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Si nous avons du mal à trouver des idées originales, c’est que notre cerveau n’est pas naturellement doué pour ça ! Mais cette « paresse créative » peut être compensée. Explications.

L’experte : Juliette Brun, ingénieure polytechnicienne et docteure diplômée de l’Ecole des Mines. est consultante et chercheuse en management de l’innovation.

Quand il s’agit de penser, tout d’abord, comment notre cerveau agit-il ?

Juliette Brun : Notre cerveau est une puissante machinerie d’environ cent milliards de neurones. Bien qu’il ne représente que 2% de notre corps, il consomme 20% de notre énergie à lui seul pour assurer ses multiples tâches quotidiennes, dont la motricité, le langage, la mémoire ou le calcul. L’information neuronale s’effectue pour chacune de ces tâches à une vitesse de 430 km/h. Le cerveau met en place des automatismes de pensées qui permettent de les effectuer rapidement, sans avoir y repenser chaque fois. On lui doit aussi la capacité de générer des idées nouvelles. Mais cette activité requiert un fonctionnement différent, où ces mêmes réflexes, si utiles dans la vie quotidienne, se révèlent défavorables quand il s’agit de produire des idées nouvelles. Or notre cerveau y recourt spontanément parce qu’il a tendance, par nature, à à emprunter des chemins connus.

Il est donc, à la fois, moteur de création et peu inventif ?

J. B. : Oui. Cette paresse créative du cerveau, nommée « fixation » par les chercheurs se traduit par une difficulté à s’écarter des solutions classiques. Nos automatismes, judicieux face à un problème simple, connu ou une situation d’urgence, peuvent nous induire en erreur dès que le problème est plus élaboré, complexe ou inédit. Dans ce cas, il faut parvenir à contourner le pilotage automatique de notre cerveau pour enclencher un raisonnement logique. Ce passage d’un système de pensée à l’autre joue un rôle crucial dans le processus de créativité. Puisqu’il n’est pas naturel, il est nécessaire de l’exercer.

Pouvez-vous nous donner un exemple ?

J. B. : Prenons celui de la mare aux nénuphars, dont l’énoncé est le suivant : « La parcelle de nénuphars d’un lac double chaque jour. Sachant qu’il faut 48 jours pour que la parcelle recouvre entièrement le lac, combien de temps faut-il pour qu’elle recouvre la moitié du lac ?  » Notre cerveau nous souffle rapidement une réponse basée sur nos expériences : 24, qui correspond à la division par deux de 48. Or, la réponse est 47. Notre association d’idées généré par le mode intuitif nous a trompé. Dans cet exemple, il n’y a qu’une réponse au problème, et elle est logique. Elle demande donc le temps du raisonnement. Et pour penser autrement, il est d’abord nécessaire de prendre ce temps. D’autant plus quand il s’agit de trouver des idées originales, inédites, pour laquelle il n’y a pas encore de réponse connue. Ce qui dément l’idée reçue qui voudrait que l’inspiration fuse en 15 minutes de brainstorming !

En matière de créativité, vous pointez une idée reçue…

J. B. : En ce qui concerne le brainstorming, il s’avère que l’effet de fixation se renforce en groupe, entre autre par le biais de conformisme et par paresse sociale (qui consiste à adopter les idées d’autrui). Dans ce contexte, les chercheurs observent que le groupe génère en moyenne moins d’idées créatives que des personnes travaillant séparément. Mieux vaut donc que chaque participant ait le temps de réfléchir seul, avant de poursuivre en groupe où les idées vont s’enrichir. Une autre idée reçue veut que les bonnes idées soient le fruit du hasard. C’est souvent le cas, mais notre sagacité, ce mélange d’observation et de déduction, est indispensable. Elle permet de provoquer le hasard au lieu de l’attendre !

Et comment exercer sa capacité d’innovation ?

J. B. : Pour créer du nouveau, on peut déjà différencier le connu (nos connaissances) de l’inconnu (nos idées) pour les faire dialoguer et créer des oxymores (association de mots dont le sens est contradictoire) : une chaise sans pieds, un sac de luxe solidaire, etc. Partons de l’idée d’un « café infantile ». On décline d’abord les sens alternatifs de « café » (plante, graine, lieu, arôme) et de « infantile » (relatif à l’enfance, immature, etc.), pour affiner ses caractéristiques potentielles : qui peut être consommé par les enfants (aromatisant d’une glace), qui fait retomber en enfance (madeleine de Proust), qui manque de maturité (café vert). Peu à peu, le concept ou le produit se dessine avec sa propre logique. Pour y parvenir, l’imaginaire et l’émotionnel, libérés des conventions, sont de précieux vecteurs.

Le livre : Clair et fourmillant d’exemples, de l’invention des bêtises de Cambrai, de la love box, de la pénicilline ou de la canne culbuto,ce livre explique la mécanique de la génération d’idées et propose des exercices pour surmonter les blocages rencontrés par notre cerveau quand il s’agit de trouver de l’inédit. Indispensable, donc ! D’où viennent les bonnes idées ? Comprendre les mécanismes du cerveau pour trouver des idées facilement, seul ou à plusieurs. Editions Diateino, 14 €

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