En France, près d’une femme sur dix est atteinte d’endométriose. Grâce à une prise en charge pluridisciplinaire, les douleurs de cette maladie chronique liée aux règles peuvent toutefois être soulagées comme nous l’expliquent le gynécologue Sylvain Tassy et la naturopathe Stéphanie Mezerai.
« Le chemin est long et semé d’épisodes éprouvants. L’impact de cette maladie sur ma vie est évidemment lourd : serrer les dents pour aller travailler quand j’ai mal au ventre et que je suis très fatiguée, voir mon mari impuissant face à mes douleurs, et ne pas pouvoir programmer mes sorties avec mes amies car je ne sais pas toujours dans quel état je serai la semaine suivante … » Comme Sylvia, qui confiait à ELLE son témoignage sur son quotidien avec l’endométriose, des millions de femmes en France sont atteintes de cette maladie inflammatoire chronique qui se caractérise par la présence de tissu endométrial en dehors de la cavité utérine. Complexe, la maladie peut prendre plusieurs formes et les douleurs liées à l’endométriose peuvent être très diverses d’une femme à l’autre. Toutefois, un tabou reste à combattre quels que soient les cas : avoir mal pendant ses règles, ce n’est pas normal. Une idée répétée chaque jour par Sylvain Tassy, gynécologue et membre du comité scientifique de l’association EndoFrance et Stéphanie Mezerai, naturopathe, co-autrice du livre « Comment soulager l’endométriose sans médicaments ».
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Peut-on guérir de l’endométriose ?
Si la prévention autour de l’endométriose s’est intensifiée ces dernières années, grâce notamment au travail des associations, il n’existe à ce jour, aucun traitement définitif pour en guérir. Principalement car les causes et les mécanismes de la maladie restent très mal connus. Néanmoins, plusieurs solutions médicales, chirurgicales ou naturelles existent désormais pour soulager les douleurs liées à l’endométriose et améliorer la qualité de vie des femmes qui souffrent de la maladie. « Une patiente qui est écoutée et prise en charge par une équipe pluridisciplinaire, qui suit un traitement hormonal ou a recours à une opération chirurgicale, qui s’applique à suivre une bonne diététique et pratique une activité physique douce régulière, voit sa qualité de vie s’améliorer dans 92% de cas. Ce n’est pas parfait mais les douleurs ne sont pas une fatalité », insiste Sylvain Tassy.
Des traitements hormonaux pour empêcher les règles
Parmi les solutions énoncées par le gynécologue spécialisé en endométriose, figurent en premier lieu les traitements hormonaux. Cela peut consister dans un premier temps à prescrire une contraception en continu. « En général, on privilégie des pilules qui bloquent les règles car c’est souvent à ce moment que les patientes ont le plus mal, même si ce n’est pas systématique. Ensuite, c’est du cas par cas. ll n’y a pas de bonne ou de mauvaise pilule. Il faut faire plusieurs essais en fonction des antécédents de la patiente, de ses facteurs de risques cardio-vasculaires, de ce qu’elle a déjà essayé auparavant etc. » Pour soulager les douleurs pelviennes, Sylvain Tassy évoque également le Diénogest. « Ce n’est pas à proprement parler une pilule, mais un médicament créé spécifiquement pour l’endométriose. »
Lorsqu’une contraception hormonale ne suffit pas à soulager les douleurs, des analogues de la Gn-RH peuvent être mis en place. Il s’agit d’injections qui mettent le cycle de fertilité des femmes dans un état de ménopause artificielle. « S’ils ont été beaucoup utilisés par le passé, on est désormais plus prudents avec ces médicaments. On les utilise avec parcimonie et à bon escient car ils ont des effets secondaires importants et une toxicité pour l’organisme », indique le gynécologue.
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Le traitement chirurgical en dernier recours
Quand aucune solution médicale n’offre une meilleure qualité de vie, un traitement chirurgical peut être envisagé en accord avec l’équipe médicale. « Dans la grande majorité des cas, on commence par une cœlioscopie. On va envoyer une caméra dans le nombril sous anesthésie générale et on va regarder ce qu’il se passe pour faire un bilan des lésions : où est-ce qu’il y en a, quelle est leur taille, est-ce qu’elles sont très inflammatoires etc. En fonction, on va nettoyer l’endométriose en retirant le tissu endométrial égaré à l’aide de lasers, ciseaux et autres petits instruments », explique Sylvain Tassy avant de préciser : « C’est une chirurgie pointue et compliquée. Elle doit être réalisée par des personnes ultraspécialisées. »
Les aliments à favoriser et ceux à éviter
Selon le type d’endométriose, il arrive que certaines femmes arrivent à diminuer les douleurs liées à la maladie grâce à des alternatives naturelles. Ces solutions peuvent également être mises en place en parallèle d’un traitement hormonal ou d’une chirurgie. Dans tous les cas, leurs bénéfices restent dépendants des efforts accomplis par les femmes. « Il n’y a pas de miracles », prévient Stéphanie Mezerai.
Dans un premier temps, la naturopathe explique qu’un travail sur l’alimentation peut être extrêmement bénéfique. « En règle générale, les femmes qui réduisent leur consommation de produits qui contiennent du lait de vache, voient leur qualité de vie s’améliorer. Le sucre, la nourriture industrielle et les fast-foods sont également à éviter. En choisissant des produits le moins transformé possible, en cuisinant avec de bonnes huiles, riches en oméga-3, en réduisant sa consommation de viande rouge et en favorisant les végétaux, les douleurs doivent nettement diminuer », détaille Stéphanie Mezerai. « Après, il y a des produits qu’il faut tester. Je conseille aux femmes qui viennent me consulter de tenir un carnet alimentaire pour noter leurs observations et ajuster leur routine alimentaire. C’est comme ça que certaines se sont aperçues que leur qualité de vie s’améliorait lorsqu’elles supprimaient les oranges. Pour d’autres, cela n’avait aucun effet. »
Exploiter le potentiel des plantes
En parallèle d’une alimentation saine et équilibrée, la naturopathe conseille certaines plantes. « Les plantes que l’on peut recommander varient d’une femme à une autre. Il faut s’adapter selon les douleurs et la problématique du moment. Souvent, on essaie de proposer des plantes qui contiennent de la progestérone, pour éviter d’ajouter des œstrogènes qui aggravent la maladie et donc, les douleurs. » Parmi celles régulièrement utilisées, Stéphanie Mezerai cite notamment le bourgeon de framboisier, l’achillée millefeuille ou encore l’alchémille.
Pratiquer une activité physique douce
Quand les règles arrivent, on est davantage tenté de se blottir dans son canapé avec une bouillotte et un plaid, que l’on souffre d’endométriose ou non. Pourtant, les deux spécialistes invitent à dépasser la douleur et incitent les femmes à reprendre petit à petit une activité physique douce. « Moins on bouge et plus on va être dans la douleur » alerte Stéphanie Mezerai. « Le sport sécrète des endorphines, ce sont de très bons anti-douleurs. Très souvent, les femmes finissent par s’apercevoir qu’elles ont plus de bénéfices à faire du sport qu’à ne pas en faire. » « En faisant du yoga par exemple, les patientes vont assouplir leur pelvis et leurs articulations. C’est bénéfique car on sait que l’une des problématiques de l’endométriose est que les femmes deviennent moins souples », ajoute Sylvain Tassy. Stéphanie Mezerai conseille de pratiquer le yoga avec un professionnel dans un premier temps, pour adapter les exercices à leur problématique. « Il y a des femmes qui ont des adhérences à des endroits et ça peut être plus douloureux. Ça peut être bien de passer chez un ostéopathe avant également pour faire un bilan et s’assouplir avant de recommencer une activité. »
La méthode Pilates et la marche à pied sont également des activités recommandées par Stéphanie Mezerai. « Ce qui compte, ce n’est pas la quantité mais la qualité. Il vaut mieux marcher sur des petits temps, mais régulièrement. On peut aussi rejoindre des groupes pour se motiver. Ensuite, il faut y aller à son rythme », conseille la naturopathe. Elle explique également que reprendre une activité physique permet aux femmes d’être mieux dans leur tête et de se réapproprier leur corps, qui a parfois subi plusieurs opérations. « Les bienfaits d’une alimentation anti-endométriose, du kiné ou encore d’une activité physique régulière en assouplissement ont été reconnus scientifiquement. Ce n’est pas une vue de l’esprit. Ce sont des choses dont on a prouvé qu’elles étaient bénéfiques pour les patientes », affirme le gynécologue Sylvain Tassy.
Le CBD, nouvel allié ?
Dans cette liste de remèdes non-exhaustive, un petit nouveau tend à se démocratiser. En huile, par pulvérisation ou encore en suppositoires vaginaux (pas encore disponibles en France), plusieurs femmes constatent une amélioration de leurs douleurs en utilisant du cannabis thérapeutique. « Les cannabinoïdes du CBD vont inhiber les messages de la douleur envoyés au cerveau. Au niveau de l’inflammation, ils vont réguler la production de ce que l’on appelle cytokines inflammatoires », précise Stéphanie Mezerai. « Tant que la qualité de vie des femmes est respectée et qu’elles ont moins mal, tant mieux ! », conclut Sylvain Tassy.
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