À l’heure où l’on évoque une possible réouverture des restaurants le 15 juin, les restaurat.eurs.rices sont dans une situation catastrophique et multiplient les appels à l’aide.
Leurs voix se font plus fortes depuis quelques jours. Les restaurat.eurs.rices sont aux abois : ils ne rouvriront pas le 11 mai. On évoque des dates, on parle ici et là d’une réouverture partielle avant juillet. Ailleurs on entend que c’est impensable avant juillet et que la saison d’été sera sacrifiée.
Les salariés sont au chômage partiel. Ceux qui n’ont pas de trésorerie ne s’en relèveront pas et ceux qui en ont mettront un temps fou à remonter la pente. Les appels à l’aide de la profession se multiplient. On a entendu Régis Marcon, chef trois étoiles à Saint Bonnet Le Froid, en Haute-Loire, demander la suppression des charges, Philippe Etchebest milite pour la prise en charge par l’Etat d’une partie des pertes d’exploitation. On évoque aussi une baisse de TVA.
Une pétition pour une prise en charge des pertes par les assurances
Certains, comme le restaurateur parisien Stéphane Manigold, vont jusqu’à assigner leur compagnie d’assurance en justice. L’attitude des assurances, justement, qui à quelques exceptions près, ont annoncé s’opposer à la prise en charge des pertes subies par les restaurants, est précisément ce qui a poussé Stéphane Jégo (L’Ami Jean, Paris VIIe) à se mobiliser, parmi les premiers. Il milite, entre autres choses, pour la création par les assurances d’un fonds dédié à la perte d’exploitation et à la prise en charge du différentiel des salaires. Sa pétition sur change.org a déjà recueilli plus de 130 000 signatures.
Hélène Darroze (Marsan, Jòia), a été l’une des premières à le soutenir. « Je ne sais pas comment on va faire… Tout dépendra aussi des conditions du déconfinement. Qui aura envie de dîner dans des restaurants vidés de la moitié de leurs tables, à un mètre de distance de son partenaire, de porter un masque, d’être servi par un personnel également masqué ? Si nous rouvrons dans ces conditions, nous courons à la faillite. »
Qui aura envie de dîner dans des restaurants vidés de la moitié de leurs tables, à un mètre de distance de son partenaire, de porter un masque…
Hélène Darroze milite pour l’abandon total des charges tout en sachant que ce ne sera pas suffisant. « Tant de paramètres, tant de questions sont à aborder : quelle pression l’Etat mettra-t-il sur les bailleurs ? Sur les assurances ? Et les banques ? Actuellement elles prêtent à taux favorable mais si dans un an il faut renégocier ? »
Hélène Darroze a massivement investi dans ses restaurants parisiens depuis un an et demi, elle est inquiète mais se sait chanceuse : outre ses restaurants elle est salariée en tant que chef du restaurant du prestigieux hôtel The Connaught à Londres. Quel avenir pour les restaurateurs plus fragiles ?
« Mes cinq employés sont au chômage, moi ça fait deux mois que je ne me paye pas… »
Mahéva Angelmann Piazza est à la tête à Marseille de la Pizzeria La Bonne Mère. Une adresse mouchoir de poche où l’on sert le must de la pizza. Un travail de la main, des produits italiens bio, AOP, ultra bien sourcés, pour des pizzas à prix doux mais à coût de revient élevé. Mahéva est « sous le choc et dégoûtée ». Les assurances ne lui répondent pas. Elle attend le remboursement de ce qu’elle a avancé et qu’elle ne voit pas venir.
« Mes cinq employés sont au chômage, moi ça fait deux mois que je ne me paye pas… et que je ne peux pas payer le loyer. Il faut supprimer les charges que de toute façon on ne pourra pas payer. » Elle appelle à une union de tous les restaurateurs pour faire pression sur le gouvernement.
Le déconfinement, comment le voit-elle ? « Je vais bien sûr faire de la vente à emporter dès le 12 mai, car mon métier c’est de nourrir. Que vont manger ceux qui reprennent le travail sinon ? Mais Marseille n’est pas Paris, nous n’avons pas les mêmes moyens, nous vivons tous à crédit ici. » Elle se pose aussi la question de ce qu’est un restaurant : « je ne ne fais pas ce métier pour devenir riche, j’ai cinq tables à La Bonne Mère, je ne suis riche que des rencontres qui se nouent autour d’une table, avec les clients. Alors faire de la vente à emporter ou servir avec un masque des clients masqués, ce n’est pas mon idée du restaurant. »
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