Les saignements de nez sont très répandus et particulièrement chez les enfants. Impressionnantes, ces épistaxis sont dans la très grande majorité du temps bénignes. Voici les différentes causes, les gestes à avoir et les traitements à disposition.
Avec Clémence Mure, chirurgien ORL et cervico-facial
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La plupart du temps, les saignements de nez sont bénins. Ils s’avèrent être impressionnants car ça saigne beaucoup mais, dans la majorité des cas, ils ne sont pas graves.
Saignement de nez, d’où viennent-ils ?
La plupart du temps, le saignement est localisé au niveau antérieur du nez, c’est-à-dire devant, sur le cartilage qui sépare les deux narines. Le saignement de nez, ou épistaxis, mais il peut être localisé à plusieurs endroits dans les fosses nasales :
- antérieur et il se fait par l’une des narines ou les deux,
- postérieur (vers la gorge),
- encore les deux à la fois.
Les particularités de la muqueuse nasale
La muqueuse des fosses nasales, aussi appelée muqueuse pituitaire, recouvre les parois ostéo cartilagineuses des cavités nasales. Trois caractéristiques expliquent la fréquence des épistaxis : elle a comme particularité d’être fine, au contact direct du squelette et richement vascularisée. Comme toutes les muqueuses, celle des fosses nasales est composée de 3 couches : un épithélium, composé d’une monocouche cellulaire ; une membrane basale; un chorion, lui-même composé de 3 couches. De la superficie vers la profondeur : la couche lymphoïde, la couche glandulaire et la couche vasculaire avec l’ensemble du réseau artérioveineux.
Épistaxis essentielles, des saignements bénins dans la majorité des cas
Les saignements de nez peu importants, d’un seul côté, et qui s’arrêtent rapidement et spontanément sont considérés comme des épistaxis bénignes aussi appelées épistaxis essentielles.
La muqueuse nasale est très fragile, et notamment la zone en avant du septum, qui est une zone de fragilité vasculaire. On l’appelle aussi tache vasculaire dense, une région très riche en vaisseaux sanguins. Les principales causes des saignements de nez sont bénignes et touchent particulièrement les enfants et les personnes âgées prenant des anticoagulants.
Et l’épistaxis postérieure ?
Bien que rares, les saignements de vaisseaux sanguins de la partie arrière du nez (épistaxis postérieure) sont plus dangereux et difficiles à traiter. En effet, les épistaxis postérieures impliquent généralement des vaisseaux sanguins plus volumineux que les saignements de nez provenant de la tache vasculaire dense. La localisation des vaisseaux postérieurs les rend plus difficiles pour les médecins de les atteindre et de les traiter.
Les épistaxis postérieures ont plutôt tendance à survenir chez des personnes atteintes d’athérosclérose (circulation sanguine réduite ou obstruée dans les artères), de troubles hémorragiques, qui prennent des médicaments qui modifient la coagulation du sang ou qui ont subi une opération du nez ou des sinus.
Épistaxis essentielles, les principales causes :
- Chez les jeunes enfants, cette région saigne assez facilement parce qu’ils se mettent les doigts dans le nez et créent des traumatismes ;
- la zone peut être fragilisée par un traumatisme (par exemple après introduction d’un petit objet dans une narine, plus fréquent chez les enfants ou à la suite d’un choc sur le nez, une fibroscopie nasale) ;
- les variations de températures importantes ;
- les pièces ou dans un climat dans lesquels l’air est très sec ;
- la muqueuse du nez peut également être fragilisée par un rhume (lors d’une rhinopharyngite virale aussi bien chez l’enfant que chez l’adulte ou en cas de rhinite allergique par exemple) ;
- prise de drogue ;
- une chirurgie nasale récente.
D’autres causes plus graves aux saignements de nez
Des saignements de nez récurrents doivent faire l’objet d’une consultation chez son médecin généraliste qui orientera la patiente vers un ORL si besoin. Des saignements dont la cause est plus grave sont la plupart du temps bilatéraux, avec une extériorisation antérieure et postérieure (dans la gorge, avec déglutition de caillots sanglants), un état général modifié comme une pâleur, de la tachycardie ou de l’hypotension, ne cédant pas avec les mesures de compression. Ces saignements qui ne cessent pas peuvent faire l’objet d’une hospitalisation pour une prise en charge et bilan.
- Causes tumorales : Les tumeurs responsables peuvent être malignes comme un cancer du cavum, un cancer du sinus, etc… ou bénignes comme un fibrome nasopharyngien. Ce dernier est fréquent chez le jeune garçon : il s’agit d’une tumeur développée au niveau du foramen sphéno-palatin, très richement vascularisée, responsable d’épistaxis à répétition.
- Maladie de Rendu Osler : une maladie génétique des vaisseaux sanguins. Elle est considérée comme une maladie orpheline, car environ une personne sur six mille est touchée par la maladie.
- Une malformation veineuse.
Comment réagir lorsque l’on saigne du nez ?
- S’asseoir au calme, ne pas s’allonger ;
- se moucher pour évacuer tous les petits caillots de sang ;
- placez votre pouce et votre index juste sous la partie osseuse de votre nez, puis pincez vos narines. Maintenez ainsi la pression pendant 10 minutes (utilisez une montre pour bien respecter cette durée). Le temps normal de coagulation est d’au moins 7 minutes. C’est pourquoi il est important de ne pas interrompre la compression, même pour vérifier si le saignement a cessé. Tout saignement bénin doit s’arrêter en 10 minutes, si ça continue de façon abondante il faut consulter aux urgences, si ce n’est pas abondant il faut prendre rendez-vous chez son médecin.
« Pour aider, vous pouvez sucer un glaçon, le froid va favoriser la vasoconstriction des vaisseaux sanguins et accélérer l’arrêt du saignement, » conseille le Dr. Mure.
Lorsqu’un saignement vient de s’arrêter, il faut éviter les gestes qui risquent de le faire récidiver : se pencher vers l’avant, se gratter le nez ou se moucher. Il faut également ne pas faire de mouvements susceptibles d’augmenter la pression abdominale (presser, pousser pour aller à selle, ou porter des charges lourdes).
Ce qu’il ne faut pas faire
Contrairement à certaines idées reçues, il ne faut pas s’allonger ou pencher la tête en arrière ! Dans cette position, le sang s’écoulerait dans l’arrière-gorge et pourrait entraîner des vomissements. De plus, cette position ne permet pas au sang de coaguler : l’hémorragie ne pourra donc pas cesser d’elle-même.
Quand consulter un médecin ?
Des saignements de nez récurrents, même bénins, doivent faire l’objet d’une consultation chez son médecin généraliste qui orientera la patiente vers un ORL si besoin. Ce dernier pourra réaliser une fibroscopie pour aller voir si ce n’est pas une autre cause grave.
Épistaxis : les situations d’urgence
- Un écoulement de sang important qui se fait par les deux narines et dans l’arrière-gorge ;
- le saignement de nez est associé à d’autres symptômes : pâleur, malaise, sueurs, pouls rapide, anxiété, agitation, battements rapides du cœur faisant craindre un état de choc… ;
- l’épistaxis est abondante du fait de troubles de la coagulation (hémophilie par exemple) ou de la prise d’un traitement anticoagulant ou antiagrégant plaquettaire ;
- l’épistaxis fait suite à un traumatisme grave (ex. : accident de la voie publique).
Face à un saignement qui ne cesse pas, il faut appeler les urgences, et faire une compression sur le nez en attendant les médecins.
Quels traitements pour des causes bénignes ?
– La cautérisation de tâche vasculaire à l’avant du nez : l’ORL brûle le petit vaisseau responsable du saignement. La cautérisation est réservée aux épistaxis peu abondantes, dont l’origine est facile à repérer. La cautérisation se fait sous anesthésie locale avec un produit chimique (nitrate d’argent, acide chromique) ou bien avec des pincettes électriques (électrocoagulation).
– Pour des saignements plus graves, par exemple d’une personne âgée sous anti-coagulant et anémiée : le spécialiste peut mécher. C’est-à-dire introduire des mèches de coton assez importantes à garder 24 à 48h le temps que le saignement s’arrête. La patiente ou le patient peut être hospitalisée pour rester sous surveillance. Pour des saignements très graves, la personne peut être transfusée. Après l’arrêt du saignement, la personne est cautérisée.
– La chirurgie ORL : si les saignements sont vraiment importants et que le vaisseau est trop gros pour être cautérisé, la personne est opérée. Le chirurgien ORL, ligature une ou plusieurs artères vascularisant l’intérieur du nez.
– La radioembolisation : elle est réalisée par un radiologue interventionnel. Ce spécialiste est spécialement formé aux techniques opératoires mini invasives, guidées par des techniques d’imagerie comme la radiographie. Le principe de l’embolisation est d’occlure de façon très précise l’artère ou les artères responsables du saignement. Les artères des deux côtés du visage sont généralement explorées. Un bilan des artères du visage est d’abord réalisé par injection de produit de contraste (comme lors d’un scanner), pouvant provoquer une sensation de chaleur à ce niveau. Après identification des artères potentiellement responsables du saignement, le radiologue interventionnel réalisera une occlusion très précise de ces artères à l’aide de microsphères (petites billes de moins d’un millimètre de diamètre).
Merci à Clémence Mure, Chirurgien ORL et cervico-facial. Praticien Hospitalier à l’Hôpital Simone Veil et au Centre Hospitalier d’Argenteuil-GHT Sud Val d’Oise – Nord Hauts-de-Seine
Sources :
Radiologie interventionnelle
Ameli
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