Lous and the Yakuza est auteure, compositrice, interprète, mannequin belgo-congolaise devenue égérie de Louis Vuitton. Elle est née au Congo et a grandi au Rwanda et en Belgique. Cette dernière l’a adoptée et découverte grâce à son premier album Gore en 2019, notamment avec son titre Dilemme, devenu très vite viral sur les réseaux sociaux. Elle dissèque son rapport au monde et sa musique, ses chansons ne laissent personne indifférent. Ce vendredi 6 janvier 2023 sort en format vinyle son deuxième album : Iota. Lous and the Yakuza sera aussi en concert le 1er février à Lille et le 4 à Paris.

franceinfo : Ce deuxième opus est totalement différent du précédent. J’ai l’impression que vous avez eu besoin de vous challenger. Un mot déjà sur le titre : Iota, qui est la plus petite lettre de l’alphabet grec et qui signifie « Une quantité négligeable« . Pourquoi Iota ?

Lous and the Yakuza : Parce que c’est une espèce de métaphore que j’ai utilisée pour représenter le reste. Ce qu’il reste d’une relation, ce qu’il reste d’une sensation entre deux personnes ou entre plusieurs personnes, que ce soit de l’amour familial, avec un amant, un amoureux, avec soi.

« Il y a toujours quelque chose qui reste du passé. Et ‘Iota’ c’est toutes ces choses qui restent du passé même quand on essaie de les oublier. Il en reste toujours une infime quantité donc un iota. »

à franceinfo

C’est vrai que quand on connaît votre histoire, c’est très fort. Père congolais, gynécologue, maman rwandaise, pédiatre. Elle a été emprisonnée pour ses appartenances ethniques donc c’est une enfance qui a été très difficile. Vous êtes partie très tôt du foyer familial. Est-ce que la musique vous a sauvée ?

Oui, chaque jour. Encore hier. Encore ce matin. Je pense que pendant longtemps, j’ai personnifié la musique. J’ai l’impression que c’était vraiment un être palpable. Et petit à petit, j’ai arrêté d’être folle ! Mais c’est vraiment une partie de mon existence. Dans la voiture, on me disait toujours que j’écoutais tout trop fort et c’est vrai que j’écoute la musique hyper fort. Elle fait vraiment partie de mon quotidien, j’écoute de la musique tout le temps.

Vous parlez de vos démons aussi, c’est ce qu’on retrouve dans le titre Monsters, les démons qui vous accompagnent. Vous chantez : « Quand j’entre, ils me suivent calmement« . Cela veut dire qu’on apprend à vivre avec eux ?

Oui. J’apprends à vivre avec eux. La première phrase du morceau c’est : « On a tous les clés de mon appartement. Quand je rentre, ils me suivent calmement » parce qu’on vit tellement en phase et en harmonie qu’ils ont les doubles de mes clés. Et j’ai utilisé le mot ‘monstres’ parce que quand j’étais plus jeune, on parlait souvent des monstres sous le lit et on n’avait jamais vraiment envie de les voir.

Dans le premier album, j’étais plus dans le constat du trauma, de ma propre colère, de la haine dans le monde et des choses violentes qui existent. Et là, je suis dans l’acceptation. Il n’y a pas grand-chose qui va changer. Toutes les personnes exécrables qui se conjuguent en « obie », en « isme » et toutes ces maladies-là, eh bien il faut accepter que l’humanité est comme ça depuis des siècles et des siècles et qu’il faut faire sa part de changement. Il faut faire en sorte que ça change, mais le changement ne va pas tomber du ciel, je pense qu’il faut accepter.


Cela veut dire qu’il faut vivre en paix avec soi-même et on vous sent beaucoup plus apaisée dans cet album. On vous sent beaucoup plus « souriante », c’est-à-dire que c’est un sourire à la vie aussi, en quelque sorte. C’est ça qui a changé entre la petite fille que vous étiez et celle d’aujourd’hui ?

À fond, surtout sur le premier projet. J’avais tellement de traumas.

C’est un cri du cœur !

Exactement. Je ne m’en rendais pas vraiment compte. Maintenant, avec le recul, je me rends compte à quel point cet album est extrêmement sombre dans les paroles, dans les thèmes abordés. Et à l’époque, je ne m’en rendais pas compte parce que c’était ma réalité. On en parle souvent avec mes amis. Ce qui faisait les fondations de ma personnalité à l’époque, c’était la mélancolie, la tristesse, la peine, la colère, la haine parfois. Et aujourd’hui, ma fondation, c’est la paix, la recherche en tout cas de celle-ci parce qu’elle n’est pas toujours là. Le calme, la sérénité, l’épanouissement et ça change tout dans la vie quand ton socle fondamental est différent.

« Maintenant, je n’ai pas des moments de joie dans ma dépression. J’ai des moments de dépression dans ma joie. »

à franceinfo

Dans cet album, vous vous dévoilez beaucoup même si vous gardez votre armure. Vous parlez d’amour, vous dites que c’est un moteur. À la fois, c’est un moteur, mais en même temps, il peut nous abîmer. Et quand vous chantez, on a l’impression de vivre une déflagration, c’est Hiroshima. Vous êtes une amoureuse comment ?

Obsessionnelle ! Mais j’ai un problème, je devrais aller me faire suivre ! Parce que je suis trop amoureuse. Quand j’aime, j’aime à la folie.

L’amour vous a adoucie aussi ?

Ça dépend. Parfois, oui, quand tout se passe bien ! Dans la majorité des morceaux de cet album, ce n’est pas le cas mais quand ça se passe pas très bien, justement, c’est intéressant de voir le chemin dans lequel notre cœur se lance.

Ces chansons, vous allez pouvoir les interpréter sur scène. Le public vous attend d’ores et déjà avec une grosse tournée. Ça représente quoi de monter sur scène, d’aller rencontrer votre public ?

C’est le meilleur feeling. Je n’ai pas l’impression qu’il existe autre chose dans ma vie qui me fasse ressentir ça. C’est tellement étrange de monter sur scène. Et puis je suis très timide sur scène et chaque jour, je me dis : mais pourquoi est-ce que je me fais ça ? Pourquoi je fais ce métier qui me tourmente tellement avant de monter sur scène ? Et une fois qu’on y est et qu’on chante, c’est complètement fou, c’est à mi-chemin entre l’extase et l’euphorie.

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