Boostées par la technologie, les chirurgies réparatrice et esthétique progressent à pas de géant. La première, en s’employant à suppléer le corps humain, la seconde en allégeant ses protocoles opératoires.

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Qu’elle soit esthétique ou réparatrice, la chirurgie plastique est à l’aube de plusieurs révolutions. Des avancées rendues possibles par l’apport de matériaux et de dispositifs ultrafuturistes, le perfectionnement des techniques employées pendant les interventions et une meilleure information en amont du patient. Explications.

Chirurgie réparatrice : bientôt un nez de substitution ?

En chirurgie reconstructrice, le premier défi concerne la fabrication de substituts synthétiques, tolérés par l’organisme et bioactifs, aptes à compenser les pertes et destructions de l’os et à stimuler sa régénération en lui apportant certains composés. À l’heure actuelle, on sait déjà mettre au point et poser sans effet secondaire majeur des implants en céramique de phosphore ou en polymère pour recomposer des tibias, vertèbres, articulations de hanche, segments de mâchoire, d’oreille interne, de boîte crânienne, de planchers orbitaire et maxillaire. Mais la mission s’avère plus délicate lorsqu’on touche au visage, notamment à la zone du nez. Certains des supports testés durant les dernières décennies, comme le titane, ont provoqué des défauts de circulation sanguine, des nécroses de la peau et des muqueuses, et ont été fréquemment « colonisés » par des germes. Les chercheurs s’emploient donc à trouver la fibre à tolérance optimale pour cet organe. Cela sera peut-être la mousse de bioverre, sur laquelle planche le Laboratoire de physique de Clermont-Ferrand. Sa composition poreuse semble faciliter les échanges, notamment cellulaires, avec les structures osseuses du corps humain, qui ne la perçoit donc pas comme un élément étranger. Si on la compare aux substituts les plus utilisés actuellement (d’origine bovine), elle permet une régénération osseuse deux fois plus importante. Les débuts de sa commercialisation sont prévus dans le courant de l’année 2022.

Une peau de remplacement pour les grands brûlés

Mais il existe un objectif plus complexe encore pour les médecins : créer une peau dont les propriétés physiologiques seraient similaires à celles de l’homme, reproduisant sa vascularisation sanguine, son architecture pileuse et intégrant des glandes sébacées et sudoripares. « L’idée, c’est de trouver un tissu biocompatible qui ne nécessite pas d’empiéter sur le capital cutané », estime la Dre Sylvie Poignonec. C’est vers ce but que tend le programme Genesis, mis en place en avril dernier par le groupe français Urgo Medical, en partenariat avec le laboratoire de l’AFM-Téléthon, l’établissement français du sang, Dassault Systèmes et l’université Claude-Bernard, à Lyon. À terme, le produit en voie d’élaboration rendrait envisageable la reconstitution intégrale de l’épiderme des personnes porteuses de plaies très sévères ou grandes brûlées, chez qui l’autogreffe ou la culture de peau in vitro ne sont pas suffisantes ou appropriées. Il pourrait voir le jour à l’horizon 2030.

Chirurgie esthétique : des résultats visibles avant l’opération

La chirurgie esthétique, même si elle ne répond pas à des besoins vitaux, est elle aussi en quête constante d’innovation. L’une des grandes questions à l’étude a trait aux procédés qui permettent aux patients d’anticiper le résultat de l’intervention qu’ils vont subir. Ainsi, le principe qui consiste à recourir à une impression en 3D pour façonner une sorte de maquette, à taille réelle, de l’aspect qu’aura in fine la zone traitée devrait progressivement se démocratiser. Il deviendra également de plus en plus fréquent que cette même formule de moulage en 3D serve à l’équipe médicale, avant l’intervention, à étudier la partie du corps sur laquelle elle va travailler afin de « répéter » les procédures à effectuer. Déjà à l’essai dans la clinique spécialisée Villa Sant’Apollonia, à Bergame, en Italie, elle raccourcit le temps d’opération et donc d’anesthésie de 10 à 15 % !

Outre ces modélisations plus vraies que natures, on bénéficiera également de logiciels de simulation d’une qualité supérieure aux dispositifs 3D qui existent aujourd’hui. En 4D et en réalité augmentée, ces appareils de prévisualisation à 360 degrés donnent une impression identique à celle que l’on ressent lorsqu’on se regarde dans un miroir ; on y a recours pour l’instant dans le cadre d’interventions comme la pose de prothèses mammaires, la réduction ou le lifting de la poitrine, mais ils devraient prochainement servir aussi à la chirurgie du visage. Demain, on sera donc mieux averti de ce que le scalpel nous réserve…

Des cicatrices bientôt invisibles

Autre innovation à l’œuvre, l’assistance robotique, qui a déjà révolutionné les chirurgies vasculaire, digestive et oncologique. Elle investit maintenant la chirurgie esthétique. L’automatisation limitera les incisions faites dans la peau, voire les évitera, et rendra les suites opératoires plus légères. Les cicatrices deviendront peu à peu presque invisibles. Et l’ultraminiaturisation des accessoires chirurgicaux va encore contribuer à minorer ces dernières… La tendance que l’on observe avec l’arrivée récente du piézotome, une micro-scie génératrice d’ultrasons, devrait donc se généraliser. « C’est un outil qui a été utilisé au départ par les dentistes. Là, il permet de réaliser une rhinoplastie préservatrice, c’est-à-dire de remanier le nez sans tout casser au marteau et au burin comme on le faisait avant. Or, comme dans le cas du piézotome, d’autres petits instruments motorisés sont en cours de développement », détaille notre expert. Pour limiter les marques cutanées résiduelles, la science tente également de concevoir des sutures d’un genre inédit. « À la place des fils, on peut imaginer un système de fixation musculaire interne, comme des clips », précise la spécialiste.

Moins d’interventions, plus d’injections

Parce qu’ils connaissent les risques inhérents à toute intervention (anesthésiques notamment), les chirurgiens préfèrent actuellement se tourner, dès que possible, vers les solutions de médecine esthétique. Déjà très installée aujourd’hui, cette tendance va se renforcer et rendra complètement « hybride » la profession. Dans cette évolution, celles et ceux qui l’exercent pourront bientôt compter sur la machine Lena, qui est pour l’instant à l’état de prototype. Imaginée par la société NetxMotion, qui la teste à l’hôpital Henri-Mondor à Créteil, elle établit une cartographie du visage à partir d’images envoyées par la caméra d’un smartphone. Grâce à un bras articulé, elle procède à des injections de toxine botulique aux endroits précis qu’elle a prédéterminés lors de son analyse, et s’arrête à la moindre détection d’un mouvement anormal. Enfin, les lasers (tel le Renuvion, un dispositif fraîchement installé dans les cabinets, qui mise sur la radiofréquence et le gaz hélium) vont être, chez ces praticiens, de plus en plus souvent préférés aux traditionnels liftings et liposuccions pour traiter le relâchement cutané.

Aucun doute, la révolution esthétique est en marche. Et si elle profitera d’abord aux personnes qui ont un besoin médical de ces techniques de réparation, elle aidera également ceux qui veulent améliorer leur image. Demain tous opérés ?

Merci à notre experte, Dre Sylvie Poignonec, chirurgienne esthétique et membre du comité directeur de la Sofcep (Société française des chirurgiens esthétiques plasticiens).

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