En marge de la commémoration des 75 ans de la victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie, la reine Elizabeth II s’est exprimée sur la chaîne BBC vendredi 8 mai, quelques semaines après son allocution sur la crise du coronavirus. Le spécialiste de la royauté Stéphane Bern nous livre ses premières impressions et revient sur cette initiative à la fois symbolique et salutaire pour le pays.
God save the Queen… again ! Après avoir prononcé un discours émouvant en réaction à la crise du nouveau coronavirus, la reine Elizabeth II a de nouveau pris la parole dans la soirée du vendredi 8 mai afin de commémorer le 75ème anniversaire de la fin de Seconde Guerre mondiale. Un moment rare qui a réuni de nouveau des milliers de téléspectateurs, dont notre expert en royauté Stéphane Bern.
Une mise en scène symbolique
«Au début, les perspectives semblaient sombres, l’issue lointaine, le résultat incertain, a déclaré la reine en évoquant la Deuxième guerre mondiale. Mais nous avons continué à croire que la cause était juste et cette conviction (…) nous a portés.» Ce discours a été diffusé sur la chaîne BBC à 20 heures, soit l’heure exacte où son père le roi George VI s’était exprimé à la radio en 1945. «Un façon bien à elle de rendre hommage à ce père héroïque et à tous ceux qui se sont battus pour la victoire», analyse le spécialiste de la royauté.
Et ce symbole n’était pas le seul. «Rien n’a été laissé au hasard dans la mise en scène», note Stéphane Bern. «Du portrait de son père en uniforme sur sa droite à la photo du balcon où elle posait avec ses parents, sa sœur Margaret et Sir Winston Churchill le 8 mai 1945, en passant par les deux broches en diamants et aigues-marines du joailler français Boucheron sur sa robe, offertes par son père en 1944, à sa casquette d’ambulancière d’époque posée sur le bureau», détaille-t-il.
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Un message d’espoir venu du passé
Actuellement confinée dans le château de Windsor et son époux Philip, à l’endroit même où elle s’était réfugiée pendant la guerre, sa Majesté ne peut que se replonger d’autant plus dans le passé et se remémorer quelques souvenirs. «Ce fut une journée mémorable», a-t-elle raconté en évoquant le jour de la victoire. En effet, comme le rapporte Stéphane Bern, après le discours sur le balcon de Buckingham Palace, sa sœur Margaret et elle se sont glissées en catimini dans la foule de badauds pour aller participer à la fête populaire. «C’est la dernière fois où la reine est descendue dans la rue sans respecter les règles sanitaire de distanciation sociale», souligne l’expert en royauté.
Si la pandémie mondiale actuelle n’a pas été évoquée directement, la reine Elizabeth II profite de cette commémoration pour délivrer un message d’espoir. «Ne baissez jamais les bras, ne perdez jamais espoir, tel était le message du jour de la Victoire en Europe», a-t-elle rapporté. «En utilisant ces mots prononcés il y a 75 ans, la reine a offert un message symbolique aux combattants du Covid-19 en leur expliquant que les soldats d’hier regardaient la solidarité des Britanniques avec admiration et fierté», observe Stéphane Bern.
Un devoir face à la parole politique décrédibilisée
On n’aura jamais vu la reine prendre autant la parole ces derniers temps. Il s’agit de sa cinquième intervention télévisée depuis son couronnement le 2 juin 1953 à Westminster. Auparavant, elle a pu s’exprimer publiquement lors de la guerre du Golfe en 1991, le décès de la princesse Diana en 1997, celui de sa mère en 2002, lors de son jubilé de diamant en 2012 et pendant la crise du nouveau coronavirus, le 5 avril dernier. «En dehors des discours du Trône rédigés par le premier ministre, il s’agit des seuls messages écrits personnellement par la reine, avec les vœux de Noël», indique Stéphane Bern.
Est-ce que la reine apprécierait désormais l’exercice ? «Je ne crois pas mais c’est une femme qui a le sens du devoir. Soyons honnêtes, elle se rend bien compte que la parole politique est démonétisée», admet Stéphane Bern. En effet, après avoir dit que le coronavirus était une simple « grippette », refusé de confiner son pays et ensuite attrapé le virus, le Premier ministre Boris Johnson n’est plus crédible aux yeux des britanniques, selon l’expert royal. En particulier à l’heure où le bilan mortel de l’épidémie s’élève à plus de 31.000 décès en Grande-Bretagne, soit le deuxième pays le plus touché par la pandémie dans le monde après les États-Unis.
Ce discours démontre finalement «toute la subtilité de la reine», conclut le spécialiste en royauté. «Elle n’a pas besoin de prendre le pouvoir ou de rentrer dans l’arène politique mais elle sait qu’elle est une autorité morale et que sa parole, comme celle de son père pendant la guerre, va dynamiser le patriotisme et encourager les gens», note Stéphane Bern. Et le résultat promet d’être au rendez-vous, puisque certains médias britanniques attestaient que le moral de la population était remonté en flèche après son discours du 5 avril.
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