C’est une infection généralement sans danger. Propre à l’humain, le cytomégalovirus (CMV) est « un virus de la famille des herpèsvirus », explique le site d’information médicale Vidal, au même titre que le bouton de fièvre, l’herpès génital ou la varicelle.
“C’est un virus très fréquent, la majorité des humains sont des porteurs sains et asymptomatiques”, explique le Dr Jean Marc Pinot, médecin généraliste. Même si elles sont rares, le spécialiste tient à souligner que des formes graves peuvent se déclarer, notamment chez les personnes immunodéprimées.
Très contagieux – une personne infectée le reste pendant plusieurs jours, voire semaines – le CMV se transmet via les sécrétions (sécrétions vaginales, sperme, urine, salive, larmes, sang, lait maternel ou mucus).
Si le virus touche principalement les enfants, comme le rappelle le CHU de Lausanne, les personnes qui sont régulièrement en contact avec, sont plus à risques de développer une infection. Une vraie problématique se pose donc pour les femmes enceintes, chez qui le virus peut avoir de graves effets sur le fœtus.
Bien qu’en France, on estime qu' »une femme en âge de procréer sur deux a déjà été infectée au CMV avant sa grossesse« , toujours selon le site de l’hôpital suisse, le virus reste responsable de la majorité des infections materno-foetale. “Le vrai risque, c’est que la femme enceinte non immunisée transmette le virus à l’enfant”, alerte le Dr Jean Marc Pinot.
Les conséquences graves d’une infection au CMV sur le fœtus
“Le plus souvent silencieux, c’est un virus que les médecins ne cherchent généralement pas à trouver”, affirme le médecin. Et les chiffres viennent confirmer ses dires : une infection au cytomégalovirus passe inaperçue chez “90% des personnes adultes”, selon les informations de Vidal.
La symptomatologie du CMV peut inclure de la fièvre, une fatigue inexpliquée, des maux de tête, des douleurs musculaires et une perte de poids.
“La femme enceinte peut être infectée, tout en pensant qu’elle n’a qu’un rhume”, ajoute le médecin. Si le cytomégalovirus n’a, en grande majorité, que peu d’impact sur les porteur.euse.s, il peut véritablement compliquer une grossesse, en affectant le développement du fœtus.
En effet, une femme non immunisée peut transmettre le virus à son bébé, via le placenta. « Lorsqu’une femme enceinte contracte le virus pour la première fois, le risque de transmission au fœtus est de 30 à 40% et celui d’infection grave de l’enfant de 10 à 15 % », alerte Dr Arnault Pfersdorff sur son blog pédiatre-online.
Comme pour la toxoplasmose, « la gravité des complications est corrélée au moment de l’infection », explique le magazine suisse Planète Santé. « Lors du premier trimestre, tous les organes se mettent en place. C’est donc une phase délicate où les conséquences peuvent être plus importantes », leur expliquait alors le Pr David Baud.
Cependant, ces cas restent rares, car la probabilité de transmettre le virus au fœtus est plus mince en début de grossesse. « Le taux de transmission est d’environ 5 à 16 % durant cette période, il monte à 65 % au troisième trimestre, période où les organes ont quasiment achevé leur développement et où l’impact sera donc moindre », poursuit le magazine.
À la naissance, le bébé contaminé peut présenter une jaunisse, des convulsions, une paralysie ou encore un retard de croissance. Pour beaucoup, les séquelles sur le futur enfant sont “durables et handicapantes”, informe Vidal. “5 à 15 % de ces enfants” subiraient même des conséquences tardives, incluant parfois une surdité ou un retard d’apprentissage. “On peut aussi avoir des malformations, comme une microcéphalie, hydrocéphalie ou des calcifications intracrâniennes”, complète Dr Pinot.
Dans de plus rares cas, l’infection materno-foetale au CMV peut entraîner une fausse couche, une naissance prématurée, ou même un décès intra-utérin. Même après avoir contracté une forme légère du virus, les enfants continuent à excréter du CMV pendant plusieurs années après leur naissance.
De la difficulté pour les femmes enceintes de s’en prémunir
Mais Dr Pinot tempère. “Ces formes graves d’infections sont l’affaire de 300 cas par an”, pour environ “0.5-2% des femmes enceintes” qui vont contracter le virus en cours de grossesse”, renchérit Cerballiance.fr. Ce qui n’élimine pas les angoisses des futures mères, dont les questions sont souvent laissées sans réponses.
D’autant qu’il n’existe pas de traitement ni vaccin contre le cytomégalovirus. “Le seul médicament existant est réservé aux personnes immunodéprimées, et il est contre-indiqué pour les femmes enceintes”, prévient le médecin généraliste.
Faut-il alors recommander aux femmes enceintes un dépistage sérologique ? Au sein de la communauté scientifique, il n’existe pas de consensus. Certains spécialistes recommandent aux femmes enceintes de faire un bilan d’anticorps au premier trimestre de la grossesse. D’autres arguent qu’un test n’est nécessaire qu’en cas de fièvre inexpliquée, “ou en présence de ganglions”, ajoute le médecin.
Toutefois, au-delà d’un manque de prise en charge médicale, il y persiste surtout un manque de communication autour du CMV et de ses conséquences sur l’enfant à naître. Trop peu de femmes enceintes sont au fait de cette infection virale dangereuse.
Une impasse pour les femmes enceintes déjà mères
En cas de test positif, une amniocentèse peut être réalisée pour permettre de détecter les éventuelles anomalies cérébrales du fœtus. En terme de prévention, le plus souvent, sont rappelées aux futures mères les règles d’hygiène de base (le CMV est détruit par les solutions désinfectantes et l’eau de javel).
Mais un problème de taille se pose, pour les femmes enceintes déjà mères, quand on sait que les enfants en bas âge sont les plus susceptibles d’être porteurs du virus. « Si la personne fréquente des jeunes enfants, il s’agit d’éviter le contact avec les larmes, la salive et l’urine. Si l’aîné pleure, les mères doivent éviter de l’embrasser, au moins durant le premier trimestre de grossesse. Se laver les mains, porter des gants lors du change de leur autre enfant s’il montre de la fièvre, a le nez qui coule, s’il tousse », sont des gestes que préconise Docteur Arnault Pfersdorff sur son blog.
Mais le Dr Jean Marc Pinot n’est pas de cet avis. “Les cas graves sont rares. Je pense que cela ne vaut pas le coup de demander à une femme enceinte de s’éloigner de ses enfants pendant 9 mois par peur. Les conséquences psychologiques sur ces derniers peuvent être vraiment préoccupantes”, alerte-t-il.
S’il n’existe donc pas de consensus quant au diagnostic ou aux manières de se prémunir du virus, un manque cruel de prévention – et d’intérêt – face aux conséquences du CMV sur la femme enceinte et son fœtus est criant. Il conviendrait donc d’ouvrir le dialogue à ce sujet, afin de préserver la santé (mentale et physique) des futures mamans et de leurs enfants.
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