• L’animation n’a jamais été aussi riche que cette année comme l’a prouvé Linda fait du poulet !, le film qui a reçu le Grand prix d’Annecy.
  • Des professionnels, présents au Festival d’Annecy, donnent leurs explications pour ces changements.
  • Guillermo Del Toro, Jennifer Lee, Peter Sohn et Eric Goldberg ont confié leur sentiment sur cette évolution à 20 Minutes.

Et si l’animation connaissait un nouvel âge d’or ? La question circulait de bouche à oreille de festivalier après la victoire de Linda veut du poulet ! de Chiara Malta et Sébastien Laudenbach, film poétique à l’esthétique aussi unique que surprenante. « Il y avait longtemps que je n’avais pas connu une période aussi riche pour notre médium. L’imagination des créateurs semble s’être débridée », déclare Eric Goldberg à 20 Minutes. Coréalisateur de Pocahontas (1995) et créateur de personnages comme le Génie d’Aladdin 1992), ce grand monsieur de 68 ans en connaît un bout sur le dessin animé.

Cette opinion est largement illustrée par la compétition où les films les plus « grand public comme Elémentaire des studios Pixar côtoyaient des œuvres plus matures et réalisées en toute indépendance comme Adam change lentement du québecois Joël Vaudreuil. « L’intérêt de l’animation est que cela permet d’être plus libre que les prises de vues réelles, » déclare ce dernier. Une lapalissade ? Pas vraiment ! Car la liberté n’est plus que l’apanage de productions confidentielles mais aussi celui des grands studios américains.

Une question de choix

« La pandémie de Covid a changé la donne, précise Guillermo Del Toro. Les gens ont commencé à regarder de l’animation sur Internet et sur les plateformes ce qui leur a permis de découvrir d’autres esthétiques et des contenus plus adultes. » Son Pinocchio oscarisé cette année n’est pas non plus pour rien dans cette évolution. « La concurrence oblige les studios à se bouger, ajoute-t-il. Le temps où les films animés n’étaient réservés qu’aux enfants est révolu. Eux aussi ont acquis, souvent très jeunes, le goût de l’animation de qualité et le sens de la comparaison. D’autant plus qu’il y a de plus en plus de choix, » déclare Walt Dorhn, réalisateur des Trolls.

Le confinement et le développement de logiciels gratuits et intuitifs leur ont donné l’occasion de mettre la main à la pâte. C’est un artiste de 14 ans, Preston Mutanga, qui a réalisé la séquence en Lego d’Accross The Spider-verse après que le studio Sony a repéré l’une de ses vidéos qui avait fait plus de 800 000 vues.

Un avenir très animé

« Le tournant a été Spider-Man New Generation, explique Jeff Rowe, réalisateur des Tortues Ninja Teenage Years et des Mitchell contre les machines. Le succès de ce film très inventif a fait comprendre aux studios que le public avait envie de choses nouvelles tant du point de vue narratif que graphique. Les gens en avaient assez des dessins en 3D uniformisés trop lisses et trop léchés ». Même son de cloche chez Yuzuru Tachikawa, réalisateur de Détective Conan : Le Sous-Marin noir et Blue Giant qui seront bientôt distribués en France. « Le public ne croit plus que l’animation se fait en appuyant sur un bouton après avoir enregistré des dessins dans son ordinateur. Le fait que de plus en plus de gens essayent de se lancer les rend plus éduqués et donc plus réceptifs à des choses nouvelles. »

Alors qu’attendre pour l’avenir ? « Le monde change, précise Jennifer Lee, directrice artistique de Disney Animation. Il est normal de suivre son évolution et de permettre à tout le monde d’être représenté. » Annecy a, cette année encore, constitué une belle vitrine pour cette diversité de forme et de fond. « Les films atypiques comme le nôtre sont toujours difficiles à financer, insiste Sébastien Laudenbach, coréalisateur de Linda veut du poulet !, mais les spectateurs semblent prêts à les apprécier. » Artistes et public ne peuvent que sortir gagnants de cette évolution.

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