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Le gouvernement a fait de l’accueil de ces enfants à l’école publique une priorité. Un vaste chantier, profitable à tous, mais qui ne va pas sans heurts.
« Après sa toute première journée de maternelle, on m’a demandé de reprendre mon fils en me disant qu’il n’avait pas sa place à l’école », se souvient Florent Chapel, père d’un autiste sévère. Dix ans de lutte plus tard, son fils de 13 ans est scolarisé en milieu ordinaire dans une classe adaptée d’un collège en banlieue parisienne. Devenu militant, Florent a fondé la plateforme Autisme Info Service* pour aider les familles comme la sienne. Son parcours chaotique n’en est pas moins représentatif de ce que vivent les parents d’enfants différents. Car, si le droit à l’éducation pour tous est inscrit dans la loi depuis 2005, la réalité est plus complexe.
De l’avis de tous, la France est à la traîne derrière les pays pionniers de l’école inclusive tels le Danemark ou le Québec. Conscient de ce retard, le gouvernement a fait de la scolarisation des élèves handicapés une priorité du quinquennat. Les lignes bougent : la création d’un grand service public de l’école inclusive est inscrit dans la loi de juillet 2019. Mais pour les quelques 90 000 accompagnants (AESH, ex AVS), le compte n’y est pas. » On vit sous le seuil de pauvreté avec 740 € de salaire moyen », déplore Anne, AESH dans l’Ain, qui dit pourtant adorer son métier. Elle anime le collectif AESH en action qui compte 11 000 membres. « Nos conditions de travail se dégradent. Nos emplois du temps sont morcelés par souci de rentabilité, on nous disperse dans plusieurs établissements alors qu’on ne bénéficie d’aucune indemnité pour couvrir nos frais kilométriques ».
Quant à leur formation initiale de 60 heures, elle n’est pas suffisante, selon eux, pour faire face au large spectre du handicap qui va de la dyslexie à la schizophrénie en passant par la surdité ou les infirmités motrices. De nombreux AESH complètent ainsi leur apprentissage à leurs frais. Responsable nationale** de l’Unapei, Sonia Ahehehinnou regrette pour sa part que les enseignants manquent aussi d’expertise. « Quand un handicapé arrive dans une classe de 35 élèves, c’est compliqué à gérer. Beaucoup d’enseignants subissent la situation ». D’après Jean-Louis Garcia, président de l’APAJH, il manque encore un vrai partenariat entre l’Education nationale et les professionnels du médico-social. « Il existe en France 14 000 personnes dont le métier est le handicap qui pourraient intervenir dans la formation des enseignants. Mais, pour ça, il faut des moyens », déplore-t-il. Si le système demeure perfectible, les résultats sont vertueux et bénéfiques pour les familles, les enseignants, les élèves qui font l’apprentissage de la différence. Et, bien sûr, les enfants. « Notre fils enchaînait les crises, aujourd’hui il nous parle. L’école est un vaccin contre l’exclusion », assure Florent Chapel.*numéro gratuit 0 800 71 40 40; **Fédération de 550 associations liées au handicap;
« L’école lui a appris la vie en société »: Florent, 49 ans, père d’un autiste de 13 ans
« Galaad est scolarisé depuis la maternelle. On a tout connu : le temps plein, le temps partiel, les classes ordinaires, les classes spécialisées… Pendant huit ans, j’ai payé de ma poche des accompagnants privés, 2000 € par mois environ. Il a fallu vendre notre maison pour faire face. Ce sont des sacrifices mais, aujourd’hui, notre fils est plus apaisé, il a des copains, aime la batterie et le karting, va au collège en trottinette. L’école lui a appris la vie en société, il côtoie des enfants ordinaires à la cantine et à la récré même s’il est dans une classe adaptée. Pour nous aussi, les bénéfices sont réels. Ma femme, qui s’était arrêtée de travailler, a pu reprendre une activité. On n’est plus tout seuls, on a de nouveau de l’espoir ».
« Grâce à eux, on se remet en question »: Yanick, 45 ans, enseignant d’histoire-géographie, accueille des élèves dys* dans ses classes
« Enseigner à des enfants en situation de handicap permet de se remettre en question. On fait évoluer ses pratiques. Dans ma discipline, cela passe par des documents plus aérés, des polices de caractère plus grandes. Pour ces enfants, il y a une émulation à être dans le groupe qui les tire vers le haut. Pour les autres, c’est une école de tolérance et de solidarité. J’ai retrouvé en 4e un garçon multi-dys que j’avais eu en 6e. Il écrit dorénavant sans l’aide d’un ordinateur, ça m’a fait très plaisir. Avec les AESH, je n’ai pas de problèmes. Je ne me sens pas jugé par leur présence, je les considère plutôt comme mon bras droit pendant le cours ». *troubles divers de l’apprentissage
« Je me sens utile »: Lydie, 48 ans, AESH depuis 10 ans à Manosque
« J’ai suivi des enfants atteints de plusieurs types de handicap (autisme, dyslexie, schizophrénie, moteur cérébral…). Quand on arrive à les faire se dépasser, quand ils font l’apprentissage de la propreté ou de la lecture, quand on participe à leur intégration dans la classe et à la récréation, c’est magnifique. Bien sûr, il y a des cas problématiques, mais la gestion de crise fait partie de notre quotidien. Je me suis formée sur le tas, souvent sur mon temps libre. Avec mes trois contrats, je gagne à peine le SMIC. Mais je continue car je me sens utile. Ces enfants me donnent des leçons de vie tous les jours ».
« Des cellules d’écoute pour les familles »: Sophie Cluzel, Secrétaire d’Etat chargée des Personnes handicapées
« Nous avons déployé de nouveaux moyens et dispositifs dans le cadre du grand service public de l’Ecole inclusive. Ainsi, 4500 postes d’accompagnants (AESH) ont été créés pour la rentrée de septembre dernier. Nous avons mis fin aux contrats aidés précaires, remplacés par des CDD de trois ans qui ont concerné, à la rentrée, 83% des AESH. C’est un progrès majeur pour eux et pour les élèves qui ne vivront plus de ruptures d’accompagnement. Pour les familles, nous avons créé des cellules d’écoute et de réponse sous 24h, dans chaque inspection académique pour toutes les difficultés de scolarisation. Par ailleurs, plus de 18 000 entretiens entre les familles, les équipes pédagogiques et les AESH ont été organisés en début d’année scolaire, pour préparer au mieux la rentrée des enfants. Nous avons également ouvert les portes de l’école aux professionnels du handicap pour que les parents n’aient plus à courir entre l’école et les différentes consultations et puissent reprendre un travail. En outre, nous travaillons étroitement avec les communes pour que les AESH puissent accompagner les élèves en situation de handicap également sur le temps périscolaire. »
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