Témoignage (2/3) – En octobre 2020, l’influenceuse et entrepreneure apprenait qu’elle était atteinte d’un cancer triple négatif. Une forme agressive, qui touche près de 9000 femmes par an et présente des risques de récidive importants. En ce mois d’Octobre rose, et à l’aune de cette année très éprouvante, elle revient sur sa vie de mère et de femme.

Il y a tout juste un an, la vie d’Émilie Daudin basculait. Après des mois de mauvais diagnostics, le verdict tombait le 1er octobre 2020 : cette influenceuse, mère de deux enfants, apprenait son cancer du sein triple négatif. Une forme plus rare – il représente environ 15% à 20% des cancers du sein chaque année soit 9000 personnes – mais aussi plus agressive. Car le «TN», qui touche surtout des femmes de moins de 40 ans, est difficile à traiter et présente des risques de récidive important durant les trois premières années. À tout juste 33 ans, cette entrepreneuse rouennaise, alias @emiliebrunette sur les réseaux sociaux, allait devoir mener ce combat inimaginable, tout en restant une mère présente pour ses deux enfants, Gustave et Pernille, âgés de 3 ans et 18 mois.

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Quand le verdict tombe, Émilie et son mari décident très vite de le dire à leur famille et à leurs proches. Par besoin de soutien face à cette terrible épreuve, mais aussi parce que la jeune femme n’aime pas cacher les choses. Alors qu’elle ne l’a pas encore dit à ses enfants, elle se rend compte que ces derniers, qui dormaient très bien jusque-là, se mettent à se réveiller la nuit et à faire des cauchemars. Elle leur explique alors que leur maman est malade, sans rentrer dans le détail du cancer. Elle les sent s’apaiser immédiatement, grâce à ses mots. Elle achète des livres aussi pour son aîné, pour verbaliser sa maladie simplement, notamment Maman est une pirate (1), qui explique ce qu’est un cancer avec des mots adaptés aux enfants.

«Il n’y a rien de pire que de leur cacher des choses et de voir ressurgir des années plus tard des secrets de famille. D’ailleurs Gustave savait depuis le début que j’avais une boule au sein, je lui avais dit quand il m’avait donné un coup. J’ai tout de suite voulu leur expliquer, pour qu’ils comprennent la situation et aussi pour les rassurer», souligne aujourd’hui l’auteure de Liberté, égalité, maternité (2), comme elle l’expliquait en février dans une interview sur le blog Parlons maman*.

L’influenceuse rouennaise a été diagnostiquée d’un cancer du sein triple négatif en octobre 2020.

Une fois les mots posés sur l’état de santé de leur maman, Gustave et Pernille ont accepté la situation et vécu ces derniers mois normalement. «Le fait que je sois chauve n’a pas été un sujet pour eux par exemple, ça les a même fait rire», note Émilie. Il a fallu faire preuve d’un peu plus de pédagogie sur sa cicatrice après sa mastectomie. «Mon fils ne voulait plus me faire de câlins au début, j’avoue que ça m’a fait un coup. Mais ensuite quand je lui ai montré simplement, ça l’a rassuré. Ma fille, elle, rigolait toujours, ça m’a beaucoup aidé à tenir… »

Dans le podcast Pow[her] qu’elle a cofondé avec son amie Émilie Le Guiniec et dont elle vient de consacrer un épisode à sa maladie, elle explique aussi avoir beaucoup «dédramatisé» avec eux. «Ils ont été incroyablement forts. Leur mère, elle n’a pas de cancer, explique-t-elle avec beaucoup d’émotion. Les enfants vont très très bien, ils ne sont pas perturbés et dorment très bien. Ils sont équilibrés.»

« Cet été je voulais que mes enfants se rapprochent de leur papa, au cas où… »

Alors qu’elle est en rémission aujourd’hui, la trentenaire reconnaît toutefois que le plus difficile pour elle est de penser qu’elle pourrait les laisser orphelins. «Si j’arrive à vivre avec l’idée de la mort, je n’arrive pas à passer ce cap pour mes enfants», confie-t-elle.

Une pensée qui l’a habitée ces derniers mois et sur laquelle elle s’était confiée dans son podcast Triple négatif, le 12 avril dernier : «Il y a des jours qui sont plus difficiles que d’autres, aujourd’hui c’est un jour sans. J’ai pris une petite claque en traversant la cour de récré de mon fils […] Ce qui était difficile c’était de me dire « si ça se trouve je ne verrai même pas mes enfants rentrer à l’école élémentaire » et je me suis dit « c’est pas du tout ce qu’on prévoit de faire quand on fait des enfants ». On ne prévoit pas qu’on va les quitter très tôt et c’est une pensée qui est difficile», expliquait-elle, en larmes.

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«Je ne suis pas une maman très fusionnelle, j’aime les laisser vivre leur vie même si on se fait plein de câlins, mais cet été je voulais qu’ils se rapprochent de leur papa au cas où… Notamment ma fille qui est collée à moi depuis sa naissance», raconte aujourd’hui Émilie.

Pour ne pas se laisser submerger par ses émotions, la trentenaire s’est aussi battue contre son cancer en ne lui laissant que peu de place dans sa vie. «On en parle peu avec mon mari, je ne voulais pas qu’il envahisse notre maison et la vie de nos enfants. J’ai eu des journées creuses bien sûr, mais ça ne durait pas car je ne voulais pas vivre « cancer » tout le temps. Je voulais maintenir ma vie, qu’elle soit normale», avoue-t-elle, reconnaissant qu’avec ses enfants à l’école et à la crèche, elle avait eu du temps pour elle dans la journée, pour se préserver. «Et j’ai réussi puisqu’aujourd’hui, j’oublie parfois que j’ai un cancer, en zappant mes médicaments ou mes rendez-vous médicaux !»

* Parlons Maman, un blog dédié aux maternités, à la parentalité au sens large, de la grossesse à la petite enfance.

(1) Ma maman est une pirate, Karine Surugue, Éd. Gautier Languereau, 32p., 10,95 euros.
(2) Liberté, égalité, maternité, Émilie Daudin, Éd. Leduc.s Pratiques, 191p., 19 euros.

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