- Une opération très risquée pour stopper l’hémorragie
- Des séquelles post-avc importantes
- AVC jeune : de l’importance de ne pas négliger les symptômes
« J’étais allongée sur mon lit et j’ai ressenti une forte douleur dans la tête. J’ai beaucoup vomi et je voyais trouble ». Ce 24 novembre 2021, malgré des symptômes évocateurs, Margaux Jollec, 20 ans, en est persuadée : ce qu’elle ressent n’est pas une gastro-entérite ou un abus de drogues, malgré les dires des pompiers qui la prennent en charge. « Ils refusaient de me porter secours », se souvient-elle.
À l’époque, sa mère est la première à énoncer ces trois redoutables lettres : AVC. « Quand elle a vu mon état, elle a tout de suite pensé à ça, ou à une méningite », rapporte Margaux, un an après.
A priori, rien ne prédisposait celle qui n’avait jamais eu d’antécédents de santé particuliers à une telle pathologie. Pourtant, la jeune femme l’ignorait alors, mais l’une des veines située derrière son crâne menaçait déjà de céder depuis des années, l’exposant à un risque élevé de déclencher un accident vasculaire cérébral hémorragique.
« Chez les patients de moins de 30 ans, cette forme d’AVC est le plus souvent liée à une malformation artérioveineuse ou un anévrisme. Il survient chez des personnes en parfaite santé, sans qu’aucune anomalie n’ait été détectée auparavant », avance le Dr Pierre-François Pradat, neurologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris).
Une opération très risquée pour stopper l’hémorragie
L’AVC ischémique est causé par l’obstruction de l’afflux sanguin dans l’une des parties du cerveau, il est responsable de 80 % des cas selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Plus fréquent, il est généralement plus aisé à diagnostiquer.
À l’origine d’une hémorragie intracérébrale ou sous-arachnoïdienne, l’AVC hémorragique est plus rare et représente près de 20 % des 140 000 accidents vasculaires cérébraux qui surviennent chaque année en France. « C’est un AVC quasi impossible à prédire. Un coup de tonnerre dans un ciel calme« , image le neurologue.
L’un des dangers, c’est que le vaisseau cède à nouveau.
Près de 7 heures après son arrivée aux urgences, Margaux avait enfin pu passer son premier scanner. Face aux images, l’hémorragie est constatée : c’était bel et bien l’AVC qu’elle et sa mère redoutaient. « On m’a transférée dans un hôpital spécialisé, puis j’ai été opérée une première fois pour qu’on enlève le saignement. Ensuite, on m’a traité pour éviter la récidive », explique Margaux avec ses mots.
J’ai été mise dans le coma pendant une semaine, j’avais tellement mal à la tête que je n’arrivais pas à me réveiller.
L’AVC hémorragique constitue une urgence vitale, et doit être géré dans les 24 heures dans une unité spécialisée. « Les progrès techniques nous permettent aujourd’hui de pouvoir traiter l’anévrisme ou la malformation artérioveineuse par voie endovasculaire, sans besoin d’ouvrir le crâne », détaille le Dr Pradat. De cette opération, Margaux n’a gardé qu’un petit trou derrière le crâne, et « des cheveux qui ont repoussé bouclés » sur la zone rasée.
Les risques de complications liées à cette chirurgie sont réels. Car pour traiter une hémorragie cérébrale, il est nécessaire de stopper le saignement, drainer l’hémorragie, mais aussi d’abaisser la pression intracrânienne.
« L’un des dangers, c’est que le vaisseau cède à nouveau. Autrement, il y a aussi un risque d’hydrocéphalie ou de spasme des vaisseaux », précise le neurologue. La jeune fille se souvient avoir eu plusieurs fois des convulsions après la première opération.
« J’ai été mise dans le coma pendant une semaine, j’avais tellement mal à la tête que je n’arrivais pas à me réveiller. J’ai fait trois hôpitaux et oublié un mois de ma vie ». En réanimation, les médicaments qui lui ont été administrés ont en effet provoqué chez elle une sorte d’amnésie, un effet secondaire bien connu que le Pr Alain Cariou, réanimateur médical, analyse sur le site allodocteurs.fr : « Ces médicaments allègent à la fois la douleur, l’anxiété, provoquent le sommeil et ils ont d’une certaine manière un effet amnésiant important. Et souvent les souvenirs sont incomplets. »
Des séquelles post-avc importantes
L’hémorragie intracérébrale n’est pas un accident bénin. Et sa létalité est plus importante que pour les infarctus cérébraux. Selon une étude de Santé Publique France publiée en juin 2020, sur 2 933 AVC, 48 % des hémorragies sont mortelles. D’après les résultats, la majorité des décès (75 %) surviennent avant 6 jours après un AVC hémorragique et avant 16,5 jours après un AVC ischémique.
Mais le Dr Pradat contrebalance : s’il engage le pronostic vital à ses prémices, les suites d’un AVC hémorragique peuvent s’avérer moins sévères. « Contrairement à l’infarctus cérébral qui va détruire une partie du tissu cérébral, l’hématome va seulement le comprimer. Lorsque la prise en charge est rapide, la résolution peut être complète et les séquelles minimes ».
J’ai encore l’espoir que tout revienne à la normale, mais je n’ai vu aucune amélioration en un an.
Et c’est ce qui ressort du discours de Margaux. Après un mois passé en réanimation, un de plus en unité de soins de rééducation post-réanimation, puis en centre de rééducation, elle se souvient s’être sentie en pleine forme. Pourtant, à l’époque, une moitié de son visage est paralysée et l’un de ses yeux reste fixé en l’air.
« Le travail de rééducation est très important après un événement pareil », rappelle le neurologue. Lors de ses séances, Margaux a dû réapprendre à écrire et marcher. Aujourd’hui, elle sait encore difficilement tenir son stylo et sa démarche est parfois un peu titubante. « Je ne peux plus marcher sans tourner la tête ou regarder mon téléphone en marchant ». La jeune femme assure avoir perdu de la sensibilité dans son bras droit, de la vision et beaucoup de voix.
AVC jeune : de l’importance de ne pas négliger les symptômes
Pour le Dr Pradat, le diagnostic précoce de l’AVC peut s’avérer salutaire. Il est de plus en plus fréquent qu’une imagerie cérébrale réalisée pour une autre raison détecte d’éventuels anévrismes ou vaisseaux défaillants. Quelques mois avant son accident, Margaux prévoyait d’ailleurs de passer un scanner du cerveau pour justement tenter d’expliquer des sortes de « contractions » dans le crâne qu’elle ressentait. “Je ne l’ai pas fait, je m’en suis voulue, car on aurait peut-être pu l’éviter ».
Si Margaux assure que cet accident n’a provoqué chez elle aucun traumatisme, l’AVC lui aura tout de même laissé des marques indélébiles. « J’ai remarqué une forte irritabilité que je n’avais pas avant, je ne supporte plus personne. Je pense que la prochaine étape pour moi, c’est de consulter un psychologue. J’ai encore l’espoir que tout revienne à la normale, mais je n’ai vu aucune amélioration en un an ».
Le neurologue insiste aussi sur l’importance de connaître l’ensemble des symptômes de l’AVC pour faciliter sa prise en charge rapide. « Chez les patient.e.s âgé.e.s, les signes sont assez similaires à l’AVC ischémique. Mais chez les jeunes, il ne faut surtout pas négliger les céphalées brutales, souvent accompagnées de nausées et de vomissements. Il ne faut pas les confondre avec les migraines qui sont fréquentes, notamment chez les jeunes femmes ».
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