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Les anglo-saxons pratiquent de plus en plus le “unschooling” (ou “life learning”). En France, le principe reste marginal et méconnu. Mais il a séduit Gaëlle. Elle nous raconte.
Gaëlle, 45 ans, consultante en gestion de projet. Lorsque son fils a 18 mois, elle renonce à son poste d’ingénieure pour s’occuper à plein temps de lui. Elle fait le choix de l’apprentissage libre et autogéré, puisque, en France, ce n’est pas l’école mais l’instruction qui est obligatoire.
Pour être prise au sérieux dans sa famille, Gaëlle a dû rentrer dans le moule : bac C, école de commerce, master spécialisé en aéronautique et aérospacial… Mais elle garde de l’école et de ses études un souvenir d’ennui et le sentiment d’un grand gâchis. A la naissance de son fils, elle a une certitude : pas question de lui infliger l’éducation bourgeoise et stricte qu’elle a reçue.
“Je n’avais jamais vu des ados aussi épanouis”
“Pour mes parents, les adultes ne devaient pas se mélanger avec les enfants ni discuter avec eux. C’est pourquoi j’adorais aller chez ma meilleure amie dont la mère était bouddhiste. J’y découvrais un autre système éducatif, sans répression, centré sur l’écoute et le dialogue. Une fois mère, j’ai retrouvé cette bienveillance auprès de deux groupes de discussion sur internet, dont “Parents Conscients”, créé par Catherine Dumonteil-Kremer. Lors d’une de leur convention, j’ai rencontré des parents et leurs adolescents non scolarisés. Jamais je n’avais vu des jeunes aussi bien dans leur peau, curieux, ouverts, sociables. Quand mon mari et moi avons quitté Orléans pour Carpentras, une famille de quatre enfants non scolarisés vivait à côté. L’ambiance chez eux faisait vraiment envie…
“L’école ne répondait pas à leurs besoins”
Puis Lily est née. A 4 ans, j’ai inscrit Argann dans une école Montessori. L’institutrice m’a vite alertée : notre fils s’ennuyait et ne tenait pas en place. Au bout d’un mois et demi, je l’ai récupéré puis me suis intéressée très sérieusement au “unschooling”. Lors d´un voyage d´un an sur les routes de France, j’ai rencontré, chez elles, des familles qui avaient adopté ce mode de vie. Cette enquête a fini de me convaincre. Alors que j’étais séparée et en transition professionnelle, nouvel essai dans une petite école publique en Bretagne… qui a duré trois semaines. En CM1, une seule chose intéressait Argann : discuter avec l’enseignant pendant les pauses. De son côté, Lily faisait un CP assez tranquille mais s’embêtait aussi à l’école. Le soir, ils étaient surexcités et méconnaissables. Les devoirs tournaient au cauchemar. Mon travail m’a obligée à partir en Allemagne. Pendant deux ans, les enfants, âgés de 10 et 7 ans, ont été scolarisés à l’école allemande. Ils se sont très bien adaptés, ont appris à parler allemand et anglais. Le système scolaire y est beaucoup plus souple et ouvert que le nôtre.
“Apprendre ne s’apprend pas ”
De retour en France, après d’âpres négociations avec leur père, j’ai changé mon mode de vie pour offrir à mes enfants une vie sans école. J’ai embarqué Argann, 12 ans, et Lily, 9 ans, pour une année à vélo sur les routes d’Inde et du Sri Lanka. Grâce à leur curiosité insatiable, ils ont fait de ce voyage un vivier d’apprentissages. Le “unschooling” part d’une observation : depuis sa naissance, l’enfant apprend tout le temps, à marcher, à parler… naturellement, selon un rythme qui lui est propre. Pourquoi, à partir de 3 ans, devrait-il être contraint ? Je le vérifie tous les jours : mes enfants apprennent bien plus facilement lorsqu’ils découvrent ce dont ils ont besoin pour nourrir un centre d’intérêt ou un raisonnement. Bien sûr, je suis impliquée et disponible. Je les emmène au musée, au théâtre, au cinéma, nous regardons des documentaires, faisons des recherches sur Internet. Tout est prétexte pour discuter ou approfondir un sujet (de “J’accuse” à l’exposition Léonard de Vinci). Quand ils étaient petits, à Toulouse, plusieurs associations organisaient pour les enfants non scolarisés des cours de langues, de piano, de philosophie, de sport ou d’improvisation théâtrale. En grandissant, mes enfants se sont mis à fréquenter les MJC. Ils aiment bien aussi discuter avec des adultes, ou s’occuper d’enfants plus jeunes.
“J’ai appris à leur faire confiance”
Autant Argann et Lily sont devenus rapidement autonomes – à 6 ans, ils savaient déjà se faire à manger tout seuls -, autant la lecture et l’écriture sont venus beaucoup plus tard. Argann a appris à lire tout seul à 8 ans, et Lily à 10 ans. Aujourd’hui, mon fils dévore les livres et ne rechigne pas à faire des maths. Sa soeur préfère se consacrer à l’écriture. Son challenge : ne plus faire aucune faute (elle en a marre des réflexions de ses grands-parents !). J’ai appris à leur faire confiance, à travailler sur mes peurs – grâce à des lectures comme “Tout le monde n’a pas eu la chance de rater ses études” d’Olivier Roland -, à revoir mon schéma d’apprentissage : l’adulte n’est pas celui qui sait mais celui qui accompagne l’enfant dans ses découvertes et apprend avec lui, à son rythme. Dans mes moments de doute, je pouvais compter sur le soutien de la communauté des « unschooling ».
“Je n’ai aucune inquiétude pour leur avenir”
Mes parents insistent pour que j’inscrive Argann en CAP. Mais je résiste. Mon fils se passionne pour le “game design” (conception de jeux). Pour entrer dans l’école qu’il convoite, le bac n’est pas obligatoire mais recommandé. La direction recherche des profils de créatifs comme le sien. Dès février, on va commencer à réviser le programme du bac. Lily, moins “scolaire” que son frère, consacre tout son temps au dressage de sa chienne et ses deux chevaux. Elle veut en faire son métier pour le cinéma et se donne les moyens d’y parvenir. Ce qui me rassure, c’est que je n’ai jamais rencontré un seul ex-enfant non-scolarisé qui n’ait pu exercer le métier qu’il voulait. Lily me confiait récemment qu’elle avait été choquée d’entendre une copine lui confier qu’elle aimerait “faire ça plus tard mais que ce n’était pas possible”. Ma fille, elle, ne doute de rien : elle compte s’inscrire bientôt à « Incroyable Talent” pour montrer ce qu’elle sait faire comme jeune dresseuse. Loin de la décourager, je l´accompagne. Le plus important dans la vie n’est-il pas d’accomplir son rêve ?
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