A l’aube de l’été, la capitale retrouve enfin l’un de ses joyaux architecturaux. Situé à deux pas du plus vieux pont de Paris, le Pont-Neuf, l’illustre grand magasin a fermé ses portes en 2005 pour cause de vétusté. Son propriétaire, le groupe LVMH, décide alors de se lancer dans une rénovation ambitieuse avec pour but de transformer l’adresse tombée en désuétude en centre névralgique d’un quartier alors en pleine mutation. Après 15 ans de travaux, la réouverture devait être célébrée en grande pompe pour les 150 ans de l’illustre enseigne en 2020. Mais c’était sans compter hélas sur une invitée surprise : la Covid-19. Travaux bouclés et pandémie en légère baisse, la nouvelle Samaritaine peut désormais ouvrir ses portes au grand public en cet été 2021 et redevenir une place to be, à deux pas du Louvre et de l’île de la Cité.
Ici c’est Paris
Difficile de raconter la nouvelle Samaritaine, sans évoquer l’ancienne. Pour bon nombre de parisiens pur jus, jeunes comme moins jeunes, elle s’apparente à une délicieuse madeleine de Proust. Quand pour de nombreux historiens et architectes, elle est le symbole d’une époque : la fin du XVIII ème siècle et ses désirs d’extrême modernité.
Brillant commerçant, Ernest Cognacq s’installe dans ce quartier en 1870, rejoint très vite par sa femme Marie-Louise Jaÿ. Ils comprennent rapidement l’atout géographique des lieux. A l’intersection de la rive gauche et de la rive droite, à deux pas du Louvre et du fameux « ventre de Paris » (le quartier des halles), ils investissent dans une première échoppe au coin des rues de la Monnaie et du Pont-Neuf puis s’étendent petit à petit dans les boutiques mitoyennes. En 1910, ils inaugurent un bâtiment Art Nouveau signé Frantz Jourdain, un architecte chantre de la modernité pour qui les façades parisiennes manquent cruellement de fantaisie. La Samaritaine n’en manquera pas. Jourdain conçoit un édifice ambitieux par ses volumes, ses nombreuses marquises, sa structure métallique et ses ornementations travaillées. Un chef-d’oeuvre Art Nouveau au coeur de la capitale. Vingt-ans plus tard, le succès commercial toujours au rendez-vous, les propriétaires agrandissent le magasin en rachetant les immeubles voisins et en ajoutant cette fois-ci un édifice Art Déco conçu par Henri Sauvage. Temple de la consommation et joyau architectural à la fois, « La Samar » comme la surnomme affectueusement les parisiens depuis plus d’un siècle était et reste une avant-gardiste.
La nouvelle Samaritaine, entre hommage au passé et regard porté vers l’avenir
Cette nouvelle Samaritaine prêche la bonne parole de la modernité en se plaçant à la pointe de ce qui sera l’objet de toutes les convoitises de demain aussi bien en matière de mode, de beauté que de joaillerie. Pensé comme un mini village au coeur de la ville – en se dotant, en plus de ses boutiques habituelles, d’un restaurant-bar et d’un spa s’il vous plaît -, le nouveau grand magasin incarne une rencontre étonnante entre la luxueuse avenue Montaigne et le contemporain et créatif quartier du Marais, le tout en bord de Seine.
Il fallait nécessairement imaginer un écrin à la hauteur de cette sélection avisée et hétéroclite. Le nouveau magasin a naturellement pris le parti de conserver son ancrage dans son passé Art Déco et Art nouveau, tout en se laissant la liberté de regarder vers l’avenir. Un pari architectural composé à plusieurs mains. C’est ainsi que les édifices Art Nouveau et Art Déco d’origine côté Pont-Neuf ont été entièrement restaurés par le studio canadien Yabu Pushelberg. Leur travail a consisté à mettre en valeur l’impressionnante structure Eiffel du bâtiment, qui soutient la majestueuse verrière rectangulaire, et sa luminosité tout en apportant leur style raffiné à tous les étages en créant notamment un mobilier sur-mesure et des tapis associés avec goût, au bronze et aux touches de ce gris-bleu emblématique du décor d’origine. Des teintes clés à admirer au passage sur l’impressionnante fresque des Paons, chef-d’oeuvre de l’Art Nouveau, signé Francis Jourdain, qui souligne toute la verrière et qui s’est refaite elle aussi une beauté pour l’occasion.
Si les détails d’antan qui firent la gloire des lieux dominent toujours en majesté, côté rue de Rivoli, une nouvelle construction moderne de l’agence d’architecture japonaise Sanaa renoue elle aussi avec le passé avant-gardiste de l’enseigne en surprenant les flâneurs par sa façade tout en transparence et forme de vague continue comme la façade Art Déco avait surpris plus d’un promeneur un siècle plus tôt. Les lauréats du prestigieux prix Pritzker a mis à profit ici ses leitmotivs architecturaux pour créer un espace aux lignes fluides et épurées où la lumière est convoquée pour créer de subjuguants puits lumineux, le tout renforcé par une nouvelle structure dont la façade ondulante en verre côté Rivoli tisse un dialogue contemplatif entre passé et présent par un subtil jeu de réflexion avec les immeubles en regard.
A noter également au casting de cette rénovation exemplaire : Hubert de Malherbe, l’architecte français a imaginé un très poétique et chic espace dédié à la beauté; l’agence très en vogue Ciguë a pris en charge la création d’un espace streetwear radical, en phase avec l’époque composé de matériaux bruts et recyclés; enfin les architectes d’intérieur Chloé Nègre, Karine Chahin et Virginie de Graveron ont transmis tout leur sens de l’élégance à la parisienne en aménageant les espaces de l’Appartement et des deux salons privés dédiés à la joaillerie. Pour résumer : du beau à tous les étages !
Avant d’aller déambuler à « La Samar » pour la première fois ou comme au bon vieux temps, voici un aperçu de ce qui vous attend…
La façade rénovée de La Samaritaine côté Pont-Neuf
La conciergerie de La Samaritaine pour accueil
Le rez-de-chaussée du bâtiment Pont-Neuf dédié à la maroquinerie
Les escaliers du bâtiment Pont Neuf de La Samaritaine vus depuis le rez-de-chaussée
Le rez-de-chaussée du bâtiment côté Pont Neuf vu des escaliers revu et corrigé par le studio canadien Yabu Pushelberg
L’impressionnant escalier et la verrière
Focus sur les ornementations des escaliers
Les différents étages dédiés à la mode, la joaillerie et la maroquinerie
Focus sur la Fresque des Paons restaurée
Les salons privés dédiés à la joaillerie réalisés par Chloé Nègre, Karine Chahin et Virginie de Graveron
Le décor avant-gardiste conçu par Ciguë pour l’espace streetwear dans le bâtiment côté Rivoli
La façade en verre signée Sanaa
La conjugaison exemplaire et architecturale du passé et de l’avenir
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