• La très attendue saison 3 de Emily in Paris sera disponible ce mercredi.
  • Tandis qu’Emily Cooper va devoir faire un choix de taille pour son avenir, Sylvie va relever de nouveaux défis.
  • Rencontre avec Philippine Leroy-Beaulieu, qui incarne la très stylée et désormais iconique Sylvie Grateau.

Un retour de hype vécu sereinement ! A 59 ans, Philippine Leroy-Beaulieu est devenue l’icône du cool pour toute la jeune génération en incarnant Sylvie Grateau, la patronne bitchy d’Emily in Paris perchée sur ses stilettos. Alors que la saison 3 de la série de Darren Star sera mise en ligne ce mercredi sur Netflix, l’actrice, aussi chaleureuse à la ville que son personnage semble odieux à l’écran, revient sur ce rôle de truculente Parisienne, faussement impitoyable, qui a presque volé la vedette à l’Américaine Emily, campée par la charmante Lily Collins.

Il est rare de voir un personnage féminin de plus de 50 ans aussi fort, indépendant et avec une telle liberté d’esprit que Sylvie Grateau. Sentez-vous une forme de responsabilité en matière de représentation féminine avec ce rôle ?

Si on me la donne, je la prends volontiers sans vouloir être un « role model » comme on dit en anglais. Je trouve que c’est très gros cette responsabilité. Je sens qu’il y a quelque chose de cet ordre-là qu’on me demande d’avoir et en même temps, comme je suis assez libre, j’ai envie de me libérer de cela. Le seul message, c’est « soyez vous-mêmes ! Ne soyez pas prisonnier du regard des autres, et soyez ce que vous sentez au fond de votre cœur ». A partir du moment où l’on ne cause pas de dommages aux autres, on est libre d’être qui on a envie d’être. Beaucoup de personnes, et d’ailleurs pas que des femmes, s’empêchent de déborder. La société enferme dans une imagerie et il faut d’en libérer. Cette question sur les femmes de plus de 50 ans revient souvent, on n’est pas des victimes, on est juste un peu hypnotisés par des narratifs un peu mainstream. On est victime que de soi-même et des limitations qu’on se met.

Cette liberté qu’à Sylvie, c’est ce qui vous a plu dans ce rôle ?

C’est cela qui me plaît dans ce rôle. Darren Star est quelqu’un de très libre quand il écrit. Il écrit pour les femmes d’une manière absolument magnifique, on le sait depuis longtemps et c’est de plus en plus clair pour moi. Il m’a dit un jour : « Que peut-on apprendre des femmes françaises ? Et bien, c’est la liberté. » Je pense qu’il a le goût de cela et qu’il a senti qu’à un endroit, on n’est pas dans les clous. On a plus de liberté que les Américaines. A certains endroits, on est plus soumises à certains diktats, à d’autres, on est beaucoup plus libres. Dès qu’on s’autorise à être qui on a envie d’être, on est probablement plus libre que les Américaines. Il faut s’autoriser à être qui on a envie d’être en fait tout simplement.

Comment se sont passées vos retrouvailles avec Sylvie Grateau pour cette saison 3 ?

La saison 2 a introduit le fait qu’elle avait une vie très différente de ce qu’elle avait montré en saison 1. La saison 3 ouvre encore plus la porte de qui elle était avant. On a découvert en saison 2 cette femme qui vient de la plage de Saint-Tropez et qui est monté à Paris pour faire carrière. En saison 3, on va voir que tout le passé de cette femme nourrit son présent et son futur. J’ai envie de dire qu’en saison 3, on va voir qu’elle n’a pas froid aux yeux, vraiment. Elle a particulièrement une force et un courage que je ne soupçonnais pas moi-même chez elle.

Le New York Times dit de vous que vous êtes « complètement habité » par ce rôle. Qu’y a-t-il de vous dans ce personnage ? Que vous apporte-t-il ?

Tous les acteurs vous diront que les personnages ouvrent des portes en nous qu’on avait forcément ouvertes. Sylvie libère des trucs en moi que je n’avais pas forcément exploré, de l’ordre de cette force, du fait de ne pas avoir froid aux yeux, d’en avoir rien à faire de ce que les autres pensent de moi… C’était déjà présent chez moi, mais c’est de plus en plus clair. La liberté que Darren écrit dans le personnage de Sylvie, elle me contamine de façon très positive et je lui en suis très reconnaissante. C’était quelque chose en sommeil chez moi et qui s’est révélé avec Sylvie. Je joue ce personnage depuis 2019 et quand on joue un personnage depuis longtemps, on s’imprègne beaucoup de qui il est, on découvre des choses en soi qu’on apporte au personnage, je découvre aussi des choses dans l’écriture de Darren… C’est un cercle.

Comment analysez-vous le succès phénoménal de Emily in Paris ?

Il y a l’aspect conte de fées de l’histoire, et puis cette chose toujours très amusante, qui consiste à sortir un poisson de l’eau, c’est-à-dire Emily qui débarque à Paris sans tous les codes et de la confronter à toute la culture française au travers Sylvie. C’est une source de comédie très forte. Le fait que ce soit sur Netflix joue beaucoup aussi. Les trois années compliquées qu’on vient de vice ont donné envie aux gens de cette légèreté. Il y a aussi ce côté grande boite de chocolat qui fait très envie et qui est très réconfortante.

Il y a de la légèreté, mais la série aborde aussi des problématiques plus sombres…

C’est la force de Darren. Je regarde Melrose Place que je n’avais pas vraiment vu à l’époque. Entre la saison 1 et la saison 4, je me suis aperçue que les personnages deviennent de plus en plus graves et noirs. Il démarre avec cet aspect barbe à papa et tire les gens vers des choses plus sombres avec cette grâce-là. C’est important et en même temps, on ne va pas en faire un drame.

Depuis Emily in Paris, vous êtes devenue une icône du style, la série a-t-elle changé votre rapport à la mode ?

Oui et non. J’ai grandi avec une mère qui travaillait dans la mode. J’avais envie de fuir tout cela, parce qu’enfant, je trouvais cela un peu casse-pieds au bout d’un moment. Avec Emily in Paris et le fait de devoir m’habiller de manière aussi pointue, je me suis aperçue que l’influence que ma mère a eue sur moi était très forte, que je m’amusais beaucoup avec les vêtements et que mine de rien, j’avais un œil. Il y a cette liberté dans cette série de ne pas être naturaliste du tout avec les vêtements. On traite les costumes comme un amusement. Pour moi, la mode, c’est vraiment un amusement. Dans la vie, je suis plutôt jean et tee-shirt, de jolie qualité, mais super simple. Là, ce qui est drôle, c’est de mettre des talons de 12 cm, une jupe crayon et un chemisier or pour aller au bureau ! J’aime beaucoup la mode s’il y a de l’humour. Je pense que c’était un truc de ma mère aussi, elle avait une manière de s’habiller très originale, très chic, mais toujours avec le clin d’œil et je la remercie de m’avoir appris cela. Si on se prend au sérieux avec la belle robe, ce n’est pas drôle !

Ces costumes ultra-pointus conditionnent aussi votre posture en tant qu’actrice ?

On n’évolue non seulement pas de la même manière, mais, pour moi, c’était très important d’avoir mal aux pieds, parce que cela raconte dans le corps quelque chose de l’effort que Sylvie a fait pour devenir Sylvie. J’ai toujours dit à Marylin [Fitoussi], notre costumière :  « Elle est corsetée. Elle s’est enfermée parce qu’elle arrive de la plage de Saint-Tropez pieds nus ». A Paris, voir mal aux pieds me permettait de ne jamais oublier cela, de l’avoir dans le corps, cette petite douleur de Sylvie, ou grosse, on verra. C’est super important.

Comment le succès d’Emily in Paris a changé dans votre vie ?

Je me fais arrêter par des gens du monde entier dans la rue pour faire des photos, c’est ce qui est incroyable avec une plateforme comme Netflix. Ce que je trouve tellement mignon, c’est que les Philippins m’adorent parce que je porte un prénom qui les réjouit ! Les gens de passage à Paris sont vraiment éblouis de pouvoir rencontrer une actrice qu’ils ont vue dans une série Netflix. C’est super mignon ! Je ne me fais pas paparrazer, c’est tranquille, et j’ai une cape d’invisibilité, quand j’ai envie qu’on ne me voit pas, on ne me voit pas. Il y a surtout de belles propositions qui arrivent, des propositions auxquelles je n’avais pas accès avant. Cela me réjouit beaucoup, parce qu’avant tout, j’adore jouer. Je suis ravie d’avoir un choix plus large et plus intéressant.

On vous a aussi vu dans la saison 5 de The Crown. Allez-vous privilégier les projets internationaux ?

Je suis ouverte à toutes les propositions, qu’elles soient françaises ou étrangères. Il y a des talents qui m’intéressent partout.

De quels rôles rêvez-vous désormais ?

Cette question du rôle dont on rêve qu’on pose souvent aux acteurs, je n’arrive pas à y répondre parce que je n’aurais jamais imaginé que Sylvie me ferait autant de bien. Ce que je trouve beau dans la vie d’un acteur, c’est de se laisser surprendre par le regard que les autres peuvent avoir sur vous et comment ils vous imaginent dans des rôles. Il y a cinq ans, je ne vous aurais jamais dit, je rêve de jouer Sylvie, la patronne d’une firme de marketing, et pourtant je suis super heureuse de la jouer. Je me laisse surprendre. Je pense que le destin sait mieux que moi ce dont j’ai besoin.

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