Elles sont onze. Onze femmes seulement à avoir présidé le jury du Festival de Cannes, depuis sa création en 1939. La première à avoir endossé ce rôle fut Olivia de Havilland, en 1965. Une seule de ces onze femmes a été présidente à deux reprises. Il s’agit de la chanteuse, actrice et réalisatrice Jeanne Moreau, qui a accepté cette fonction en 1975, puis en 1995.
Un manque de parité encore conséquent, qui contraste avec le fait que plus de femmes que d’hommes ont été désignées maîtresses de cérémonie, dans l’histoire du Festival.
Les président·es du jury sont choisies par le président du Festival et par son délégué général, qui l’annoncent entre janvier et février, soit trois à quatre mois avant le grand rendez-vous des passionnés du septième-art.
Dès le 1er juillet 2022, la présidence du Festival a basculé du côté féminin. En 2023, l’événement sur la Croisette est pour la première fois présidé par une femme. Iris Knobloch, ancienne patronne de Warner Europe succède ainsi à Pierre Lescure, président pendant 8 ans.
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- Les femmes qui ont marqué le Festival de Cannes
Olivia de Havilland, présidente du jury en 1965
Elle est la première femme présidente du jury du festival de Cannes. Plus de vingt ans après sa création, Olivia de Havilland est nommée à la tête du jury en 1965. Actrice britannique, naturalisée américaine puis française, elle a joué dans le mythique Autant en emporte le vent.
Sur son rôle de présidente du jury, elle confiait : « Je trouve que c’est fascinant de voir tous les films, c’est une grande responsabilité et c’est aussi un grand plaisir », cite FranceBleu.
Olivia de Havilland est décédée à l’âge de 104 ans, en 2020, dans sa résidence parisienne où elle vivait depuis les années 1950.
Sophia Loren, présidente du jury en 1966
L’année qui suit, c’est de nouveau une femme qui préside le jury du Festival cannois : Sophia Loren, actrice italienne incontournable des années 1950 et 1960.
Dans une interview datant du 5 mai 1966 et disponible sur l’INA, Sophia Loren se confiait à propos de son rôle de présidente : « Écoutez, vraiment, je suis très flattée parce que généralement, la présidence d’un jury, si important comme le Festival de Cannes, est toujours confiée à des gens qui ont sur leurs épaules une carrière artistique beaucoup plus longue que la mienne. J’essaierai de faire de mon mieux ».
Michèle Morgan, présidente du jury en 1971
En plus d’être la troisième femme présidente du jury, Michèle Morgan devient la toute première actrice à remporter le Grand prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes en 1946.
Dans une interview accordée JT de 20 heures de l’ORTF le 16 mai 1971, et partagée par l’INA, la Française expliquait le rythme effréné qui lui était imposé en tant que présidente : « Ça va vite et il faut faire beaucoup de choses dans une journée. D’abord, il faut voir deux films minimum et puis faire des télévisions, répondre à beaucoup de questions, des radios, des interviews, voir beaucoup de gens qui me demandent des rendez-vous. Enfin, c’est très fatigant. »
Ingrid Bergman, présidente du jury en 1973
Actrice suédoise fétiche d’Alfred Hitchcock, Ingrid Bergman préside le jury lors de la 26e édition du Festival de Cannes, en 1973, neuf ans avant sa disparition.
Une personnalité marquante, à qui le comité décidera de rendre hommage en 2015, pour la 68e édition du Festival : « Icône moderne, femme libre, actrice audacieuse, Ingrid Bergman fut à la fois star hollywoodienne et figure du néoréalisme, changeant de rôles et de pays d’adoption au gré de ses passions, sans jamais perdre ce qu’elle avait de grâce et de simplicité ».
Jeanne Moreau, présidente du jury en 1975 et en 1995
Jeanne Moreau est une figure incontournable du Festival de Cannes, puisqu’elle a été présidente du jury a deux reprises : en 1975 et 1995.
L’actrice, réalisatrice et chanteuse a également été maîtresse de cérémonie de ce grand rendez-vous du septième art. Elle est même la première personnalité à avoir endossé ce rôle créé en 1993, puis à nouveau en 1994, et en 1997.
Mais son histoire avec Cannes ne s’arrête pas là. Jeanne Moreau a été nommée sept fois en compétition, dont une fois comme réalisatrice. Pour son grand rôle dans le film de Peter Brook, Moderato Cantabile, elle obtient le Grand prix d’interprétation féminine en 1960.
Françoise Sagan, présidente du jury en 1979
Françoise Sagan a été la présidente du jury en 1979. Une année marquée par un discret scandale autour de la remise de la Palme d’Or qu’elle révèlera plusieurs mois plus tard, dans le journal Le Matin de Paris, le 13 décembre 1979.
Le film très attendu sur la guerre du Vietnam, Apocalypse Now de Francis Ford Coppola, est en compétition cette année-là. Si les critiques européennes accueillent chaleureusement le film, la présidente du jury n’est pas convaincue.
Elle souhaite remettre la Palme au Tambour de Volker Schlôndorff, adapté du roman de Gunter Grass. Alors qu’elle parvient à convaincre le reste des jurés, la veille de la remise des prix, le journaliste Robert Favre Le Bret, alors Président du Festival, aurait usé de son influence pour faire remporter le prix à Francis Ford Coppola, retracent les Inrockuptibles.
Françoise Sagan, qui ne tolère pas ce comportement, menace alors de quitter le jury. Un arrangement est finalement trouvé entre les deux parties : cette année-là, la Palme d’Or reviendra aux deux films ex-æquo.
Dans une interview datant du 11 avril 1979, relayée par l’INA, l’autrice de Bonjour tristesse révélait la raison pour laquelle elle avait accepté d’être présidente du jury cannois : « Au départ, j’étais un petit peu embêtée. Ça me paraissait d’abord une responsabilité et puis une charge. Et puis, je ne sais pas, il fait beau à Cannes. Et puis, le cinéma, c’est quand même très beau. Quelquefois, j’aime bien ça ».
Isabelle Adjani, présidente du jury en 1997
Isabelle Adjani est la présidente du jury en 1997, alors que Jeanne Moreau est maîtresse de cérémonie. Après un boycott des paparazzis pendant sa montée des marches en 1983, l’actrice revient sur la Croisette pour la 50e édition, plus importante que jamais, étant la septième femme à endosser la présidence.
Cannes, c’est quand même le festival de nos petites vanités.
Dans une interview accordée au Parisien en 2018, l’actrice se remémore cette aventure, qu’on lui avait conseillé de refuser : « J’avais aimé cette immersion dans un bain de films… François Truffaut m’avait dit : ‘N’acceptez jamais !’ Il trouvait qu’on se mettait en porte à faux en jugeant les films des autres. Mais je lui ai désobéi. L’insistance de Gilles Jacob [l’ancien président du Festival, ndlr] était très flatteuse alors j’ai lâché : Cannes, c’est quand même le festival de nos petites vanités. »
Isabelle Adjani s’est également rappelée la complexité de ce rôle, étant une femme entourée d’hommes qui questionnent sa légitimité : « Il y avait pas mal d’hommes dans le jury, dont un, fantastiquement misogyne : Mike Leigh, dont j’adore les films. Il avait une attitude hostile, qui correspondait à l’image préconçue qu’il avait de moi, il me croyait châtelaine désœuvrée… ».
Liv Ullmann, présidente du jury en 2001
Pour la 54e édition du Festival de Cannes, c’est l’actrice et réalisatrice norvégienne, Liv Ullmann, qui préside le jury. Jodie Foster avait d’abord été choisie, mais l’actrice était occupée par le tournage de The Panic Room, de David Fincher, un thriller devenu culte.
Une aubaine pour la Suédoise qui, citée par le Festival de Cannes en 2001, déclare être « tout à la fois honorée d’avoir le plaisir d’être la présidente du jury et de faire ce qu’elle aime le plus : regarder des films ».
Isabelle Huppert, présidente du jury en 2009
Huit ans après Liv Ulmann, c’est à nouveau une femme qui préside le jury du festival de Cannes en 2009 : l’immense Isabelle Huppert.
En 2001, l’actrice française remportait pour la deuxième fois la prix d’interprétation féminine pour son rôle dans La pianiste.
« Cannes et moi, c’est une longue histoire d’amour, et ce prochain rendez-vous scelle définitivement mon amour pour le Festival, et donc pour le cinéma mondial. Cannes, c’est la porte ouverte à toutes les nouvelles idées du monde. En être une spectatrice privilégiée m’enthousiasme », se confiait-elle à l’époque sur le site de l’évènement.
Cannes, c’est la porte ouverte à toutes les nouvelles idées du monde.
Jane Campion, présidente du jury en 2013
Jane Campion a présidé le jury en 2013, avec Lambert Wilson comme maître de cérémonie. Son histoire avec Cannes est d’autant plus historique puisqu’elle est la première femme réalisatrice à avoir remporté la Palme d’Or, pour son film La Leçon de piano, en 1993.
En 2021, une deuxième femme remporte ce prix. C’est Julia Ducournau pour son puissant film Titane.
À l’annonce de sa désignation, Jane Campion s’exprimait : « Le glamour et le professionnel s’y marient de façon unique. C’est le pays des stars, des fêtes, des plages et du business mais on ne perd jamais de vue ce qu’est le Festival : une célébration du cinéma comme art et une célébration du cinéma du monde entier », comme on peut le lire sur le site officiel du Festival.
Cate Blanchett, présidente du jury en 2018
Cate Blanchett est la dernière femme en date à avoir présidé le jury du Festival de Cannes. Et cela remonte à mai 2018. Quelques mois avant la grande messe du cinéma, l’actrice australienne est devenue l’un des visages emblématique de la lutte contre le harcèlement sexuel, alors qu’elle fonde avec d’autres célébrités le mouvement « Time’s Up ».
Lors de son discours d’ouverture pour la 71e édition, la présidente affirme son soutien aux femmes dans un ère où l’affaire Harvey Weinstein bouscule enfin les mentalités et libère peu à peu la parole sur les violences sexistes et sexuelles dans le milieu du septième art. Son engagement ne s’arrête pas là.
Lors de la traditionnelle et mythique montée des marches, 82 femmes s’arrêtent à mi-chemin, Agnès Varda et Cate Blanchett prononcent alors un discours féministe devenu historique. 82 femmes représentant les quelques 82 films en compétition réalisés par des femmes, depuis la création du festival.
« Les femmes ne sont pas une minorité dans le monde, pourtant l’état actuel de notre industrie dit le contraire. En tant que femmes, nous sommes toutes confrontées à des défis qui nous sont propres, mais nous nous tenons ensemble sur ces marches aujourd’hui, comme un symbole de notre détermination et de notre engagement à progresser », clame Cate Blanchett sur ces célèbres marches.
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