Gérard Jugnot est acteur, scénariste, producteur et réalisateur. Il est l’un des membres de la troupe du Splendid avec des films devenus cultes comme Les Bronzés ou Le père Noël est une ordure. Depuis, il s’est construit une belle carrière solo avec une casquette de comédien, mais aussi une de réalisateur qui lui va à ravir. Ses films Pinot simple flic, Scout toujours, Une époque formidable, Monsieur Batignolles s’ajoutent à la liste des films incontournables. Le mercredi 21 décembre 2022 sortira son nouveau film Le Petit Piaf avec Marc Lavoine et Soan Ahrimann.

franceinfo : Le Petit Piaf raconte l’histoire d’un petit garçon réunionnais, issu d’un milieu modeste, qui rêve d’être chanteur. Dans ce film, vous continuez à donner de l’espoir, à nous encourager à croire en nos rêves.

Gérard Jugnot : Je ne pense pas que le cinéma change la vie, mais il peut donner des forces à ceux qui veulent la changer. Pour moi, le cinéma doit être plus beau que la vie, tout en sachant très bien qu’on nous raconte des histoires.

« Le cinéma que j’aime est un cinéma roboratif, c’est-à-dire qu’il donne de l’appétit, de l’espoir. »

à franceinfo

Moi, je pars toujours du principe que le ‘happy end’ n’existe qu’au cinéma. Dans la vie, il n’y a pas de ‘happy end’. Moi, je fais du cinéma pour, justement, vaincre un mal de vivre et c’est d’ailleurs le thème du film. Le personnage de Marc Lavoine, qui va être le coach désigné par ces enfants, est quelqu’un qui ne va pas bien et qui va, grâce à la transmission, donner, et du coup, recevoir. Il va vaincre son mal de vivre par la vie. Je crois que c’est la vie qui arrive à vaincre le mal de vivre.

Il y a une vraie résonnance avec votre parcours, c’est ce qu’on ressent dans le film, comme s’il y avait votre regard d’enfant à l’intérieur. A quoi rêviez-vous, enfant ? Le cinéma entre très tôt dans votre vie.

Oui, absolument. J’ai retrouvé ça ! Ce petit garçon qui a la musique en lui, complètement possédé par ça, qui est une machine à chanter. J’ai eu très vite cette envie de faire du cinéma comme metteur en scène d’ailleurs, pas comme acteur. Et c’est sûr que je me retrouve là-dedans avec la famille qui est un petit peu hostile, même si la grand-mère est tout à fait pour. La maman vit seule, a des problèmes et se dit : « Il ferait mieux d’aller à l’école plutôt que de chanter« . C’est ça qui résonnait sans doute avec mon parcours, cette passion que j’avais de raconter des histoire, de faire des films, de faire rire les gens. Lui, c’est la musique et il est comme ça le petit Soan.

Dans le film, il y a aussi Hervé Cristiani avec Il est libre, Max. Cette chanson est très révélatrice de ce film et de votre parcours, avec ce sentiment de liberté. Est-ce que vous l’avez aujourd’hui ? J’ai l’impression que vous avez réussi à l’acquérir au fil du temps.

Oui, à l’ancienneté. C’est vrai que ce film est simple. Sans dire que je n’en ai plus rien à foutre, il y a un tas de choses qui ne m’embarrassent plus. Il y a beaucoup de choses qui me coinçaient, me bloquaient. Et puis maintenant, je n’ai plus rien à prouver, si ce n’est le plaisir que j’ai d’être encore là, de faire rire les gens, de les émouvoir. J’ai eu beaucoup plus de bides que de succès dans ma vie, mais les gens se rappellent que des succès. Comme Bernard Blier : « L’important, c’est de ne pas faire que des mauvais films« , donc, quand on en a un bon comme ça, on se dit : « Tiens, on est pas si mal« , on est assez content. Quand je me retourne, je suis assez content du parcours malgré tout.

Parce qu’on parle de transmission, que gardez-vous de votre père et de votre mère ? Vous n’avez pas voulu faire du cinéma pour suivre leurs traces, mais parce que vous étiez passionné.

Ça été douloureux. Mes parents m’ont transmis le doute. Mon père n’était qu’un ‘doute sur pattes’ et j’ai dû me battre pour prouver, pour me prouver. Je dis toujours que j’aurais préféré que mes parents me fassent découvrir Mozart, le cinéma d’auteur et ils m’ont transmis la gourmandise et le cholestérol. C’est un défaut qu’ils avaient qui finalement m’a servi.

Mes parents et mes grands-parents m’ont donné le sens de la vie, ce qui fait que je sais me débrouiller, je sais faire la cuisine, manger, faire mes courses, vivre normalement.

à franceinfo

Quand j’étais petit, j’étais vraiment… Quand on est môme, on a toujours l’impression que vos parents sont pas vos parents, que vous avez été enlevé par des bohémiens et que vos parents étaient un grand roi ou une grande reine. Et puis après, on apprend à accepter justement ce qu’ils sont, ce qu’ils ont été, ça n’a pas été facile. On s’est beaucoup frittés avec mon père et puis finalement, il a commencé à comprendre sur le tard. Mais c’est pour ça que je suis content qu’il soit parti relativement âgé. Il a pu voir que ce qu’il craignait n’est pas arrivé. Il craignait que je termine clochard. Cela dit, je dis toujours en plaisantant qu’il avait raison puisque j’ai fait Une époque formidable. Ça m’a un petit peu rasséréné. On croit toujours, dans un premier temps, que vos parents ont que des défauts et puis finalement, on s’aperçoit qu’il y a des fondamentaux qu’ils vous ont transmis et qui ne sont pas si mal.

Pour terminer, quel regard avez-vous sur votre parcours avec ce film qui, à mon avis, va être adopté par le public français ?

C’est important, la réussite. Je ne parle pas du succès, le succès, c’est autre chose, mais en tout cas, les gens disent : « Bravo, félicitations » et c’est mieux qu’un coup de pied au cul. Je regarde ma carrière, je suis le premier étonné parce que j’étais un peu comme le petit Soan. Je rêvais de ça et je ne pensais pas que j’arriverai à ça. J’ai eu beaucoup de chance. 

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