Éviter d’offenser l’odorat délicat de ces femmes à la sensorialité exacerbée : telle fut pendant plus d’un demi-siècle la vocation du smoking.
Cette veste de drap traditionnellement noire, créée initialement dans les années 1860 pour Edouard VII par son tailleur de Savile Row, et dont la particularité tient – selon Le Vêtement de A à Z – au « contraste entre l’aspect mat de la principale partie du vêtement » et au « satiné de certains détails, cols, boutons, baguettes masquant les coutures de côté ».
Un véritable exercice de style à l’histoire riche.
Du fumoir à la scène
Immaculé l’été et/ou sous l’équateur, le smoking se porte selon Maurice Leloir (et son dictionnaire de la mode) « ouvert comme un habit de soirée », « par les hommes dans les dîners de demi-gala, au fumoir, au théâtre et dans les cérémonies où l’habit n’est pas de rigueur. »
Un apanage vestimentaire masculin donc, qui est pourtant très rapidement détournée par des femmes qui en ont rapidement saisi le pouvoir libérateur.
Début des années 1910. Le smoking moderne – démocratisé pour le commun de l’élite anglaise dans les années 1890 – n’a que 20 ans qu’on le repère déjà au dos d’indomptées telle Colette et Renée Vivien qui embrassent occasionnellement cet emblème du vestiaire masculin au détour de mises en scène photographiques.
Pour une femme, le smoking est une pièce indispensable avec laquelle elle se trouve continuellement à la mode, car il s’agit de style et non de mode. – Yves Saint Laurent
De leur côté, les hommes sont amenés à le troquer pour l’uniforme militaire face à l’irruption de la guerre et de ses appels au front.
Résultat ? Les femmes se retroussent les manches, prennent la place de chef de famille et s’empare accessoirement du pragmatique et androgyne vestiaire qui accompagne ces changement d’assignations socio-culturelles.
Un mélange des genres qu’Hollywood vient sublimer dans l’entre-deux guerre avec une Marlène Dietrich qui popularise le smoking au féminin dans Morocco de Josef von Sternberg tandis que la truculente Elsa Schiaparelli s’en inspire pour dessiner une veste noire pour ses clientes les plus extravagantes.
Le smoking, une révolution Saint Laurent
Il faudra pourtant attendre les années 60 et le célèbre coup de génie d’Yves Saint Laurent pour voir le smoking féminin descendre de son pied d’estale scénique et se voir consacré par le commun des mortelles.
Nous sommes en 1966 et, malgré de premiers balbutiements féministes, les femmes ne sont pas toujours autorisées à porter des pantalons, et se voient interdites d’entrée par les banques, les hôtels ou encore les restaurants de luxe si elles ne portent pas une robe ou une jupe.
C’est dans ce contexte que le prodigieux couturier français réinvente le smoking, adapte ses lignes à la silhouette féminine et en fait l’une des pièces les plus iconiques de son vestiaire aux velléités émancipatrices.
Boudé lors de sa présentation pour l’automne-hiver 1966 avec une seule et unique commande, il sera plébiscité quelques semaines plus tard par une clientèle sensiblement plus jeune lors de l’ouverture rue Tournon de sa première boutique de prêt-à-porter : l’emblématique Saint Laurent Rive Gauche.
Julia Roberts en smoking
Catherine Deneuve en smoking Yves Saint Laurent
Janelle Monae en smoking
Ellen Pompeo en smoking
Colette en smoking
Rihanna en smoking
Miley Cyrus en smoking
Marlene Dietrich en smoking
Liza Minelli en smoking
Bianca Jagger en smoking blanc
Lady Diana en smoking
Bianca Jagger en smoking
Beyoncé en smoking
Charlize Theron en smoking
Sylvie Vartan en smoking
Françoise Hardy en smoking
Source: Lire L’Article Complet