Jetant des ponts entre le passé et aujourd’hui, le conscient et les songes, les pratiques de la plus vieille civilisation du monde s’appuient sur des préceptes qu’on peut appliquer au quotidien.

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Pour comprendre les fondements de la santé aborigène, il faut d’abord s’imprégner de la culture de ces hommes et femmes qui résident sur le globe depuis environ 50 000 ans et qui sont, selon la recherche scientifique, la plus ancienne population jamais recensée. Ceux qui auraient rejoint l’Australie pendant l’ère glaciaire estiment être en relation directe avec toutes les composantes de la planète, des animaux aux ancêtres défunts, en passant par les végétaux, les rochers, les ruisseaux et rivières et les éléments météorologiques, tels que le vent ou la pluie ou astrologiques, comme les étoiles.

Une petite partie d’un grand tout

Ils sont donc les maillons infimes d’un immense réseau, tissé de visible et d’invisible. « Avant d’appartenir au genre humain, ils font partie du monde naturel », confirme la documentariste Vanessa Escalante, qui a passé dix ans auprès d’eux et a signé l’ouvrage Ma peau d’un autre monde, voyage initiatique en terres aborigènes (Ed. Mama). Ils sont aussi en étroite symbiose avec ce qu’ils nomment « le temps du rêve », période qui, selon leurs croyances, a précédé la genèse de la terre et où tout y était immatériel. Cette mémoire des origines les accompagne et les aide à corriger ce qui dysfonctionne chez leurs pairs. Mais cette faculté de transcendance est réservée à quelques-uns, les guérisseurs : « Tout le monde n’est pas habilité à l’être. On le devient soit par filiation soit en étant initié pendant l’enfance aux lois de l’univers. C’est ultrasecret, les femmes n’ont pas accès au même savoir que les hommes et inversement », précise notre experte.

Danses, chants et impositions des mains

S’ils sont connectés à tout ce qui existe, les guérisseurs aborigènes sont également liés à la force de vie globale qui régit l’univers. « Ils ont la capacité de faire bouger l’énergie cinétique qui se trouve autour de nous, qui forme une sorte de cinquième élément », explique Vanessa Escalante. Par le biais de cérémonies ponctuées de musique, de danses et de chants, de rituels de succion et d’imposition des mains et plus rarement la prise de décoctions, ils se servent ensuite de ce flux qu’ils captent pour traiter les personnes en souffrance. Car pour eux, ce que l’on constate de pathologique au niveau physiologique n’est que le reflet ce qui nous parasite intérieurement. « Ils s’adonnent à ce qu’on peut appeler le replacement d’âmes car il arrive que l’esprit des patients soit hors de leur corps physique. Par ailleurs, pour eux, le corps est rempli d’entités. Le guérisseur, après avoir cerné vos zones de fragilité, purge donc l’organisme de celles-ci. Cela permet entre autres à celui ou celle qui est soignée de sortir des schémas de répétition négatifs et cela se révèle efficace sur des troubles psychologiques plus ou moins sévères », note Vanessa Escalante.

Fumigations, frictions et infusions

Démarche holistique, la médecine aborigène se charge donc de combler « les trous dans votre aura » qui vous empêchent d’accéder au bien-être. Mais grâce à sa maîtrise des pouvoirs des plantes, elle sait aussi remédier à des problèmes de la santé plus quotidiens. L’acacia, l’eucalyptus et le mélaleuque servent ainsi par fumigation, inhalation ou infusion à traiter les sinusites et autres gênes de la sphère ORL. Le prunier sauvage et le pandanus sont pilés et mélangés avec de l’eau pour former une pâte qu’on place sur les dents douloureuses. La sève de gommier est désinfectante alors que le lemon-grass (une sorte de citronnelle) calme les tensions musculaires et les inflammations. Frictionnées contre le front, les baies de concombre du bush apaisent les céphalées. Violemment réprouvé à l’époque de la colonisation de l’Australie, cet art de soigner différemment et les individus qui le transmettent sont heureusement en passe d’être réhabilités : « Il y a quelques hôpitaux, notamment à Adélaïde et Brisbane, qui acceptent d’intégrer les guérisseurs aborigènes et leurs savoirs dans leurs services, notamment pour prendre en charge les Aborigènes eux-mêmes » conclut Vanessa Escalante.

Merci à Vanessa Escalante, auteure de l’ouvrage Ma peau d’un autre monde, voyage initiatique en terres aborigènes (Ed. Mama).

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