On n’avait pas autant attendu la rentrée depuis longtemps. Vendredi 17 septembre, Sex Education est enfin de retour sur Netflix avec une saison 3, près de deux ans après la saison 2. Pandémie oblige.
Rassurez-vous : l’attente en valait la peine. Avec cette nouvelle saison, ce carton (plus de 40 millions de spectateurs selon la plateforme de streaming) rafraîchissant continue à divertir et rendre accessibles des problématiques modernes sur les sexualités, le genre et le poids des injonctions dans les relations amoureuses.
Assumant encore plus son côté déclaré voire « too much », la saison 3 de Sex Education s’avère généreuse et riche. Elle soulève de nombreux tabous, et ça fait du bien. Même si le paumé Otis (Asa Butterfield) est censé être le personnage principal, elle accorde à tous les personnages le temps qu’ils méritent. Montagnes russes émotionnelles, gags en-dessous de la ceinture irrésistibles et réflexions modernes sur l’amour, l’amitié et la famille sont au rendez-vous. Avec cette question : comment aller de l’avant ?
Attention, ce papier contient des spoilers sur les saisons 2 et 3.
Ne pas rentrer dans le rang
Cette fois, tout est chamboulé à Moordale : une nouvelle directrice, Hope (Jemima Kirke) est nommée, pour remettre les élèves dans le droit chemin. Sévère et dictatoriale, cette principale au look seventies impeccable sème la terreur parmi cette joyeuse bande d’ados atypiques. Hope veut éradiquer le sexe de Moordale, et en faire un établissement « respectable ».
Cette illustration du « retour de bâton » (le « backlash » théorisé par la féministe Susan Faludi), qui suit les périodes de progrès, est bien menée, bien que parfois légèrement caricaturale. Ici, Sex Education veut réaliser un choc des générations, et défendre que les questions de genre et de sexualité ne sont plus anodines, ni privées, mais bien essentielles et politiques.
Mais la principale Hope va se heurter à la perpétuelle rébellion sous-jacente de ces lycéens anti-conformistes et pourfendeurs de normes, habitués depuis déjà deux saisons à aborder le sexe de manière décomplexée, progressiste et renseignée. Cette nouvelle saison pose donc encore la question du moule étriqué dans lequel une société patriarcale, hétéro et cisnormée (voyant l’hétérosexualité et le fait d’être cisgenre comme la norme) essaie de faire rentrer les plus jeunes.
- Les tabous sur le corps et la sexualité levés par « Sex Education »
- « Sex Education » démystifie avec bienveillance la sexualité des adolescents
Rendre visible
En cela, Sex Education est toujours la série la plus représentative de la génération X, qui revendique plus de diversité et combat toutes formes de discriminations. Même si le quotidien à Moordale est loufoque et irréaliste, la série reflète fièrement les préoccupations d’une jeunesse réclamant haut et fort sa liberté de disposer de son corps et de son coeur.
Cette saison 3 aborde notamment avec beaucoup de force la question de la non-binarité, à travers un nouveau personnage, Cal (la révélation Dua Saleh), qui met dans l’embarras la conservatrice Hope.
La série pose aussi en profondeur la question de l’intersectionnalité, lorsque le génial Eric (Ncuti Gatwa) se rend au Nigéria pour la première fois. Là-bas, il se demande comment allier ses origines et son homosexualité, mais aussi, de quelle manière il veut vivre sa vie amoureuse. Le couple qu’il forme avec Adam interroge encore, mais l’évolution du personnage est bouleversante, et la plus intéressante. Connor Swindells offre une prestation forte d’amoureux transi, mais effrayé par des années d’homophobie internalisée.
Le féminisme reste toujours un thème sous-jacent, avec différents personnages féminins qui tentent de reprendre le contrôle de leur vie. En particulier, l’agression sexuelle subie dans le bus par l’adorable Aimee (Aimee Lou Wood) dans la saison 2, laisse encore des traces. Un choix scénaristique judicieux, illustrant la réalité du long parcours de nombreuses victimes de violences sexuelles.
Viser sous la ceinture
Le propos de cette saison 3 de Sex Education n’est pas que politique. Elle apporte de nombreux moments de respiration, avec des gags bon enfant dont on a un peu honte d’en rire, mais qui sont très efficaces.
Mais l’humour reste encore le meilleur moyen de lever certains tabous. Ainsi, la merveilleuse Jean (Gillian Anderson), enceinte à la toute fin de la saison 2, est à mourir de rire avec ses flatulences intempestives de grossesse. Il n’en faut pas plus pour montrer qu’attendre un enfant, c’est aussi se retrouver dans un corps qui fait ce qu’il se veut, et démystifier cette période souvent glamourisée.
D’ailleurs, démystifier reste le maître-mot de cette série créée par Laurie Nunn. N’avoir honte de rien, tout oser, tout montrer, tout remettre en question. Les personnages sont en quête perpétuelle d’eux-mêmes et des autres, à l’écoute de leurs besoins et désirs. Même ceux censés être les « méchants » ont plus de profondeur qu’on y croit, et la série tient à nous montrer chez eux une part, même minime, d’humanité.
Cette saison 3 de Sex Education s’avère aussi brillante dans le rire que le dramatique, là où la saison 2 était beaucoup plus sombre. Dans un même épisode, on s’étouffe de rire face à un voyage en bus qui vire au fiasco, tout comme on pleure face à un moment intense pour Maeve (Emma Mackey).
On suit d’ailleurs aussi avec avidité l’évolution de la relation entre Maeve et Otis, qu’on avait quittés fâchés à la fin de la saison 2. Mais le plus intéressant reste la vie familiale de la brillante adolescente, encore aux prises d’avoir décidé de prévenir les services sociaux face aux addictions de sa mère, pour le bien de sa petite soeur.
Essayer d’être une bonne personne, de se respecter et respecter les autres, voilà la leçon que l’on retient à la fin de cette saison 3 de Sex Education, dont les huit épisodes passent trop vite, et qui réserve des surprises de bout en bout.
Sex Education saison 3, de Laurie Munn, avec Asa Butterfield, Emma Mackey, Ncuti Gatwa, Gillian Anderson, Aimee Lou Wood, Connor Swindells…, disponible sur Netflix le 17 septembre
- Les meilleures séries inédites de la rentrée à ne pas rater
- « You » : tout ce que l’on sait de la saison 3, diffusée prochainement
Source: Lire L’Article Complet