Moins prisée que ses consœurs new-yorkaises, milanaises et parisiennes, la Fashion Week de Copenhague attire pourtant chaque année de plus en plus de monde. Du 28 au 31 janvier, elle a fait défiler les collections automne-hiver 2020-2021 d’une quarantaine de créateurs scandinaves et initié un plan d’action ambitieux en matière d’éco-responsabilité, s’imposant comme l’une des scènes mode les plus attrayantes et innovantes du moment.

« De quoi seront faites les années 20 ? ». C’est la question posée par la griffe Ganni à ses invités à leur arrivée sur les lieux de son défilé automne-hiver 2020-2021. Dans un skatepark griffé de tags colorés à son effigie, le label danois a dévoilé sa vision stylistique pour la saison et la décennie à venir. Manteaux matelassés à collerettes imposantes, blazers oversize aux épaules accentuées, grosses mailles nichées sous des minis robes à sequins, cuir en all over et bottes de rangers à plateforme… en 2020, la femme Ganni se libère des injonctions et prend le pouvoir. Et elle n’est pas la seule.

L’empowerment féminin sinon rien

Cette saison, les designers scandinaves se montrent particulièrement tournés vers l’empowerment féminin, libérant la femme des vêtements moulants et inconfortables au profit de coupes droites et légèrement oversize pour une allure apprêtée et affirmée pile dans l’air du temps. Ainsi le défilé By Malene Birger, qui s’intitule « ode à la femme moderne », l’habille de costumes d’homme structurés, de robes midi aériennes, de longs manteaux droits, de trenchs à empiècements en cuir et de blouses en dentelles semi-transparentes. Des pièces graphiques et intemporelles dont la féminité contemporaine n’est pas sans rappeler l’esthétique de Phoebe Philo, ancienne directrice artistique de Celine. Mathilde Torp Mader en serait-elle la digne héritière ?

Même son de cloche chez Designers Remix, dont les jupes midi en cuir s’associent à des mailles épaisses et les pantalons droits à des chemises d’homme et blazers presque aussi longs, et chez Lala Berlin, dont les costumes se portent ceinturés à la taille ou à même la peau. Fidèle à elle-même, Rotate Birger Christensen, la griffe des influenceuses Thora Valdimars et Jeanette Friis Madsen, dévoile une ribambelle de robes de soirée glamour, incorporant néanmoins plus de pièces à glisser par-dessus, comme des vestes en cuir courtes et colorées.






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Défilé Rotate Birger Christensen ©Imaxtree

Question souliers, terminés les escarpins hauts perchés pour élancer sa silhouette, pour beaucoup, l’heure est désormais au confort et à la praticité. Si Ganni opte pour les bottes de rangers, Rodebjer adopte les babouches, Holzweiler les bottes plates, et Cecilie Bahnsen les baskets – toujours assorties à la couleur de sa robe – prouvant qu’être féminine à plat est non seulement possible, mais tout aussi élégant qu’une paire d’ escarpins noirs.

Une mode adaptée à la femme moderne donc, qui permet à celle-ci de s’emparer des problématiques qui secouent cette nouvelle décennie. Et en ce qui concerne l’industrie de la mode, la question la plus urgente est sans aucun doute la question environnementale, thème phare de l’événement. 

La question écologique à l’honneur 

Deuxième industrie la plus polluante de la planète (la première étant celle du pétrole), la mode génère chaque année 1,2 milliards de tonnes de gaz à effet de serre selon un rapport de la Fondation Ellen MacArthur publié en 2017. Des données catastrophiques qui inquiètent et poussent le secteur à multiplier les initiatives en faveur d’une mode plus respectueuse de l’environnement. Mardi 28 janvier, c’est la marque danoise Carcel qui inaugurait la Fashion Week de Copenhague avec son tout premier défilé. Mais sur le podium, aucun vêtement en vue. À la place, la griffe projetait une vidéo dévoilant les problématiques auxquelles est confrontée l’industrie de la mode, notamment la question environnementale, mais aussi celle des standards de beauté imposés aux femmes. « Allons-nous continuer ainsi ou changer les choses ? Nous sommes dans la décennie décisive », pouvait-on entendre. 

La marque norvégienne Holzweiler invitait quant à elle ses invités à prendre place autour d’une serre imposante, qui reflétait distinctement l’inspiration de la collection. Camel, kaki, brique, noir et camouflage sont à l’honneur pour l’automne-hiver prochain, sans oublier les indispensables bottes de pluie, bobs en vinyle et doudounes ceinturées pour faire face aux éléments. Même constat chez Cecilie Bahnsen, dont les mannequins défilent face à un large écran reflétant un champ partiellement enneigé. Ses robes signatures à manches (très) bouffantes se portent cette saison avec une grosse maille, s’agrémentant de temps à autres d’un imprimé à fleurs bleues. La griffe Baum und Pferdgarten s’est quant à elle engagée à sourcer durablement 50% de sa collection, dont les robes longues à imprimé animal, blazers longs, doudounes ceinturées et coloris neutres reflètent l’ADN scandinave de la marque.






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Défilé Holzweiler ©Imaxtree

Fashion Week de Copenhague : un plan durable strict en vigueur dès 2023

Si l’événement a présenté l’étendu de l’engagement des marques scandinaves, pour beaucoup, ce n’est pas encore suffisant. Lors d’une conférence de presse le mardi 28 janvier, Cecilie Thorsmark, PDG de la Fashion Week de Copenhague, dévoilait un plan ambitieux pour réduire drastiquement l’impact de l’événement sur la planète mais aussi celui des marques participantes. « Tous les acteurs de l’industrie – y compris les Fashion Weeks – doivent être responsables de leurs actions et être disposés à changer. Le délai pour éviter les effets dévastateurs du changement climatique sur la planète et les humains est inférieur à une décennie, et nous assistons dès aujourd’hui à ses effets catastrophiques », a-t-elle alarmé.

L’objectif est double. Si les bouteilles en plastique à usage unique sont déjà proscrites au sein des défilés et présentations de l’événement, la Fashion Week de Copenhague fait le pari d’atteindre le zéro-déchet d’ici 2023. Autre mission : réduire de 50% son impact environnemental. Pour ce faire, les marques qui défileront à Copenhague auront pour obligation de répondre à 17 critères stricts, parmi lesquels l’utilisation d’au moins 50% de textile certifié biologique, recyclé ou upcyclé dans la collection présentée, le recours à des décors zéro-déchet pour la scénographie des défilés et l’interdiction de détruire leurs invendus. À la question posée par Ganni, la Fashion Week de Copenhague répond clairement : « les années 20 seront engagées ».

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