Se bouger est probablement la dernière chose dont on rêve quand on broie du noir. Pourtant, à en croire le Dr Martine Duclos, endocrinologue et physiologiste, le sport constitue probablement le meilleur geste de secours en cas de déprime : « Chez des sujets anxieux ou stressés, l’activité physique régulière procure les mêmes bénéfices que les anxiolytiques, sans les effets secondaires et l’accoutumance ; elle apporte aussi une action similaire à celle des antidépresseurs chez des sujets souffrant de dépression légère à modérée », affirme la chef du service de Médecine du sport aux CHU Gabriel-Montpied et Estaing (Clermont-Ferrand).

Autres conclusions parlantes des dernières études : associer les antidépresseurs à l’activité physique s’avère plus efficace que la seule prescription chimique ; le sport atténue aussi les effets secondaires des antidépresseurs. Et pour cause : il induit, sur la durée, un changement neurologique profond.

Un prozac naturel qui améliore le sommeil et l’humeur.

Des hormones « feel good » à gogo. « Ca brasse côté corps mais aussi côté cerveau ! Pratiqués pendant trente minutes, les disciplines de cardio favorisent la production d’endorphines, molécules du bien-être par excellence. Dans la foulée, l’effet récompense est sensible au niveau des zones cérébrales liées au plaisir », explique Martine Duclos.

Le sport induit aussi une sécrétion de neuromédiateurs impliqués dans la dépression quand ils sont en carence, sérotonine en tête. Quant à l’adrénaline, elle contribue à sa manière à l’effet antidépresseur : « Elle est déclenchée à la fois par l’activité physique et par le stress. Quand on fait du sport, on s’entraîne au stress. Or, plus on est résistant au stress, moins on risque de basculer dans la dépression », décrit la médecin.

Autres réactions en chaîne positives: les neurones se multiplient, en particulier ceux impliqués dans le thymus, une glande qui gère l’humeur. La micro vascularisation cérébrale est boostée. Sur le reste du cortex, la durée de vie des synapses – connexions neuronales – est augmentée.

La forme appelle la forme. Le sport diminue le taux de cortisone – l’hormone du stress – et ses méfaits tout en augmentant la production de testostérone, menant à une sensation de puissance très agréable.  Essoufflement en baisse, effacement des douleurs… on est moins fatigué et moins fatigable : la lassitude physique est souvent psychologique.

La pratiquante entre dans le cercle vertueux de la forme qui appelle la forme. ‘Certes, ce n’est pas le remède miracle en cas de drame absolu (la perte d’un être cher, par exemple) ou dans des conditions psychiatriques qui induisent des dépressions majeures, mais cela aide fortement à la reconstruction une fois la pathologie ou le traumatisme soignés », nuance Martine Duclos.

Bousculer notre inertie. Pour la pro, nul besoin d’effort démesuré ou d’esprit de compétition. Marcher une demi-heure par jour, prendre les escaliers, faire du vélo… Le simple fait de bousculer notre inertie a des effets immédiats sur la santé mentale. « On le sent sur le plan psychique mais aussi social car l’activité se pratique souvent en groupe, entre copines, et à l’extérieur. Il faut prendre soin de nous », décrit la médecin.

Autres bénéfices à la clé : une nette amélioration de l’image de soi. « Le renforcement du « core », ou gainage de la ceinture abdominale, redresse notre posture, ce qui a un effet direct sur l’humeur et l’apparence physique », pointe Hazel Gale, championne de kickboxing.

La Britannique raconte dans le livre Fight ! (éditions Belfond, L’Esprit d’Ouverture) son parcours atypique, son burn-out et une totale reconstruction via le sport et une technique qu’elle a mise en point, entre hypnothérapie cognitive et auto analyse.

« Une étude réalisée par la Harvard T.H. Chan School of Public Health affirme que courir 15 minutes ou marcher une heure par jour réduit le risque de dépression de 26% », illustre l’athlète. L’émission d’endorphines aide à transformer les états négatifs, améliore la mémoire et aiguise la pensée. L’exercice permet d’installer des processus de réflexion et des habitudes de comportements plus positifs. 

« Le fait de se concentrer sur le moment, à savoir l’expérience physique, peut être assimilée à la méditation de pleine conscience. Elle aide certainement à lâcher prise et à retrouver l’instant présent », complète-t-elle.

Un changement de corps et d’esprit

Y aller malgré le manque d’envie, continuer en dépit de la douleur ou de la fatigue… les émotions ressenties durant la pratique se répercutent dans les réactions au quotidien, avec une combativité qui s’affirme. A en croire Martine Duclos, on devient plus endurante mentalement et émotionnellement. Ce que les Anglo-saxons appellent le « coping » : ou la capacité à faire face.

Pour cela, mieux vaut faire du sport régulièrement, soit au minimum trois jours par semaine, idéalement un jour sur deux, ou, mieux, cinq jours par semaine. « Compter trente minutes par séance, pas forcément en continu », complète la médecin. Premier signe d’une pratique efficace : un meilleur sommeil. A contrario, les insomnies sont l’un des premiers signaux d’un sur entrainement : l’exercice très intense peut être contre productif, surtout en cas d’états anxieux.

« Préférez alors l’endurance modérée, ou une marche dans la nature », propose Martine Duclos. “Attention aux profils instables qui aimeraient redresser la barre grâce au sport”, abonde Hazel Gale. L’athlète appelle à éviter de mettre le focus sur les résultats ou des objectifs excessifs pour se concentrer sur le plaisir de la pratique. « Commencez petit et construisez à partir de cela. »

Trouver le sport qui nous correspond. Le choix de la pratique juste est essentiel. « En marche rapide, on peut se challenger sur du plat ou des montées tout en respirant la beauté de la nature ; en salle, il est possible d’alterner crossfit et Pilates. En boxe, il y a le combat mais il y a aussi la technique. L’aviron, c’est dur, mais le plaisir de la glisse et la force de l’équipe vous tire vers le haut… », décrit Martine Duclos qui appelle chacune à moduler sa pratique en fonction de l’humeur, l’envie, la météo.

Vous ne faites pas de cardio ? Compensez par la durée ! Le plaisir reste le véritable moteur pour persister et progresser. Même credo chez Hazel Gale, qui invite à tester plusieurs disciplines, différents centres, et à « réfléchir au style de personnes et d’environnements que vous avez vraiment envie de fréquenter ». Êtes vous plutôt gym en musique à fond ou yoga et encens? « Les bienfaits potentiels d’une activité qui nous convient méritent qu’on prenne le temps de la trouver. »

Les 5 sports anti-déprime du moment

  • L’escalade de bloc

La discipline : en plein essor, elle se pratique en salle, sur des blocs – jusqu’à 5 m de hauteur, sans corde, ni harnais. En 20 ans, matériel, équipements et salles ont évolués de manière extraordinaire, simplifiant considérablement la pratique.

Ça travaille quoi ? Physiquement, elle améliore l’équilibre et la coordination, développe une musculation complète, toute en longueur et en finesse. Psychologiquement, cette voie de travail sur soi instaure un combat permanent avec nos peurs, nos limites intérieures. Elle exige concentration et objectivation du danger. On est sans cesse en dehors de nos zones de confort.

Pas de triche face au mur ! Jordane Legleye, moniteur au centre Arkose Nation, recommande 1 à 3 cours en initiation, pour acquérir les règles d’utilisation de l’espace et les techniques de base  car « évoluer sur un support vertical n’a rien de naturel pour l’être humain ». La réussite d’une ascension se joue à une somme de détails infimes. Position d’un doigt, orientation du pied, relâchement, respiration… la progression est toujours possible. A partir d’un certain niveau, il faut parfois booster sa puissance musculaire pour tenir des prises.

Centre : repérez l’un des nombreux blocparks de France, comme les centres Blockout ou Arkose. A Paris, Arkose Nation est un lieu urbain design et convivial avec bar-restaurant, studio yoga&Pilates, zone enfants – www.arkose.com

  • La boxe anglaise

La discipline : dans ce sport de combat où deux adversaires s’affrontent à coups de poing, les coups sont portés au visage et sur le corps avec des gants homologués, au dessus de la ceinture. Le « noble art » (premier nom donné à la boxe anglaise) « met notre destin entre nos mains », comme le dit joliment JeanYves Davison, vice-champion du monde de Kick Boxing, qui consacre ce sport dans son centre parisien Le Noble Art Club.

Ça travaille quoi ? Elle enseigne à se défendre, développe le mental et une réponse musculaire différente. « On travaille l’acquisition d’un muscle long, dense, explosif grâce une préparation physique exclusive, sans machines, qui utilise le poids du corps », décrit Jean-Yves Davidson.

Le + : « Pendant le premier cours d’essai, on évalue condition physique, motivation, rapport au sport, blessures invisibles, psychologie. Certaines arrivent avec des colères, des peurs. On explique à chacun où l’on souhaite l’emmener, avec un programme global – Stretching, yoga, renforcement musculaire, nutrition- et l’accompagnement de l’un de nos dix coachs. Nous avons des sensibilités et des approches différentes. Une association par affinité donne de meilleurs résultats. Les gens se dépassent souvent pour quelqu’un ; cela leur donne la force de venir quand ils sont fatigués. »

Centre : Noble Art Club – www.nobleartclub.fr

  • Le Yoga Pilates Mix

Discipline : ce yoga nouvelle génération propose le meilleur de la technique vinyasa (flow, souffle, coordination, attention, dynamisme) et du Pilates (enracinement, alignement, renforcement des muscles profonds). Pour l’enseignant Pema Aglossi qui l’a mis en place, on n’invente rien : « il n’y a qu’un yoga, pratiqué depuis des millénaires, que l’on adapte au fil des contextes. La créativité s’exprime par exemple dans l’enchainement des postures. En l’occurrence, j’ai mis au point le yoga pilates mix pour que les pratiquants ne s’ennuient pas. »  Sur le modèle du Vinyasa, le souffle et l’enchainement fluide, plus ou moins rapide, des postures sont synchronisés. Des exercices de Pilates sont intégrés.

Ça travaille quoi ? A la fois doux et tonique, il renforce les muscles profonds sans risque de se blesser. Commencer soft (un cours par semaine), puis passer à deux quand on se sent prête.

Centre : Tigre Marais. La jeune antenne du Tigre Yoga Club propose toutes les nuances de yoga traditionnels dans un lieu sous influence nature et feng shui – www.marais.tigre-yoga.com

  • Le Handstand

Discipline : ce travail d’équilibre est issu de l’univers du cirque, de la gymnastique et dans une moindre mesure, du yoga. Sa pratique a été démocratisée par l’essor du Street Work Out et des réseaux sociaux. Les posts d’influenceurs et professeurs de yoga ont fédéré un public de niche, qui, au delà de l’esthétisme, l’utilisent pour mieux contrôler leur corps. 

Après 15 minutes d’échauffement – poignets, colonne vertébrale et épaules, on approche les sensations de l’équilibre sur la tête et sur les avant bras. Ce qui est acquis sur la tête se transfère facilement sur les mains. Une fois la technique acquise, il faut s’entrainer. Idéalement, en pratiquant aussi chez soi, pour habituer le cerveau à appréhender les schémas moteurs la tête en bas.

Ça travaille quoi ? comme toutes les postures inversées, il améliore l’équilibre et le gainage, développe la confiance et booste l’énergie globale. Pas besoin d’être musclé pour y arriver. Certains grands sportifs l’approchent en force mais sans le bon alignement, indispensable. « D’autres n’ont jamais fait de sport  mais dès que je les place, ils intègrent la sensation et c’est parti ! », raconte Luca Scollo, qui enseigne la discipline. Compter entre deux et quatre mois pour commencer à maîtriser.

Le centre : Dans l’Est Parisien, la Montgolfière occupe une ancienne usine de montgolfières, d’où la hauteur de plafond sous verrière : 18 mètres ! A la fois salle de sport, « social club » et galerie d’art, elle s’articule entre un rez-de-chaussée lumineux et « loungy » pour prendre un verre ou écouter un débat et un plateau sportif dernier cri à l’étage – www.lamontgolfiereclub.com

  • Le vélo 

La discipline : Avec la natation, c’est le seul sport dit « en décharge ». Traduisez : il permet un travail cardiaque sans impact sur les articulations. En bref, pédaler n’offre que les avantages du cardio : renforcement du muscle cardiaque, prévention des maladies cardio-vasculaires, diminution de l’hypertension et cholestérol… et production des « happy hormones » à gogo !

Ça travaille quoi ? Côté biomécanique, la pratique garantit un renforcement musculaire et ligamentaire tout en assurant la bonne lubrification des hanches mais surtout des genoux, via l’alternance de flexions-extensions. D’après l’ostéopathe Alexandre Gorecki, « elle assure irrigation sanguine, drainage articulaire et afflux de substances bénéfiques : plus les articulations sont utilisées, plus elles fonctionnent bien ; même les cervicales en profitent ». Pour accroitre la vigilance, les champs visuel et auditif s’ouvrent ; trouver l’équilibre requiert une mobilisation de l’oreille interne … tout cela concourt à atténuer les raideur ou arthrose cervicales.

Le + : il est ultra pratique ! Pas d’horaires, coût zéro une fois l’équipement acheté – et sur le Bon Coin, c’est très accessible… rien de plus souple que le deux-roues

Feuille de route ? Pour les débutantes, une demi-heure (soit 15 minutes aller-retour), trois fois par semaine. Progressivement, prolongez vos temps le week-end : vous pousserez bientôt jusqu’à 100 km en deux jours. 

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