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Mardi 5 novembre, Le monde en face, présenté par Marina Carrère d’Encausse, propose « Elles ont brisé les codes », le troisième opus de la collection documentaire Les combattantes, d’Olivier Delacroix et Katia Maksym, diffusé sur France 5 à 20h50. Pour l’occasion, l’animateur a accordé une interview à Femme Actuelle. (préciser la thématique de l’émission)
Elles s’appellent Marie-Clémence, Diane, Guillemette et Ombeline. Elles viennent des beaux quartiers, appartiennent à ce que l’on appelle une bonne famille. Elles ont toutes les quatre choisi de remettre en question la place qu’on leur avait attribuée dans la société. Dans ce troisième opus de la collection documentaire d’Olivier Delacroix et Katia Maksym, Les combattantes, France 5 suit le parcours de ces quatre femmes et pose la question du déterminisme social. À l’occasion de la diffusion du film mardi 5 novembre 2019, Olivier Delacroix a accepté de s’entretenir avec Femme Actuelle. Vision du déterminisme social, travail en binôme avec Katia Maksym, place de la femme dans la société, féminisme, femmes de sa vie ou polémique avec Karine Le Marchand : le documentariste se livre avec le franc-parler qu’on lui connaît.
Femme Actuelle : Comment vous est venue l’idée de travailler sur le thème du déterminisme social (préciser la thématique de l’émission) ?
Olivier Delacroix : Avec Katia, nous avions tourné deux films, avec les femmes du 93 puis avec celles des Hauts-de-France. Pour le troisième numéro de cette série documentaire, je me suis dit qu’il fallait sortir des trajectoires attendues. Cela faisait longtemps que je voulais aller sur le terrain des biens-nées. Étonnement, elles rejoignent les femmes nées dans des milieux auxquels on s’attend davantage aux combats. En allant sur le terrain de ces femmes de la noblesse ou de la haute bourgeoisie, j’étais loin de m’imaginer à quel point la pression qu’elles subissent est forte. Ces documentaires montrent que les femmes, d’où qu’elles soient, font preuve de la même ténacité.
Comment vous êtes-vous partagé les rôles avec Katia Maksym, la co-réalisatrice du documentaire ?
O.D.: Katia Maksym est mon bras droit, mon binôme. On travaille ensemble depuis une dizaine d’années. Katia a longuement échangé avec ces femmes pour que la confiance soit établie. Qu’une femme soit là, par moments, ça a un côté rassurant. Katia apporte une sensibilité typiquement féminine sur ce film, c’est une valeur ajoutée. L’équilibre était atteint. Nous avons ensuite tourné tous les deux, puis monté tous les deux. Nous sommes très complémentaires.
Avez-vous des nouvelles de Marie-Clémence, Diane, Guillemette et Ombeline ?
O.D.: Oui. Guillemette est très impatiente de voir le documentaire. J’ai eu des nouvelles de Diane tout à l’heure et Marie-Clémence travaille aujourd’hui avec moi. Elles prouvent que rien n’est impossible. C’est souvent ce que je dis à ma fille. Il y a des choses difficiles à avoir, mais le mot “impossible” ne fait pas partie de mon vocabulaire. S’il y a la moindre chance, on ne peut pas dire que c’est impossible, même si cela va être très compliqué. Ombeline est la seule dont je n’ai pas de nouvelles, mais je vais peut-être en avoir après la diffusion !
Dans un portrait, Libération vous décrit comme un “ex-enfant de choeur marqué par la religion, un fils de notable éduqué dans des pensionnats catholiques”… Avez-vous dû renier quelques chose dans votre vie ?
O.D.: Ma carrière, ce que je suis, cela dépasse ma coupe de cheveux. C’est un état d’esprit. J’ai moi aussi dit “non” à tout un tas de règles qui me faisaient chier. Je pense que si j’avais voulu me couper les cheveux et rentrer dans le rang, j’aurais plus de propositions à la télévision, à tous les niveaux. Je sens que je fais encore… peur. Est-ce que c’est le mot ? En tout cas, je ne rentre pas dans la case du genre idéal. Mais ma capacité à interviewer les gens, on ne la retrouve pas chez ceux qui ont une allure de gendre idéal. Cette liberté dont je parle, je la comprends. Ceux qui vont à l’encontre de cette liberté par arrivisme ou par carriérisme acceptent des choses que je ne peux pas accepter. Dès l’enfance, j’ai senti que j’avais un problème avec la hiérarchie, avec l’ordre établi, avec certaines règles que je trouvais débiles.
En mai 2019, vous avez publié un livre retraçant plusieurs destins féminins, Parce qu’il y a des femmes. Qu’est-ce qui vous intéresse particulièrement dans le parcours des femmes du XXIe siècle ?
O.D.: Une société qui ne respecte pas les femmes, qui ne les protège pas, qui n’accepte pas qu’elles soient au coeur de la vie publique est une société qui boite ou peut se casser la gueule. L’autre jour, dans Les Grandes Gueules, sur RMC, une femme m’a dit : “Depuis #MeToo, c’est bon genre d’écrire sur les femmes.” Je ne l’avais pas vue arriver ! Je ne suis pas du tout dans un militantisme féminisme, j’avais juste envie d’écrire sur celles qui me marquent. Aujourd’hui, on reproche tout et n’importe quoi.
Diriez-vous que vous êtes féministe ?
O.D.: Non, pas du tout. Il y a quelque chose chez les féministes qui m’embête profondément, c’est ce côté jusqu’au-boutiste. Moi, je peux parfois commettre des bourdes… Par exemple, dans une émission, j’ai dit que j’aimais bien regarder le football féminin car je le trouve subtil et agréable. Je me suis fait engueuler par Katia ! Après réflexion, j’ai trouvé cela maladroit alors que je n’avais pas du tout une mauvaise intention. Mais quelque part, mes propos étaient discriminants.
Qui sont les femmes de votre vie ? Celles que vous admirez dans votre entourage ?
O.D.: Ma femme [Valérie, réalisatrice reconvertie dans le yoga, ndlr.] compte plus que tout dans ma vie. La famille est mon socle. On peut traverser des orages ou des tempêtes, mais cela reste le socle qui fait mon équilibre, qui fait de moi un homme plus apaisé, même si je suis tourmenté. Je le suis un peu moins auprès de ma femme, que j’écoute beaucoup et qui a souvent un regard très juste. Ma fille [Tess, 15 ans, ndlr.], compte aussi plus que tout pour moi. Il y a également, autour de moi, toutes ces femmes sur lesquelles je me repose professionnellement. J’ai plus de facilités à accorder ma confiance aux femmes.
Montrez-vous vos documentaires à votre fille Tess, votre femme Valérie ou votre demi-soeur, la comédienne Florence Thomassin ?
O.D.: Non, je ne suis pas du genre à les faire valider par ma femme ou par mes proches. Je ne veux pas tout mélanger. Ma femme le regardera sans doute en Replay. En revanche, son avis m’intéresse ! J’aime avoir l’analyse de ma femme, de Flo ou même de ma fille, qui regarde tous mes documentaires. Je vois ensuite quels sont les centres d’intérêts de ma fille, qui est surtout portée sur les web médias. Il se peut que dans les mois qui viennent, je développe une activité sur le web. On y travaille. J’y accorde un profond intérêt car c’est le média de demain. Il faut monter dans le train maintenant.
En février 2019, vous disiez au Figaro, à propos de L’Amour est dans le pré : “Je sens que tout est faux. Voilà pourquoi aujourd’hui les réalisateurs de documentaires affrontent encore des gens qui disent ‘Oui, vous nous faites dire n’importe quoi. Vous transformez nos émotions.” Vous avez-ensuite présenté vos excuses. Qu’en pensez-vous aujourd’hui ? Estimez-vous que ce genre d’émission nuit à votre travail ?
O.D.: Je vais être très clair : ce jour-là, j’ai compris qu’on ne pouvait pas dire ce qu’on pensait dans ce pays et que le fait de dire ce que l’on pense pouvait déchaîner tout un torrent d’analyses, de contre-analyses, me déclarant l’ennemi juré de cette consoeur. On ne m’y reprendra pas. En France, pour vivre heureux, vivons cachés. C’est triste, certes, mais ce n’est pas moi qui fais les règles.
Et vous que regardez-vous à la télévision ?
O.D.: Je regarde Complément d’enquête, Envoyé spécial, Le monde en face… Je regarde beaucoup de documentaires. Je trouve que Sept à Huit est un magazine très bien foutu, l’information y est bien traitée. Je tombe souvent dessus avant le Canal Football Club, ce qui fait un bon équilibre ! J’aime regarder l’émission de football d’Estelle Denis. Je suis aussi un gros consommateur de séries. Je regarde tout ce qui est sociétal sur Canal, OCS ou Netflix. Ma dernière claque, c’est Le Bureau des Légendes ! J’attends avec impatience la suite de Narcos, j’ai adoré True Detective… La série la plus marquante reste Les Sopranos. A part le football, je regarde beaucoup de programmes en Replay. Aujourd’hui, on consomme la télévision autrement.
Après la diffusion du documentaire, Marina Carrère d’Encausse propose un débat avec Katia Maksym, co-réalisatrice du documentaire « Elles ont brisé les codes », Céline Piques, porte-parole de l’association Osez le féminisme!, Catherine Bensaid, Psychiatre, psychanalyste, autrice de Libre d’être une femme (Ed. l’Iconoclaste), Christel Mouchard, écrivaine et autrice de Elles ont conquis le monde (Éd. Arthaud), travaille depuis plus de 20 ans sur les récits d’exploration et de voyages, passionnée par les femmes voyageuses qui brisent les codes de leurs époques.
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