• La minisérie Faking Hitler, l’arnaque du siècle est diffusée dès ce jeudi à 20h50 sur Histoire TV.
  • Cette fiction allemande revient sur l’affaire des faux journaux intimes d’Hitler, publiés par le Stern au printemps 1983.
  • Au travers ce scandale, la minisérie aborde la question des fake news et de la fascination pour l’extrême droite.

Retour sur le plus gros scandale médiatique de l’Allemagne ! Au printemps 1983, le plus important magazine ouest-allemand à l’époque, Stern, publie des extraits et annonce en grande pompe la découverte de 62 journaux intimes d’ Adolf Hitler. Alors que le magazine clame que des experts l’ont authentifié, la plupart des historiens sont sceptiques. Pour faire taire les critiques, Stern soumet les carnets à des analyses scientifiques. Le verdict de l’examen à l’ultraviolet du service fédéral des archives (Bundesarchiv) est sans appel : les carnets sont faux. Comme Stern avait vendu les droits des carnets à l’international, l’affaire fait la une de la presse mondiale. En France, Paris Match consacre sa couverture aux carnets. Stern, qui a versé plusieurs millions de marks allemands pour les carnets, licencient deux rédacteurs en chef. Après le film satirique Schtonk ! sorti en 1992, la minisérie en six épisodes Faking Hitler, l’arnaque du siècle, produite par UFA Fiction et diffusée dès ce jeudi à 20h50 sur  Histoire TV, revient sur l’affaire la plus honteuse de l’histoire de la presse allemande et livre une savoureuse leçon d’histoire

Si Tommy Wosch se considère comme « grand fan de Schtonk ! », le showrunneur de la série estime, dans les colonnes du magazine allemand Blickpunkt:Film, que le « format sériel permet d’aller plus en profondeur et de raconter l’histoire différemment ». La dimension satirique du long métrage, nommé à l’Oscar dans la catégorie meilleur film en langue étrangère en 1993, « occulte aussi des aspects du sujet. » importants.

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Un reporter obsédé par Hitler

La minisérie chorale créée par Tommy Wosch et Tobi Baumann met en scène Gerd Heideman (Lars Eidinger), fin limier et journaliste au Stern depuis vingt-cinq ans. Le reporter vedette du quotidien libéral de gauche cultive pourtant une étrange obsession pour les reliques nazies au point de racheter le Carin II, le yacht d’Hermann Göring, et de coucher avec la fille du défunt maréchal du IIIe Reich, Edda (Jeanette Hain).

Mais l’entretien d’un tel bateau, ça coûte un bras et Gerd Heideman est contraint de revendre le rafiot. Par l’entremise d’un collectionneur d’objets nazis, il découvre l’existence du journal intime d’Adolf Hitler, des carnets détenus par un antiquaire est allemand, Konrad Fischer.

Un antiquaire qui cache un faussaire

Sous le pseudonyme de Dr Konrad Fischer se cache en réalité Konrad Kujau (Moritz Bleibtreu), un faussaire. L’homme a commencé par vendre de vrais souvenirs nazis glanés au marché noir en RDA à de riches et vieux fétichistes de la croix gammée. Face à une demande croissante, Konrad Kujau s’est mis en fabriquer lui-même le bric-à-brac hitlérien si convoité. Croyant détenir le scoop du siècle, le journaliste décide de mener l’enquête, en cachette de sa hiérarchie, las de sa fixette sur les chemises brunes.

La minisérie porte le même nom qu’un podcast du Stern, qui a réanalysé les échanges entre sonores entre Kujau et le journaliste. « Mais cela ne nous a pas dispensés de consulter tous les livres pertinents et de dévorer tout ce qui existe à ce sujet. Faking Hitler s’inspire du podcast. Ce dernier a une ambition documentaire, la série est un complément artistique fictionnel », précise le showrunneur.

Pour ce dernier, Faking Hitler a été conçue avant tout comme une histoire de « séduction » : « Tantôt le Stern a séduit le journaliste Heidemann, tantôt Heidemann a séduit le Stern, puis Kujau a séduit Heidemann et vice-versa », détaille-t-il.

La mission dénazification

Au-delà de l’affaire des carnets du dictateur, Faking Hitler se demande si la dénazification a vraiment fonctionné dans les deux Allemagne de l’après-guerre ? Et à quel était le poids du national-socialisme en RDA et en RFA au début des années 1980 ? « À l’époque, en Bavière, quand j’avais 13 ou 14 ans, la société n’avait pas du tout peur du national-socialisme ou des nazis. On donnait des noms de nazis aux casernes militaires, dans les auberges, il y avait des photos de SS. En dessous, on pouvait lire « Nos héros ». (…) C’est ainsi que nous avons grandi », raconte Tommy Wosch.

En parallèle du montage de l’arnaque rocambolesque montée par le faussaire et le journaliste, Faking Hitler suit aussi les premiers pas au Stern, au sein d’une rédaction sexiste et dominée par les hommes, d’une jeune journaliste, Elisabeth Stöckel (Sinje Irslinger).

Cette dernière, alors qu’elle enquête sur le passé SS de l’acteur allemand Horst Tappert, l’interprète du plus célèbres des flics allemands, Derrick, va se retrouver confrontée au passé nazi de son père. Dans les années 1980, « on s’est demandé ce que les grands-parents avaient fait pendant la guerre, quel uniforme portait le grand-oncle sur cette vieille photo. Nous avions besoin d’un personnage qui puisse illustrer cet aspect de notre histoire », souligne le showrunneur.

La désinformation et la fascination

Elisabeth Stöckel incarne ici « la boussole morale » d’une rédaction, prête à tout pour obtenir un scoop. Faking Hitler pose ainsi des questions de déontologie journalistique, interroge les conditions de fabrication des fake news. Si un des faux carnets a été vendu aux enchères en 2004, le reste des carnets a été offert en 2013 par le Stern aux archives fédérales allemandes pour servir, non à l’histoire du IIIe Reich, mais à celle du journalisme.

Une question toujours d’actualité : « Les mécanismes de contrôle journalistique sont moins importants aujourd’hui qu’à l’époque. Justement en raison de la pression qu’exercent actuellement les réseaux sociaux, à savoir pouvoir publier sans mécanismes de contrôle et sans moment de répit. La nécessité économique des médias qui publient fait le reste », avertit le showrunneur.

L’histoire abracadabrante et souvent hilarante de Faking Hitler rappelle en filigrane le cocktail qui fait le lit de l’extrême droite, dont deux ingrédients principaux sont la fascination et la désinformation. « Le fait qu’un magazine libéral de gauche ait publié du révisionnisme historique suggère en définitive que l’extrémisme de droite peut survenir toujours et partout », conclut-il.

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