• Depuis quelques années, les comédies qui détournent les codes des séries policières se multiplient sur le petit écran.
  • En 2016, Search Party lançait la tendance. Depuis, Only murders in the building, The Afterparty ou The Resort ont suivi ce sillon.
  • Pourquoi ces séries hybrides prennent-elles tant d’ampleur ? 20 Minutes répond à la question en se penchant spécifiquement sur The Afterparty et The Resort.

Une vague de comédies noires déferle sur le petit écran. En 2016, le thriller corrosif complètement barré Search Party débarquait comme un ovni à la télévision américaine, ouvrant la voie à un genre hybride de plus en plus apprécié : des comédies loufoques qui détournent les codes des séries policières. Depuis, on a vu passer Only murders in the building en 2021 sur Hulu – la saison 3 est attendue pour août –, The Afterparty en 2022 sur Apple TV, – de retour pour une saison 2 ce mercredi – et The Resort, diffusée sur Canal+ ce mercredi également. On y retrouve de l’enquête, des meurtres, des disparitions et une bonne dose d’humour avec des acteurs qu’on a l’habitude de voir dans des comédies plus traditionnelles comme Community, The Good Place ou Parks and Recreation.

La saison 2 de The Afterparty, créée par Chris Miller et Phil Lord, rebat les cartes de son Cluedo grandeur nature avec de nouveaux personnages – sauf les trois héros de la saison 1 incarnés par Tiffany Haddish, Sam Richardson et Zoë Chao. The Resort, signée Sam Esmail et Andy Siara (à qui l’on doit la comédie romantique fantastique Palm Springs), suit l’enquête d’un couple en vacances au Mexique, campé par William Jackson Harper (The Good place) et Cristin Milioti (How I met your mother). Au menu : deux jeunes disparus quinze ans plus tôt dans les environs, un maître d’hôtel retrouvé noyé et des boucles temporelles dans la jungle. Pourquoi un tel regain d’intérêt pour les pastiches de séries noires et policières ? Et, surtout, pourquoi on en redemande ?

Une soupape de décompression

« On est dans une époque morose où l’avenir est plutôt sombre, analyse Pauline Rocafull, scénariste et directrice de la Cité européenne des scénaristes. Cet humour grinçant me fait penser à ces situations où on est pris d’un fou rire dans un enterrement, par exemple. Aujourd’hui, on vit des choses difficiles, entre la pandémie mondiale, la possibilité d’une guerre nucléaire. Il y a quelque chose de l’ordre de la soupape de décompression ».

C’est bien l’effet qu’Andy Siara, le créateur de The Resort, cherchait à produire. « Quand j’essaie d’échapper au présent, qu’est-ce que je regarde ? Jurassic Park, Indiana Jones, Titanic, Les dents de la mer… Les films de mon enfance qui me réchauffent. J’aime les séries qui jouent sur la limite entre idiotie et sincérité », explique-t-il dans une vidéo du média en ligne Pop Culturalist. Le résultat est un brillant mélange des genres. Une enquête à suspense qui trébuche sur des théories du complot avant de plonger dans le fantastique. Au milieu de tout cela, on découvre un couple à la dérive qui voit dans cette enquête une occasion de panser les blessures du passé.

The Afterparty, de son côté, s’amuse avec les codes des séries policières pour en faire un pastiche réjouissant. « A la fois, la série se moque de la déduction scientifique qu’on retrouve dans Les Experts et un certain nombre de topoï [lieux communs] du policier. Les séries comme Columbo ou Les Experts affirment une supériorité déductive du policier sur le spectateur. Dans The Afterparty, on a un regard à hauteur humaine, qui n’est pas écrasant », pointe François Jost, professeur émérite à la Sorbonne Nouvelle, spécialiste des médias, sémiologue et directeur de la revue Télévision. Ces comédies policières créent une connivence avec le public en faisant appel à son expertise. Elles revisitent un certain nombre de clichés qui alimentent les fictions policières classiques et jouent avec les compétences du public. « On a construit des spectateurs très pointus qu’il est difficile d’impressionner », poursuit-il.

Des comédiens mythiques

« On a une tendance à formater, à codifier les choses et, tout à coup, on introduit une forme d’humour qui vient produire un pas de côté et qui met tout le monde d’accord. C’est un acte de résistance, que ce soit une résistance à la morosité ou au formatage », abonde Pauline Rocafull. Si différentes The Afterparty et The Resort soient-elles, elles relèvent toutes les deux le défi de planter un décor où les genres s’entrechoquent, créant un espace où mystère et suspense tutoient la comédie.

On a plaisir à retrouver des figures comiques du petit écran : William – « Chidi » – Jackson Harper de The Good Place et le toujours aussi frappadingue Ken Jeong, Ben Chang dans la série mythique Community. Deux ambiances différentes pour un même résultat. Les deux œuvres sont aussi réjouissantes et divertissantes l’une que l’autre. Elles vous feront oublier la canicule. Et c’est déjà beaucoup.

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