« L’ordinateur, c’est ‘un lieu à soi’, comme dirait Virginia Woolf. Pour moi, ce n’est pas un simple outil, mais un coffre-fort, une (petite) cuisine (qui tient dans mon sac à main) à laquelle personne n’accède – sauf mon chat, qui a toujours le don pour mettre sa patte sur cette touche bruyante du Mac qui fait ‘doung doung doung’.

Dans l’ordinateur de Line Papin

J’ai le même ordi depuis dix ans alors tous mes textes sont là, bien rangés dans des dossiers et sous-dossiers : on me dit souvent que je devrais faire des copies, au cas où je le perdrais…

J’avance très concentrée dans l’écriture, limite en transe !

Avant qu’un texte ne prenne forme et que je m’y implique vraiment, je saute d’un projet à l’autre – en ce moment, un récit de voyage, un recueil de poésie, une histoire de science-fiction que je traîne depuis longtemps – comme si j’avais plusieurs plats au feu dans plusieurs fours.

L’écran blanc : un vide nécessaire pour trouver la bonne histoire

Je n’ai pas l’angoisse de l’écran blanc pour autant. Au contraire, j’ai besoin de ce vide-là pour savoir, parmi les mille idées d’histoires qui fourmillent dans ma tête, celle qui va m’emporter vraiment.

Et une fois que je me lance, plus rien n’existe, j’avance très concentrée dans l’écriture, limite en transe !

J’ai écrit Une vie possible (Éd. Stock, NDLR)dans un appartement très blanc, très éclairé, très vide. Mon fond d’écran, une de ces images génériques d’Apple, est lui aussi le plus neutre possible. C’est ce dépouillement-là qui m’a permis, je crois, la liberté de forme de ce livre : j’ai voulu exploser les frontières entre autofiction, journal, essai, mettre autant d’intime que d’universel, chercher des échos, dans les mots de Simone de Beauvoir, Gisèle Halimi, Simone Veil, aux évènements que j’ai traversés…

 Je ne fais jamais de plan, alors le texte s’architecture comme un jeu de construction Kapla, comme une cabane.

Je mets une terrasse ici, une fenêtre là. S’il y a finalement trop de soleil, j’ajoute ici ou là un auvent.

Je sais que le texte est fini quand ça ne bouge plus. Quand on y est bien dedans. »

  • Rebecca Solnit, écrivaine et militante américaine : "J’ai beaucoup appris des jeunes féministes"
  • L’écrivaine Karine Tuil : "On ne comprendra jamais rien à la violence humaine"

Une vie possible, Line Papin, Éd. Stock, 20 €.

Cet article a initialement été publié dans le magazine Marie Claire numéro 837, daté juin 2022.

Source: Lire L’Article Complet