Difficile de se dire que l’attente est enfin terminée tant on a l’impression d’avoir patienté une éternité pour poser enfin nos mains sur ce remake de Final Fantasy VII, emblème incontesté du J-RPG depuis des décennies.
Ça fait tout de même cinq ans que l’on attend ce remake de l’opus le plus mythique et le plus populaire de la licence de Square Enix. Cinq années avec des hauts et des bas, des magnifiques trailers et des previews très encourageantes, mais aussi des retards de développement et des annonces comme celle que l’intrigue serait découpée en plusieurs jeux et que celui-ci se passerait uniquement à Midgar, retraçant le premier acte du jeu de base. Comme Capcom l’a fait avec Resident Evil, Square Enix a pour ambition de proposer une refonte total de ce chef d’œuvre de la Playstation, que ça soit d’un point de vue graphique évidemment, mais également d’un point de vue scénaristique et de gameplay, avec la difficile tâche de trouver l’équilibre pour convenir aux fans du jeu de base et de J-RPG en général, et un public un peu moins spécialisé. Est-ce que le défi a été relevé ? Réponse juste en dessous, sans spoilers bien évidemment.
Square Enix est bien conscient que le terme de J-RPG fait encore fuir la majorité des joueurs même si des perles comme Persona 5 ou NiEr Automata ont clairement fait pencher la balance ces dernières années. Mais Final Fantasy VII occupe une place spéciale dans ce monde, avec ses nombreux spin-offs et ses films, et une aura légendaire qui attire forcément beaucoup plus de monde. Il semblait donc évident que le jeu proposerait un mode de difficulté où la gestion de l’équipe est très légère, rapprochant le jeu d’un action RPG un peu basique, et c’est presque ennuyant. Pour véritablement apprécier toutes les nuances de gameplay de ce remake, il va bien sûr falloir jouer en mode “normal”, pour garder le côté stratégique au tour par tour (enfin, en temps très ralenti pour le coup).
Le résultat, c’est un gameplay extrêmement bien maîtrisé et plein de subtilités. Déjà parce que chaque personnage a un profil spécifique. Cloud va faire des grosses attaques au corps à corps, alors que Barret est un sac à PV qui attaque plutôt à distance. Tifa est le personnage le plus rapide et Aerith est bien évidemment le support à distance. Ces archétypes aident beaucoup à gérer ses materias, ces petites sphères qui donnent des sorts et bonus, sur chaque personnage. Mais en plus de ça, chacun a une compétence unique qui ne coûte rien à utiliser et qui va trancher encore d’avantage l’intérêt de chaque personnage en combat. Cloud peut changer de posture d’attaque alors que Barret peut faire une attaque chargée à distance.
Mais là où Final Fantasy VII Remake brille vraiment c’est dans le dynamisme de ses combats. Aucun temps mort car même si l’on attaque pas, il va falloir esquiver ou se mettre en garde, et attendre tranquillement dans un coin que sa jauge ATB (qui va permettre de lancer des sorts, une attaque ou d’utiliser un objet) est rarement une option. Cette partie dynamique des combats n’est que la face émergée de l’iceberg et la pause tactique, qui va ralentir le temps pour permettre de définir les prochaines actions des deux autres personnages va être omniprésent. Un bon moyen de garder la saveur “J-RPG tour par tour” de l’opus original, en proposant quelque chose de mieux foutu et plus moderne.
Surtout que le jeu propose un très large panel de mécaniques en combat. Au delà des techniques et sorts, on a toujours le système de transcendance qui permet de lâcher une grosse attaque après avoir tapé suffisamment longtemps et bien sûr les emblématiques invocations qui vont être d’une grande aide face aux boss. Et n’oublions pas l’excellent système de fragilité, une barre qui se remplit quand l’ennemi est dans une situation de faiblesse, et qui une fois pleine le fera passer en état de choc, et le rendra beaucoup plus vulnérable et immobile pendant un moment. Une mécanique de jeu essentielle sur les boss et certains ennemis spécifiques qui vient achever ce système de combat irréprochable, à la fois agréable et dynamique mais aussi exigeant et alliant classique avec modernité.
Final Fantasy VII Remake a un vrai côté stratégique qui n’est pas toujours nécessaire dans des petits combats mais qui devient omniprésent lors des combats de boss. Chaque boss est un véritable plaisir, ils sont très différents et hyper variés, du plus stylé au plus bizarre. Ces combats sont longs, vont nous amener en mode pause stratégique extrêmement régulièrement et nous mettre un peu à mal. La courbe de difficulté de Final Fantasy VII Remake est très bien gérée et certains combats sont difficiles sans que les choses nous paraissent jamais hors de portée. On appréciera que le gain d’expérience ne nécessite pas un farming intensif pour se mettre à niveau, comme c’était souvent le cas dans les Final Fantasy il y a plusieurs années. C’est en partie dû au fait que ce remake soit un jeu en couloir laissant au final peu de place à l’exploration, mais c’est peut-être mieux comme ça au final. Le petit détail qui fait tout : On peut recommencer un combat en quelques touches si l’on voit qu’on est mal parti et qu’on préfère reset.
Cette fluidité passe également par la dimension RPG du jeu. Au delà de la montée de niveau, l’équipe a décidé de rester relativement simple sur cette partie du jeu, quitte à décevoir un peu les fans hardcore habitués du theory crafting et à optimiser son équipe en passant des gros moments dans les menus. Dans FF VII, chaque skill est lié à une arme et il faudra l’équiper le temps de quelques combats pour l’apprendre définitivement. Les matérias montent de niveau automatiquement et on a rien de plus à faire, comme c’est le cas avec les personnages. La seule chose qui va nous faire passer du temps dans les menus, c’est l’amélioration des armes, mais là encore les choses sont relativement simples, puisqu’on va se contenter de répartir nos points sur des bonus bien définis mais qui peuvent faire la différence, surtout que des armes sont clairement plus utiles si on utilise le perso en tant que tank, mage ou healer. Bref, le côté RPG a été épuré et modernisé pour qu’on passe moins de temps dans les menus.
C’est indéniable, Final Fantasy VII Remake est un jeu sublime. L’univers de base est propice à proposer quelque chose de riche et Square Enix ne s’est pas privé pour nous offrir une version de Midgar vivante, tantôt coloré, tantôt terne mais l’ensemble captive le regard très facilement et invite à faire des screens régulièrement. Cette beauté des environnements nous fait presque oublier d’autres défauts : le côté couloir dont on parlait précédemment qui fait que l’aventure reste très dirigiste, sauf pendant ces moments où l’on va pouvoir faire quelques quêtes secondaires. Mais c’est surtout le level design qui déçoit. Au delà de la beauté, les quelques puzzles que l’on rencontre durant nos phases d’exploration ne sont jamais bien compliqués et les choses consistent très rapidement à courir d’un point à l’autre, surtout que le voyage rapide se débloque très tard dans le jeu.
Après des décennies, force est de constater que le cadre et le scénario de Final Fantasy VII tiennent toujours autant la route. Si l’intrigue de base reste la même, que ceux qui ont déjà fait le premier s’attendent tout de même à quelques surprises. Il faut dire que Square Enix a énormément enrichi ce qui n’était que le premier acte de Final Fantasy VII. On prend plus de temps pour présenter les choses, et surtout les personnages sont traités avec plus d’attention et plus de soin. Le grand gagnant est Barret, qui passe de gueulard chiant dans le jeu de base à un personnage beaucoup plus multifacette et je me suis même surpris à avoir peur pour lui, alors que c’est clairement un personnage que je n’aimais pas dans le jeu original. On s’attache énormément au trio d’Avalanche Jessie, Biggs et Wedge, le jeu prenant le temps de nous faire passer des moments avec eux.
Et ce constat peut être fait pour de nombreux éléments du jeu et Final Fantasy VII aime prendre son temps pour développer ses personnages et son univers. L’écriture est globalement très bien, on rit, on est choqué, on sourit, on est en colère. On aime voir Cloud se faire embarquer contre son gré dans des plans foireux, ou Aerith toujours en train de positiver. Cependant, le fait de vouloir prendre son temps a aussi des mauvais côtés. On a vraiment l’impression par moment que le jeu tire en longueur pour allonger artificiellement sa durée de vie. On nous refait passer par des endroits que l’on a déjà visité par exemple, mais le plus gênant est quand on se retrouve dans une situation grave (comme le pilier du secteur 7 par exemple pour les connaisseurs) et que l’on s’arrête toutes les deux minutes pour parler. C’est extrêmement frustrant d’être coupé dans l’action et ça a tendance à casser le côté dramatique de la chose.
L’autre chose qui fait que l’histoire nous captive, c’est la mise en scène. Que ça soit l’introduction d’un boss hyper dynamique ou un moment triste, il y a un sens de la mise en scène qui fait que l’on regarde TOUTES les cinématiques, et il y en a beaucoup. Un véritable travail de cinéaste a été fait pour sublimer l’écriture et même une discussion anodine maintient notre attention sans aucune difficulté. La musique participe forcément beaucoup à cet effort, et réentendre ces thèmes emblématiques de FF VII de cette façon est absolument magistral. Autant dire que la bande-son va tourner en boucle sur le compte Spotify de tous les joueurs, y compris pour les versions alternatives jazz ou metal de certains morceaux, trouvables en jeu via des vinyles plus ou moins cachés.
Si je devais faire un reproche à ce Final Fantasy VII Remake, c’est celui là. Alors oui, on nous avait prévenu que le jeu se passerait uniquement à Midgar et le résultat est excellent. Mais d’un point de vue scénaristique, ce n’est pas vraiment une conclusion et le jeu ne se termine pas sur une note satisfaisante, et laisse plein de choses en suspens. C’est une certitude, la fin du jeu va faire couler beaucoup d’encre et on espère que Square Enix ne tardera pas trop à sortir la suite. Le risque de perdre une partie de son audience une fois le jeu terminé est réel, surtout que le post-game proposé n’est pas suffisant. Refaire certains chapitres pour trouver les vinyles manquants, refaire des combats de boss en plus difficile ou faire la vingtaine de quêtes secondaires du jeu, si on avait décidé de les passer, ça ne donne pas vraiment envie de s’y remettre.
Malgré ça , Final Fantasy VII Remake est immanquable. Que l’on ait fait l’original ou non, Square Enix a parfaitement réussi à saisir le sens du mot “remake” en proposant quelque chose de neuf et novateur sur bien des aspects. Un système de combats extrêmement bien pensé avec un côté RPG certes plus épuré mais aussi modernisé. Une histoire captivante accompagnée d’une mise en scène géniale, des graphismes sublimes et d’une musique somptueuse, malgré quelques longueurs par moment. Même quelqu’un qui n’a jamais joué à FF VII peut se lancer sans être perdu, mis à part le dernier acte, totalement incompréhensible sans connaissances de l’opus original. La conclusion risque de faire pas mal parler et on espère que Square Enix ne sera pas avare en annonces concernant la suite, qui va se faire beaucoup attendre après nous avoir proposé un tel chef d’œuvre.
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