- Les animaux, victimes de la mode
- Mode vegan : l’émergence de textiles innovants
- Les vêtements synthétiques ne sont pas toujours écologique
- La fausse fourrure, nouvelle tendance
« Je lègue ma peau à Hermès », C’est par cet objet de mail aussi racoleur que sidérant que la PETA alpaguait ses lecteur dans un communiqué aux allures de testament.
La présidente de la célèbre association de défense des animaux, Ingrid Newkirk, y expliquait vouloir léguer plusieurs parties de son corps à de célèbres marques et institutions, tels que le sellier français, à qui elle souhaite offrir un sac réalisé à partir de sa propre peau.
Une ultime provocation à peine voilée, censée une fois de plus attirer l’attention du grand public sur la souffrance et l’exploitation inutile des animaux.
Or si l’on peut comprendre que la célèbre militante, désormais âgée de 73 ans, pense au futur posthume de ce qui fut le combat de toute une vie, cette initiative témoigne en filigrane d’une certaine forme de pessimisme quant à la fin de l’utilisation des animaux par l’industrie textile.
Les animaux, victimes de la mode
Avec un tel testament, la PETA fait comprendre que les actions chocs qu’elle mène depuis ses débuts sont encore nécessaires et risquent de l’être du fait que le secteur de la mode et du luxe ne ce soit toujours pas pas passé des animaux pour confectionner ses accessoires, ses chaussures ou encore son prêt-a-porter.
Une perspective d’autant plus problématique qu’en plus de la maltraitance dont ils sont souvent l’objet, les animaux élevés pour les besoins de la mode contribuent activement à la pollution de la planète.
Cela se traduit par exemple par leurs émissions de CO2 – du fait notamment de leur propre rejet de gaz comme le méthane- ou plus indirectement, par la consommation et la pollution intensive de l’eau qu’impliquent les activités de tannerie visant à transformer et à teindre le cuir, le plus souvent via des produits chimiques toxiques.
Pour rappel, au Bangladesh environ 7,7 millions de litres d’eau sont pollués par an.
C’est ainsi que selon le site Circumfauna, spécialisé dans les données liées à la mode responsable, une paire de chaussures en cuir est 7 fois plus nocive pour le climat qu’une paire en cuir synthétique.
De la même façon, un pull en laine serait 27 fois plus impactant qu’un sweat en coton, tout comme la fourrure, qui contrairement aux idées reçues, n’est absolument pas biodégradable une fois laissée à l’abandon dans la nature.
Mode vegan : l’émergence de textiles innovants
Des constats alarmants qui ont incité certains petits génies de la mode et de la technologie à imaginer et concevoir des matériaux alternatifs innovants, dénués de tout élément d’origine animale et esthétiquement tout aussi désirables que leur équivalents naturels.
Emblème de cette révolution vegan, la fausse fourrure s’impose désormais moins comme l’exception que la norme avec des matières synthétiques durables, comme la marque House of Fluff et son BIOFUR™, un textile réalisé avec des matières végétales et/ou recyclé conçu pour être biodégradable.
Coté cuir, les inventions de peaux synthétiques se suivent et ne se ressemblent pas, que cela soit avec le Piñatex, fabriqué à partir de déchets issus de la culture de l’ananas, le Mylo, conçu avec des racines de champignons, le Desserto, fait à partir de cactus, ou encore le Vegea, dérivé des résidus de raisins utilisés dans l’industrie du vin.
Coté soie – une matière elle aussi d’origine animale puisqu’elle implique l’utilisation de vers à soie – c’est la viscose (réalisé à partir de cellulose végétale) qui s’impose comme l’alternative la plus populaire tandis que de nouvelles matières comme la fibre d’orange s’affichent comme de nouvelles innovations textiles prometteuses.
Même l’industrie de la laine rivalise d’imagination pour créer des alternatives plus régénératives, avec des méthodes de productions au bilan carbone négatif.
Les vêtements synthétiques ne sont pas toujours écologique
Si ces inventions se révèlent un soulagement pour les défenseurs de la maltraitance animale, leur impact positif reste plus nuancé pour les amoureux de la nature.
Réalisée à partir de bois, la viscose présente par exemple un risque supplémentaire pour la déforestation tandis que les cuirs alternatifs détaillés ci-dessus requièrent tous, pour leur fabrication, des ingrédients synthétiques difficiles à recycler et non-biodégradables.
Certains nécessitent encore et toujours une étape de tannage à l’image du Mylo pourtant adoubé par des créateurs engagés comme Stella McCartney.
Quant aux autres matières vegan, comme la laine de chanvre et la fibre d’orange, elles restent parfois difficiles à produire à grande échelle, rendant peu probable une utilisation massive par l’industrie du prêt-à-porter.
Et on ne parle même pas des matières synthétiques les plus répandues comme le polyester, dont la fabrication ne fait que galvaniser l’industrie du pétrole et du plastique.
À croire, ironiquement, qu’il faudrait choisir entre maltraiter les animaux et mettre en danger la planète.
La fausse fourrure, nouvelle tendance
Pour Kym Canter, fondatrice de la marque House of Fluff, l’essor de la mode vegan passera aussi par une rééducation des consommateurs et une déconstruction des préjugés qui entourent la fabrication de matières animales comme le cuir et la fourrure.
Elle explique notamment que ces dernières ne doivent pas être considérées comme des textiles naturels et/ou durables dans la mesure où leur transformation en pièces vestimentaires nécessitent l’utilisation de substances chimiques extrêmement polluantes.
Selon elle, il faut remettre en question le fait que les matières naturelles sont forcément des symboles de statut et de réussite sociale.
« À cause de ce préjugé, la société considère les fausses fourrures et les faux cuirs comme moins désirables. » explique-t-elle dans une vidéo de 2021 publiée par la plateforme Planet Home.
Une dévalorisation qui, selon d’autres experts, ne saurait survivre aux considérations commerciales qui entourent le secteur de l’innovation textile.
Car si les lobbys des énergies fossiles soutiennent activement les matières comme le polyester comme étant une alternative crédible aux matières d’origines animale, la start-up nation n’a pas manqué de faire de la nouvelle génération de textiles sa nouvelle mine d’or eco-friendly.
« Cela représente une opportunité économique de plusieurs milliards de dollars. » abonde Sydney Gladman, responsable scientifique de la plateforme Material Innovation Initiative, dans un article du Vogue US.
Selon lui, la cupidité du secteur de la mode et du luxe pourrait paradoxalement permettre une métamorphose révolutionnaire de l’industrie du prêt-à-porter.
« Sans aucun doute, les matériaux deviendront la norme dans un futur proche. » promet-il, sans donner d’estimation plus précise. En espérant qu’Ingrid Newkirk, la présidente de la Peta au testament provoquant, puisse voir cette révolution de son vivant.
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