Ce mercredi 29 juillet au soir, la mesure phare du projet de loi bioéthique a été adoptée en deuxième lecture à l’Assemblée Nationale. Il s’agissait du premier article, l’ouverture de la Procréation Médicalement Assistée (PMA) à toutes les femmes. Un vote réalisé sous les applaudissements, à la majorité de 66 voix contre 27, et 3 abstentions. Le projet de loi doit encore passer au Sénat, d’ici au printemps 2021.

D’autres mesures du projet de loi cependant, ont nettement plus divisé l’Assemblée. Particulièrement attendues par la communauté LGBTQ+, certaines ont été écartées. Militants, députés et internautes, ont exprimé leur déception : la PMA ne sera pas vraiment pour tou·te·s.

La transidentité pas considérée

Première déception : bien que la PMA sera désormais remboursée à 100% aux femmes seules ou aux couples de lesbiennes, elle a été refusée aux hommes transgenres qui ont changé leur état civil. « La transidentité n’est pas une contre-indication à la parentalité« , avait pourtant rappelé le co-rapporteur du texte de loi bioéthique, le médecin Jean-Louis Touraine  (LREM) d’après Libération.

Ainsi, les couples transparentaux risquent de devoir contourner ce refus de manière contraignante. Un homme trans par exemple, s’il est encore en capacité de porter un enfant, devra s’y prendre avant son changement d’état civil. 

De cette façon, ces couples-là s’exposent davantage à des discriminations, ainsi qu’au mal-être de devoir vivre dans une identité de genre à laquelle ils ne correspondent pas.

Ropa : pas de dons gamètes au sein d’un couple de femmes

La seconde déception est le rejet du gouvernement des dons de gamètes au sein d’un couples de femmes, et notamment le don de sperme de femmes trans à leur compagne. Cette mesure a été considérée comme un pas de trop vers la gestation pour autrui (GPA). Un refus particulièrement discriminant là aussi puisqu’il empêche les deux mères d’un même couple d’avoir un lien biologique avec leur enfant.

D’autant plus que ce don de gamètes existe déjà au sein d’un couple hétérosexuelle par exemple, et que les pénuries de gamètes ne permettent pas facilement aux femmes noires et asiatiques recourant à la PMA d’avoir des enfants qui leur ressemblent.

Pas de PMA post-mortem

Enfin, la PMA post-mortem a été elle aussi écartée, ce qui a suscité l’indignation. Il était question de permettre aux femmes qui étaient déjà engagées avec leur compagnon dans une procédure de PMA, de la poursuivre si celui-ci venait à décéder, à condition qu’il ait donné son accord avant sa mort.

Pour Aurore Bergé, coresponsable LREM sur le projet de loi, il est question de concilier le « techniquement possible et l’éthiquement souhaitable », avait-elle déjà déclaré en septembre.

Enfants nés d’une GPA à l’étranger : reconnaissance de filiation selon la loi française

A aussi été voté ce 31 juillet que la reconnaissance de la filiation des enfants nés d’une gestation pour autrui (GPA) à l’étranger soit « appréciée au regard de la loi française ». La France ne reconnaîtra alors plus automatiquement la filiation d’enfant nés d’une GPA à l’étranger.

Le texte voté par les députés ne permet la transcription d’un état civil étranger qu’au seul parent biologique. Cette décision va pourtant à l’encontre de ce qu’avait statué en décembre la Cour de cassation, qui estimait que deux membres d’un couple du même sexe pouvaient être intégralement reconnus en France comme parents d’un enfant né à l’étranger de GPA.

Fermement opposé à la GPA, le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti a admis qu’il fallait que la loi prenne « en considération ces enfants nés par GPA à l’étranger », détaille l’AFP via Ouest France

Pour que la reconnaissance de filiation soit possible donc, il faudra que le parent dit « d’intention » adopte son propre enfant, suite à quoi de nombreux députés se sont offusqués : « On n’adopte pas son propre enfant ! », a par exemple lancé le co-rapporteur Alain Touraine.

De son côté, Me Marcary, l’avocate ayant obtenu la jurisprudence à la Cour de cassation en décembre, a jugé, comme le détaille Têtu que « cet amendement vise à punir les parents qui ont eu recours à une GPA ».

Hors PMA, une loi bioéthique peu inclusive

L’Assemblée nationale s’est aussi positionnée sur d’autres enjeux de sociétés chers aux yeux de la communauté LGBTQ+. Quant aux restrictions faites aux homosexuels en matière de don du sang, l’amendement 7 bis, disposant que “les critères de sélection du donneur ne peuvent être fondés sur le sexe du ou des partenaires avec lesquels il aurait entretenu des relations sexuelles » a été écarté. 

C’est ce que souhaitait le ministre de la santé Olivier Véran. “Cet amendement, je le dis, il est dangereux” a-t-il assuré devant l’ensemble des députés, selon le Huffingtonpost. Ainsi, les discriminations envers les homosexuels qui souhaitent donner leur sang n’ont pas été supprimées par la loi bioéthique, comme l’attendait pourtant la gauche et une partie de la majorité.

Autre déception pour les personnes intersexes, l’amendement qui prévoyait de mettre fin aux mutilations génitales de ces derniers à leur naissance, hors nécessité vitale ou sans le consentement de l’intéressé.e, a été retoqué. Ces personnes nées avec les deux attributs génitaux subissent généralement une opération dans l’enfance visant à rendre ces organes conformes aux caractéristiques communes des sexes féminins ou masculins. Ces opérations ont de lourdes et irréversibles conséquences sur la vie des personnes concernées.

En 2016, la Délégation Interministérielle à la Lutte Contre le Racisme, l’Antisémitisme et la Haine anti-LGBT avait pourtant établi un plan de lutte comprenant la fin de ces opérations.

Accès aux origines pour tous les enfants nés de don

Néanmoins, en dépit des divisions au sein de la majorité, certaines mesures progressistes pourtant controversées ont été adoptées, à l’instar de l’accès aux origines pour les enfants nés de don de gamètes. Jeudi 30 juillet au soir, l’Assemblée s’est en effet prononcée pour que tous les enfants issus d’un don de gamètes puissent, s’ils le souhaitent, obtenir des informations non-identifiantes sur leur donneur à leur majorité.

Cette mesure, au moins, s’applique à tou·te·s : les enfants nés avant cette loi pourront, si leur donneur accepte, connaître son identité, et s’il refuse, obtenir au moins des données partielles comme son âge et quelques-uns de ses traits physiques.

Une disposition qui avait d’abord été votée au sénat contre l’avis même du gouvernement, rappelle l’AFP via Le Monde. Les anciens donneurs seront ainsi contactés via un formulaire afin de choisir s’ils décident ou non de partager leur identité. Dans le cas des nouveaux donneurs, ils en auront l’obligation pour les données non-identifiables. 

Le secrétaire d’Etat en charge de l’enfance et des familles, Adrien Taquet, s’y est pourtant opposé, estimant que l’enfant devrait être en mesure de décider s’il veut que ses parents aient ou non des informations sur son donneur avant ses 18 ans, afin d’éviter d’éventuelles « situations conflictuelles ».

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