Axel Bauer est chanteur, compositeur, auteur et guitariste. Sa chanson Cargo a marqué l’année 1983 dans les charts français, un immense succès qu’il a de nouveau vécu avec la chanson Éteins la lumière en 1992 puis À ma place en duo avec Zazie en 2001. Aujourd’hui, il revient avec un nouveau single Ici Londres, le premier extrait de son futur et neuvième album qui paraîtra au mois de mai.
franceinfo : Vous entamez avec ce disque un chemin de recentrage personnel basé sur la transmission. C’est un bien bel hommage que vous rendez à votre père, Frank Bauer, dernier speaker de Radio Londres, le même qui a prononcé : « Les Français parlent aux Français« , 517 fois. C’était un hommage nécessaire ?
Axel Bauer : Il était nécessaire de le faire pour moi. Mon père est venu me voir, il y a quelques années, et on a parlé de la sortie de son livre à l’époque : 40 à Londres, où il racontait ce passé à Londres, où il était speaker, espion, sous le blitz comme jeune passionné de jazz. Je lui posais plein de questions, bien évidemment, puisque ça m’intéressait, je voulais ressentir ce qu’il avait ressenti.
Moi aussi, j’étais à Londres quand j’avais 22 ans, mais pas pour les mêmes raisons et pas dans des circonstances aussi dramatiques. Dans la discussion, le micro était resté ouvert, il a enregistré et il m’a dit : « Voilà comment je disais les phrases, ‘Les Français parlent tous français' », et donc il les a réenregistrées pour moi. J’ai gardé cette conversation avec laquelle Boris Bergman, qui a aussi un passé vibrant avec sa famille par rapport à cette époque, a su trouver les mots. On a fait de faux messages de Radio Londres et on a fait une chanson qui s’appelle Ici Londres.
Effectivement, on entend la voix de votre père. C’est vrai qu’il a beaucoup influencé votre vie, il était batteur de Django Reinhardt.
Au départ, c’était un jeune qui partait s’engager dans les forces de la France libre en Angleterre. Ensuite, il a été correspondant de guerre, puis secrétaire général de la Comédie-Française. Il a monté le premier cabinet de relations publiques en France. Il a organisé le premier gros festival de jazz en France.
« Mon père, Frank Bauer, était une sorte de touche-à-tout, c’était un être formidable. »
à franceinfo
Du côté familial, il y a une musicalité qui vous a vraiment accompagné tout au long de votre enfance. Avec effectivement votre père, mais aussi votre arrière-grand-père qui était organiste. Votre tante était pianiste et concertiste classique, premier Prix du Conservatoire, ayant eu comme professeurs Edwin Fischer, Nadia Boulanger et Rudolf Serkin. Ils vous ont vraiment apporté ce côté musical, certes, mais ce côté libre aussi.
Mon père disait qu’à son époque, si on voulait écouter de la musique, il fallait savoir en faire. Tout le monde jouait de la musique et donc j’ai baigné dans cette ambiance qui fait que la musique, je l’ai entendue depuis le berceau. Le fait d’apprendre un instrument, c’était complètement naturel. On m’emmenait voir ma tante qui jouait à l’ORTF ou encore au Carnegie Hall, c’étaient, en plus, des lieux prestigieux. Mon père avait joué avec Django Reinhardt de la batterie, il avait un piano et un orgue à la maison. La musique faisait partie de ma vie, puis un jour, il est venu avec des tickets pour aller voir les Who, ça a été la révolution pour moi.
J’ai trouvé ma musique. J’avais 12, 13 ans et il vient avec ce ticket pour voir le plus grand groupe de rock du monde ! Mon père, en plus, aimait bien les Who, c’était fabuleux.
Un soir, alors qu’il joue au piano dans un club de jazz, il va être approché par Jean Oberlé, l’animateur de l’équipe de la France libre, à Radio Londres. C’est lui qui l’invite à rejoindre Radio Londres. Dans ce titre, c’est aussi ça qu’on découvre ou redécouvre, la puissance de Radio Londres. Il y a ce côté espoir, c’était une véritable arme de guerre, c’était la vie aussi dans cette France occupée par l’ennemi, et votre père incarnait cette résistance. Vous en parlez beaucoup dans ce titre.
C’est Boris Bergman qui est arrivé avec cette phrase que j’ai trouvé magique, c’est « En d’autres temps, on était plus résistants« , qui est à la fois, un jeu de mots, et en même temps qui pose la question : « À quoi résistons-nous aujourd’hui ? » Moi, je me pose la question. Où est cette liberté qu’on a finalement ? Ne faut-il pas que je réalise que j’ai quand même beaucoup plus de libertés ? C’est ce que je réalisais en parlant avec mon père, c’est que j’avais beaucoup plus de liberté que lui. Il avait combattu pour que j’ai cette liberté.
Il représente quoi ce titre pour vous ? Sachant qu’il avait demandé à ce que vous puissiez faire un titre ensemble.
Ça me fait toujours drôle de chanter et d’entendre sa voix qui me répond.
« Ça m’émeut toujours d’entendre la voix de mon père. »
à franceinfo
Que gardez-vous de votre père alors ?
Déjà, la passion de la musique. Il avait un regard sur ma musique qui me plaisait aussi. Il avait une grande ouverture d’esprit, donc je l’écoutais comme un fils écoute son père. C’était un monsieur qui travaillait beaucoup, donc il n’était pas tout le temps-là, bien sûr.
Quand j’étais petit, je me rappelle, on avait des Lego et avec mon frère, on déballait la boîte et on faisait de vagues trucs. Lui, il arrivait et construisait un porte-avions. Très vite, j’ai compris qu’avec très peu, il arrivait à faire beaucoup. Il m’a transmis un peu ces valeurs et je trouve que c’est déjà mal déjà.
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