Un énorme accident industriel. Voilà comment résumer Cindy, une relecture moderne de Cendrillon avec Lââm dans le rôle titre, qui a été vite annulée en 2002. Un échec monumental que plusieurs artistes de la comédie musicale avaient vu venir de loin.

Lââm

Que reste-t-il de Cindy aujourd’hui ? Dix-neuf ans après son échec retentissant, la comédie musicale de Luc Plamondon et Romano Musumarra nous revient par des flashs délicieusement kitsh : une obscure chanson sur une rave party, les improbables costumes de Carine de la Star Academy et d’Assia, des rimes en –axe qui piquent les oreilles… Autant de souvenirs capturés en vidéo qui tournent sur YouTube et sur les réseaux sociaux, nous prouvant que oui, le spectacle a bien existé et a même été joué au Palais des Congrès. C’était en 2002, à l’époque où Luc Plamondon était au sommet grâce au succès colossal de Notre-Dame de Paris. Pour son nouveau spectacle, le Canadien avait réussi à obtenir plus de sept millions d’euros. « Soit le budget d’un long-métrage français », avait à l’époque déclaré Charles Talar, le producteur de Cindy. Costumes Givenchy, décor censé être majestueux, location du Palais des sports, promotion massive : en dépensant autant, l’homme d’affaires espérait amortir ses investissements en quatre mois, misant sur l’immense succès du show. Mais ce n’est pas vraiment ce qui s’est passé.

Les artistes de Cindy racontent le naufrage du spectacle

Dans un article consacré à l’échec de Cindy, Vice raconte ce lundi 5 juillet ce qui s’est passé en coulisses durant la préparation, puis la courte exploitation de la comédie musicale. On apprend notamment que Charles Talar voulait que les choses aillent vite, sans doute un peu trop. « Les répétitions se sont passées à Caen pendant six mois. La production avait déjà réservé le Palais des Congrès pour septembre 2002. On travaillait sous pression : pendant que les chanteurs et danseurs apprenaient tout au fur et à mesure, nous terminions d’écrire la pièce », raconte à Vice Romano Musumarra, le compositeur de Cindy. Un travail dans l’urgence permanente qui ne correspondait pas du tout aux méthodes habituelles de Luc Plamondon.

Comme l’a raconté Judith Bérard, une des chanteuses, on tient là une des explications de l’échec du spectacle : « Plamondon est un être libre, il ne travaille pas bien avec un fusil sur la tempe. On nous donnait des maquettes pas terminées sur lesquelles on travaillait. Le spectacle existait, mais surtout dans sa tête, a-t-elle expliqué à Vice. En fait, avec la troupe, on a vite pris conscience d’être dans un magnifique Titanic. C’était un splendide projet. » Tous certains de se diriger vers un inéluctable naufrage, ils n’ont pas été surpris par l’issue de l’aventure.

Une comédie musicale qui a brisé des carrières

La première de Cindy a lieu le 11 septembre 2002 au Zénith de Caen, avant de faire sa première parisienne au Palais des congrès le 25 septembre 2002. « Bien entendu, avant le début du spectacle, nous étions très nerveux. Nous n’étions tout simplement pas prêts à cette date, raconte à Vice Patrice Blouin, un des artistes présents sur scène ce soir-là. Cette comédie a été réduite à sa forme la plus minimaliste qui soit. Il y a eu une incapacité de produire sur scène ce qui a été créé sur papier. Là est la vraie tragédie. » Les premiers retours, désastreux, ont achevé d’enterrer la comédie musicale.

En décembre 2002, quelques mois seulement après la première, la pièce a été stoppée et sa tournée annulée. « Nous étions abattus, l’équipe était très soudée, raconte Judith Bérard. C’était une catastrophe. Ça a collé à la carrière de certains chanteurs qui n’ont pas pu rebondir après cet échec. » On pense bien sûr à Lââm, mais aussi à tous les autres membres du casting qui sont retournés dans l’ombre juste après. Luc Plamondon mettra lui aussi plusieurs années à se remettre en selle, avant de revenir en 2006 avec une nouvelle version de Notre-Dame de Paris. Pas sûr, en revanche, qu’il tente un remake de Cindy un jour.

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