des produits de beautés, de la papeterie, des accessoires et autres livres, mais aussi des jouets érotiques, autant de petits plaisir à s'offrir en plus d'un joli pull.
Depuis 2021, un troisième Appartement a ouvert à Paris, installé chaque fois dans le VIIème arrondissement, au 122, rue du Bac. Et pour faire face au succès de Sézane, la griffe a décidé de s'exporter hors de Paris en ouvrant des Appartements à Londres, New York, Bordeaux, Lille, Madrid ou encore Aix-en-Provence. Elle s'installe aussi régulièrement de façon éphémère dans d'autres villes internationales, comme Los Angeles.
Y a-t-il des soldes chez Sézane ?
Celles qui rêvent de soldes Sézane, d'un outlet Sézane ou d'un code promo Sézane peuvent arrêter de se leurrer. Parmi les piliers de la griffe, il faut compter sur une mode raisonnée, où le produit est vendu à un prix juste, donc pas dévoyé à la fin de chaque saison avec des rabais en cascades. Seules exceptions : des opérations ponctuelles comme avec Videdressing, qui pendant un mois assurait 10% de réduction chez Sézane à toutes les personnes qui revendaient des pièces de la griffe sur le site. Il faut aussi compter sur la Boutique Solidaire de la marque, sise à quelques encablures de l'Appartement originel de Sézane. Les aficionados de la griffe y trouveront des pièces d'archives et des vêtements d'anciennes clientes vendus à prix réduits, dont les bénéfices sont reversés au programme solidaire Demain.
À quoi correspond le programme Demain de Sézane ?
Depuis 2018, Sézane a décidé de mettre en lumière ses engagements sociétaux et écologiques. Son programme solidaire nommé Demain a récolté 1,2 millions d'euros l'année de son lancement, distribués principalement à trois associations, La voix de l'enfant, Sport dans la ville et Pencils of Promise. Pour réunir cette somme, la marque a lancé tous les mois son "Appel du 21", au cours duquel elle met une pièce spéciale à la vente dont tous les bénéfices sont dédiés à Demain. Ce jour-là, 10% des ventes de la marque sont aussi reversées au programme. En parallèle, Morgane Sézalory travaille de plus en plus sur les problématiques éco-responsables, avec l'utilisation de tissus de plus en plus respectueux de l'environnement, la réduction des emballages et la réflexion autour de l'utilisation de matières organiques. Avec Sézane, toutes les idées sont bonnes pour que demain soit au moins aussi bien qu'aujourd'hui.
Voir cette publication sur Instagram
Une publication partagée par Sézane, marque engagée (@sezane) le
Source: Lire L’Article Complet