« Le public français a l’air d’aimer le film. Peut-être parce qu’il y est question de liberté », suggérait Lorcan Finnegan à 20 Minutes, lors du dernier
Festival de Gérardmer (
Vosges) en janvier. Le dernier long-métrage du réalisateur irlandais, Vivarium, en est reparti bredouille – il a été auparavant présenté à la Semaine de la critique à Cannes et à l’Etrange festival à Paris – mais il a été très bien accueilli par les spectateurs et spectatrices, emballés par cette histoire d’un jeune couple (Jesse Eisenberg et Imogene Poots) visitant une maison avant de se retrouver littéralement pris au piège d’un lotissement.
Si on décrit votre film comme « le pire cauchemar d’un couple hétéro de la classe moyenne », ça vous convient ?
C’est une bonne définition (rires). A l’origine de Vivarium, il y a Foxes, un court-métrage que j’ai tourné en 2011, dans un domaine fantôme [les « ghost estate » sont des lotissements construits durant la période de croissance économique en Irlande]. Toutes les maisons étaient identiques, puisqu’il s’agissait d’optimiser l’espace. Les gens achetaient ces maisons, puis le krach financier est survenu et ils n’ont plus pu rembourser leurs crédits ni revendre. Ils étaient piégés. L’histoire du court-métrage était celle d’un couple empêtré dans une telle situation mais c’était la nature qui voulait reprendre ses droits. J’ai voulu reprendre et étendre ces thèmes dans Vivarium pour en faire un récit plus universel sur le mode de vie de ces personnes de la classe moyenne dans la société de consommation, les idéaux qui leur sont vendus, les injonctions sociales qu’ils subissent au sujet de ce qu’ils doivent faire (être propriétaire, avoir des enfants, un chien…). Je voulais retranscrire une réalité tout en l’amplifiant pour en montrer l’absurdité et la nature cauchemardesque : travailler toute sa vie, rembourser l’emprunt et mourir.
Le film semble se dérouler dans une toile de Magritte. Vous vouliez faire un clin d’œil au surréalisme ?
Déjà dans le script, le lotissement était décrit comme ressemblant à du Magritte ou de Chirico, en termes de lumières et de perfection « imparfaite ». L’idée était que ça ait l’air joli avec des nuages duveteux, des maisons pastel, etc… et en même temps dérangeant. L’endroit devait avoir l’air crédible mais artificiel. Il n’y a pas de vent, de pluie, d’insecte… On a construit les façades de trois maisons dans un entrepôt en Belgique et les intérieurs ont été tournés en studio en Irlande. A chaque fois, on a opté pour un éclairage artificiel pour renforcer le côté aseptisé et dérangeant. On voulait que les couleurs aient l’air toxiques.
Votre film est une coproduction entre l’Irlande, la Belgique et les Etats-Unis. Il vous fallait des acteurs connus pour lui permettre de voir le jour ?
Oui, c’est un film bizarre, alors pour rassembler l’argent nécessaire, on avait besoin d’acteurs avec une certaine valeur commerciale. Si cela n’avait pas été eux, on aurait cherché des profils similaires en termes de notoriété. Imogen Poots est arrivée en premier, elle adorait le scénario, trouvait le personnage et les thèmes intéressants. Elle a signé et puis on a commencé à réfléchir à qui pourrait jouer Tom. On avait une liste et on s’est dit que Jesse Eisenberg serait parfait avec elle. Il ressemble à un type normal. Imogen le connaissait, elle lui a transféré le scénario depuis son smartphone alors qu’on était en train de déjeuner. Deux jours plus tard, il voulait me rencontrer à New York et on s’est très bien entendus.
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