En cette veille de Toussaint, pourquoi ne pas prendre le temps de découvrir des tombes connues ou non, situées à Paris et à Saint-Denis.
Les cimetières de Paris, Marc Faudot les connaît par cœur. Après avoir dirigé le service qui les concernait à la mairie de Paris, il vient de signer le livre Les Cimetières, des lieux de vie et d’histoires inattendues (éd. Armand Colin). Dans ce dictionnaire amoureux, il s’intéresse aussi bien à nos traditions qu’à ces sites étonnants.
Le Père-Lachaise
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« Le premier cimetière conçu pour la visite des vivants aux morts et pour la promenade publique. » L’auteur n’hésite pas à qualifier aussi celui-ci de « musée à ciel ouvert » avec ses treize monuments classés et ses trente mille inscriptions à l’inventaire des Monuments historiques.
Chaque année, plus de 3 millions de visiteurs défilent devant les tombes d’Édith Piaf, Alain Bashung, Molière, La Fontaine…
Les gisants royaux de la basilique de Saint-Denis
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Au bout de la ligne 13 du métro parisien, la basilique-cathédrale offre une superbe surprise gothique avec ses magnifiques vitraux. La célèbre nécropole des rois de France est la dernière demeure de Clovis, de Dagobert, de Pépin le Bref, d’Anne de Bretagne, de François Ier, de Louis XVI et de Marie-Antoinette, ou encore d’Henri II et de Catherine de Médicis. Chacun des 70 tombeaux sculptés comporte un ou plusieurs gisants à l’effigie du mort placés sur la dalle funéraire qui le surmonte. Selon les époques, ils peuvent être allongés ou à genoux en prière. À partir du XVIe siècle, « pour la ressemblance, les sculpteurs utilisent autant que possible le masque de cire pris sur le visage du défunt », explique Marc Faudot. Certains sont accompagnés d’un chien, fidèle, ou d’un lion, courageux et sage.
Le petit cimetière privé de Picpus
Avec celui des Juifs portugais, c’est le seul qui soit privé à Paris. Ici sont enterrés 1 306 hommes et femmes envoyés à la guillotine de manière expéditive durant la Grande Terreur de 1793-1794. L’engin de mort était alors situé sur la place du Trône-Renversé, l’actuelle place de la Nation (XIIe), et le jardin de l’ancien couvent des chanoinesses de Saint-Augustin fut réquisitionné, car il était à proximité. « La guillotine va fonctionner pendant quarante-sept jours à un rythme effroyable, une moyenne de trente exécutions par jour avec des pics à plus de cinquante ! » raconte Marc Faudot dans son livre. Une porte charretière, dont le linteau est encore visible, fut même aménagée.
À l’époque, la chapelle en forme de grotte, disparue depuis, était utilisée par les gardes pour déshabiller les morts qui étaient ensuite jetés dans des fosses communes. Si le site fut préservé, c’est grâce à trois femmes dont des proches avaient été enterrés là : la princesse Hohenzollern-Sigmaringen qui en acheta une partie et la poétesse Anne de Noailles et sa sœur Adrienne, l’épouse du marquis de La Fayette. Elles créèrent la fondation de l’Oratoire et du Cimetière de Picpus, chargée de l’administrer. Seuls les descendants des défunts ont le droit d’être ensevelis dans ce lieu, surnommé aussi le cimetière des nobles.
Les grands hommes du Panthéon
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Retour dans le centre de Paris. À l’origine, ce bâtiment néoclassique du XVIIIe siècle devait être une église à dôme en forme de croix grecque. Mais après la Révolution, l’Assemblée constituante décida que le Panthéon abriterait les grands personnages de l’histoire de France.
Les deux premiers furent les philosophes des Lumières, Voltaire et Jean-Jacques Rousseau, suivis ensuite par les hauts dignitaires de l’Empire, plutôt tombés dans l’oubli depuis. Aujourd’hui, les galeries accueillent 81 hôtes : des hommes politiques de conviction, tels Jean Jaurès ou André Malraux, des résistants comme Jean Moulin, des écrivains, Victor Hugo et Émile Zola, mais aussi des scientifiques, tels Pierre et Marie Curie. Dans le couloir nord, ne manquez pas l’inscription des noms des Justes, ces personnes qui sont venues en aide à des Juifs durant la Seconde Guerre mondiale. Aujourd’hui, seules six femmes reposent dans les galeries, parmi lesquelles Simone Veil et Joséphine Baker, dernière arrivée qui sera sûrement suivie par d’autres consœurs puisqu’il reste plus de 200 places.
Et aussi…
Arrêtez d’embrasser les monuments funéraires !
Les sphinx de la sépulture d’Oscar Wilde, le buste d’Honoré de Balzac, la stèle de Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, celles de Charles Baudelaire, de Jacques Demy et d’Agnès Varda se couvrent régulièrement de baisers laissés au rouge à lèvres par des admiratrices (ou des admirateurs). Sauf que ce geste d’amour a des effets dommageables sur la pierre ! « Gardez vos baisers pour les vivants« , recommande Marc Faudot.
Un bateau à l’origine du corbillard
Au Moyen Âge, la ville de Corbeille (aujourd’hui Corbeil-Essonnes) utilisait des bateaux à fond plat nommés corbillards pour transporter les marchandises jusqu’à Paris. Lors de la Peste noire, ils s’en retournaient avec, à leur bord, des cadavres à enterrer dans leurs fosses communes.
Carnet pratique
Le cimetière du 35 rue Picpus se visite les après-midi de 14 à 17 heures (2 €).
À la basilique Saint-Denis, l’entrée est libre mais la partie où se situent les tombeaux est payante. Plein tarif : 9,50 €. Billet jumelé avec le Panthéon : 16 € avec 3 jours au maximum entre les deux visites.
Au Panthéon, des visites guidées sont prévues et recommandées. Tarif : 11,50 €.
Pour le Père-Lachaise, deux visites sont possibles, une classique et une où vous entendrez parler des fantômes du cimetière. 20 €/ personne.
Julie BOUCHER
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