8,6 millions. C’est le nombre de vues que comptabilise le hashtag #exposition sur
TikTok. Les confinements, qui ont réduit l’accès aux lieux de culture, ont fait du réseau social chinois une véritable plate-forme d’expression artistique sous toutes ses formes. Depuis plusieurs mois, de nombreux utilisateurs français publient des vidéos courtes présentant des artistes, œuvres, galeries – unique exception à la fermeture des lieux de culture – musées et autres espaces d’exposition. Une manière de manifester leur impatience pour retrouver un contact avec l’art.

La Gaîté Lyrique, institution culturelle parisienne, sort grande gagnante de cet intérêt soudain pour les contenus culturels sur TikTok. Son
exposition immersive « Heureux soient les fêlés, car ils laisseront passer la lumière » d’Olivier Ratsi, proposée dès la réouverture des lieux le 19 mai, semble omniprésente sur le réseau social chinois, avec des vidéos dont le nombre de vues a atteint parfois les 70.000.

S’il est encore trop tôt pour la Gaîté Lyrique d’établir un lien entre le succès de son exposition et l’audience cumulée sur TikTok, Jos Auzende, commissaire de l’exposition et directrice artistique de l’institution, se réjouit néanmoins de l’affluence du public : « C’est une surprise de voir de très jeunes visiteurs venir découvrir nos expositions grâce à Instagram ou TikTok. Aujourd’hui ces plateformes sont devenues de véritables agendas culturels à grande échelle », explique-t-elle.

Placer le spectateur « au cœur de l’exposition »

Depuis sa création, la Gaîté Lyrique met en lumière les pratiques artistiques, nées et transformées par Internet et la technologie. L’espace d’exposition propose différents outils pour diffuser la culture : des conférences avec des débats sur un temps long, des concerts où l’expérience est plus directe mais aussi des expositions interactives, immersives ou contemplatives. « On tente de s’adapter à cette civilisation où l’image prime au quotidien, explique Jos Auzende. On essaye de mettre en avant d’autres types d’images, d’œuvres ou d’expériences qui sortent du lieu muséal avec un cartel, des choses à lire… pour placer le visiteur au cœur de l’exposition. »

Pour la directrice artistique, l’expérience immersive que propose « Heureux soient les fêlés, car ils laisseront passer la lumière » est l’une des raisons de son succès sur les réseaux sociaux : « Le spectateur est interpellé par l’artiste et va faire sa propre lecture des œuvres. Un peu comme quand on est sur Internet et que l’on va où l’œil nous guide. C’est cette expérience-là qu’on a voulu retranscrire dans l’espace physique avec ce projet », ajoute Jos Auzende.

TikTok, un indispensable pour les lieux de culture ?

Le 19 et 20 juin, le Grand Palais Ephémère proposait un
concept inédit : le « Palais Augmenté ». Un festival sur 3 jours où étaient mises à l’honneur des œuvres en réalité augmentée réalisées par des artistes internationaux, des étudiants de l’école des Gobelins et de l’ECAL, spécialement pour l’événement. Le public pouvait découvrir ces créations à travers son smartphone grâce à une application spéciale, en déambulant à travers les 10.000 m2 d’espace d’exposition.

Après avoir soutenu et accompagné les plus grands musées et institutions culturelles au monde avec son hashtag #CultureTikTok, le réseau social chinois a souhaité poursuivre dans sa lancée en devenant partenaire de ce festival insolite. « Le projet a été décalé suite aux confinements mais TikTok s’est tout de même montré très intéressé, notamment par l’usage de la technologie mais aussi par le travail créatif des artistes et des écoles sur un support inédit tel que la réalité augmentée », détaille Roei Amit, directeur du numérique à la Réunion des musées nationaux.

Une présence essentielle pour Roei Amit, à l’heure où les musées ont dû s’adapter au numérique et à leur temps, notamment pendant les confinements. « Aujourd’hui le contexte fait que les réseaux sociaux font partis de la vie de tout un chacun et la diversité d’âge du public qu’on a pu observer ce week-end lors du festival montre que des plateformes comme TikTok ne touchent pas que les jeunes », ajoute-t-il.

Des marques à l’affût

D’autres acteurs du numérique ont souhaité participer au projet comme Orange, qui a commissionné une œuvre spécifique de Mélanie Courtinat, visible uniquement via un téléphone confié aux visiteurs, muni de la 5G ou encore Samsung qui a prêté des smartphones au Grand Palais Ephémère.

Roei Amit voit en ces collaborations avec des nouveaux médias tels que TikTok ou Instagram un moyen d’articuler nouvelle technologie et la création artistique : « il y a trois ans, TikTok n’existait pas encore mais on avait organisé ART # CONNEXION, une exposition en partenariat avec Google Arts & Culture sur Picasso et l’art moderne. Le Grand Palais Éphémère a toujours évolué avec son temps et compte bien réitérer l’expérience dans le futur avec d’autres plateformes. »

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