Emmanuel Macron s’apprête à prononcer ses traditionnels voeux présidentiels, en ce 31 décembre 2022. Un exercice qu’il a déjà pratiqué cinq fois, et qu’il perpétue comme d’autres avant lui, dans la lignée du général de Gaulle, inventeur de l’exercice. Très pointilleux, Emmanuel Macron va parfois jusqu’à écrire douze versions de son allocution. Une préparation nécessaire pour un exercice qui a souvent donné lieu à des moments de télévision mémorables.
De président en président, les Français se retrouvent le soir du 31 décembre devant leur écran, qu’il soit désormais télévisé ou portable, pour entendre le chef de l’État formuler ses vœux pour la nouvelle année. Les présidents de la Ve République ont tous souhaité moderniser l’exercice : en différé ou en direct, discours longs ou très brefs, changeant de décor, parfois de ville, debout ou assis… Mais si la forme a souvent changé, le fond reste à peu près le même : sauf lorsqu’il s’agit de faire passer des messages. De Charles de Gaulle à Emmanuel Macron, voici 6 moments qui ont marqué les Français.
1. « Je crois aux forces de l’esprit (…) » : les derniers vœux télévisés de François Mitterrand le 31 décembre 1994.
Ce sont les plus célèbres et les plus émouvants, ceux qui restent et demeureront pendant des années encore, les vœux les plus forts prononcés par un président en exercice. Le 31 décembre 1994, après deux mandats de sept années chacun, François Mitterrand délivre son dernier discours du 31 décembre aux Français. Il se sait condamné par son cancer de la prostate, souffrant de ce mal depuis de longues années. Presque certain que cette année 1995 dont il évoque les contours aux Français, et qu’il leur souhaite heureuse, sera celle de son décès, sinon d’une agonie insupportable, il ose y faire allusion par des mots restés gravés dans les mémoires : « Mes chers compatriotes, je n’apprendrai rien à personne en rappelant que dans quatre mois aura lieu l’élection présidentielle (…). L’an prochain, ce sera mon successeur qui vous exprimera ses vœux. Là où je serai, je l’écouterai le cœur plein de reconnaissance pour le peuple français qui m’aura si longtemps confié son destin et plein d’espoir en vous. Je crois aux forces de l’esprit et je ne vous quitterai pas. (…) Bonne année et longue vie ». François Mitterrand meurt le 8 janvier 1996.
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2. Quatre minutes à peine au compteur : Georges Pompidou détient le record des vœux les plus courts, avec son discours du 31 décembre 1969.
Souhaitant imposer sa patte après les années de Gaulle, Georges Pompidou décide de se rebeller contre la tradition. Assis dans son bureau de l’Élysée, légèrement souriant mais solennel, il prononce les premiers vœux de son mandat. Mais au lieu de se lancer dans un long discours comme en avait l’habitude son prédécesseur, qui avait initié cette tradition, Georges Pompidou surprend les téléspectateurs en prononçant l’allocution de nouvel an la plus courte de l’histoire de la Ve République ! Il détient encore ce record à ce jour : trois minutes et 45 secondes. L’inverse du record du général de Gaulle qui a prononcé les vœux de la Saint-Sylvestre les plus longs : 18 minutes le 31 décembre 1961. Un discours centré sur la solidarité et la fraternité : après avoir évoqué ceux qui ne peuvent faire la fête, le président fait l’éloge de l’amitié. « Rien ne se gagne que dans l’effort, rien ne vaut d’être gagné que dans la fraternité », assène-t-il. Court et efficace.
3. « Salut à toi 1975 ! » : les vœux loufoques de Valéry Giscard d’Estaing, le 31 décembre 1974.
Valéry Giscard d’Estaing est celui qui a le plus surpris, le mot est faible, lors de ses vœux présidentiels. Désirant innover chaque année, le président de la République n’a jamais vraiment réussi à atteindre la modernité, y mettant pourtant tout son cœur… Pas avare de mises en scènes, celui qui était alors le chef de l’État le plus jeune de la Ve République a régalé les Français pendant sept ans : au coin du feu, seul ou accompagné, bouquet de fleurs sur le bureau, arrivant en marchant du fond de la pièce… Son imagination s’est beaucoup emballée.
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Le cru 1974, le premier, vaut son pesant d’or. Assis devant le feu de cheminée crépitant, Valéry Giscard d’Estaing accueille les Français dans son salon. Dans un discours loufoque de 11 minutes, il aborde de multiples sujets tout en promettant de ne pas être ennuyeux, et tente la poésie lorsqu’il revient sur l’année 1974, celle de son élection : « Et pourtant c’est une année qui aura connu des arbres et des fleurs, une année où des êtres se seront rencontrés (…), une année que nous ne reverrons plus ». Certes. Puis, Valéry Giscard d’Estaing s’essaie à une nouvelle forme d’expression : le tutoiement. « Adieu donc, 1974, et salut à toi, 1975 », lance-t-il à la caméra et aux Français sans doute ébahis. « Je souhaite que tu sois une année accueillante pour les Français, que tu répondes à leurs attentes (…) » continue-t-il, en roue libre. Le nouveau président conclut par un « Bonne année la France ». À noter que Valéry Giscard d’Estaing n’a jamais souhaité terminer ses allocutions du nouvel an par « Vive la République ! Vive la France ».
4. « L’année 1968, je la salue avec sérénité… : les vœux non exaucés de Charles de Gaulle le 31 décembre 1967.
Si les réseaux sociaux avaient existé en 1968, il y a fort à parier que des extraits des vœux de fin d’année 1967 de Charles de Gaulle l’auraient poursuivi pendant des mois. Avec le recul, on constate que le président de la République a formulé un discours on ne peut plus éloigné de la réalité qui s’apprêtait à lui tomber dessus quelques mois plus tard. Ne voyant absolument pas venir mai 68 et son cortège de pavés, le chef de l’État débute par : « Que sera 1968 ? L’avenir n’appartient pas aux hommes, et je ne le prédis pas…« . Oui, effectivement. Peut-être aveuglé par les couleurs que les Français voient enfin apparaître à la télévision, il poursuit : « Pourtant, c’est vraiment avec confiance que j’envisage pour les douze prochains mois l’existence de notre pays ». Des millions de grévistes, une jeunesse qui brûle… Encore mieux pour la conclusion : « L’année 1968, je la salue avec sérénité… Vive la République, vive la France ». On peut dire que Charles de Gaulle n’a pas eu le nez fin lors de cette déclaration du 31 décembre.
5. « Nous sommes sur le bon chemin » : les vœux en pleine crise de Jacques Chirac le 31 décembre 1995.
Entre l’automne 1995 et le dernier jour de l’année, le pays a souffert d’un mouvement de grève comme il n’en avait pas connu depuis mai 1968. Des journées de manifestations, trois semaines de blocage dans les transports, la grève dans les lycées : tout cela à cause de l’annonce par le Premier ministre, Alain Juppé, d’une réforme de la Sécurité sociale et des retraites de la fonction publique. Cette immense crise marquera le début du mandat de Jacques Chirac qui a été élu en mai de la même année. Difficile dans ces conditions, de s’adresser aux Français pour leur souhaiter une bonne année 1996.
Contraint par l’exercice, Jacques Chirac ne se démonte pas et ouvre son discours en remerciant son Premier ministre pour « l’action courageuse qu’il a menée avec détermination dans des circonstances particulièrement difficiles ». Risqué. Jacques Chirac aborde ensuite la crise, au bout de trois minutes, pour appeler les Français au dialogue et chercher le positif dans la colère du peuple : « Des millions d’entre vous se sont levés très tôt le matin, déployant imagination et volonté, simplement pour arriver à l’heure au travail ». « Nous sommes au début du chemin, mais nous sommes sur le bon chemin », conclut-il. Celui qui mène à la dissolution de l’Assemblée nationale de 1997.
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6. « Un 31 décembre pas comme les autres » : les vœux d’Emmanuel Macron, en pleine pandémie, le 31 décembre 2020.
C’est seuls devant leur télévision que les Français ont probablement, pour la majorité, passé ce réveillon. Après une année 2020 éreintante, avec confinements, ports du masque, autorisations de sortie, loisirs inaccessibles, familles séparées, interdictions de se réunir, et surtout tant de morts déplorés dans presque chaque famille de près ou de loin, les Français n’ont pas le cœur à la fête et ne sont de toute façon pas autorisés à se réunir en masse. Emmanuel Macron, affaibli lui-même par le Covid, marche sur des œufs, en ce 31 décembre 2020, accusé d’avoir géré de façon plus ou moins ingénieuse la pandémie, et se sachant attendu au tournant par l’opposition et le personnel soignant au bout du rouleau. « Je suis sincèrement convaincu que nous avons fait les bons choix aux bons moments et je veux vous remercier de votre civisme », annonce-t-il lors de ce discours qui se veut tourné vers les Français et le courage des professions qui ont le plus souffert des conséquences du Covid-19. Le président de la République en profite pour tourner la crise en une opportunité de renaissance, et annonce une année 2021, pleine d’espoir. « Oui, cette année 2020 ne se résume pas à l’épidémie même si celle-ci a changé nos vies », assène-t-il.
Crédits photos : Eliot Blondet / Pool / Bestimage
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