Après la fuite de Carlos Ghosn au Liban, son épouse se serait installée avec lui dans une maison sous haute surveillance, a révélé le New York Times, le lundi 30 décembre.
C’est un rebondissement digne d’un film hollywoodien. Carlos Ghosn, l’ex-patron de l’alliance Renault-Nissan, a fui le Japon – où il était assigné à résidence depuis le 25 avril – pour trouver asile au Liban. Sous le coup de quatre inculpations pour malversations financières, l’homme d’affaires a publié un communiqué, ce mardi 31 décembre, dans lequel il affirme s’être «libéré de l’injustice et de la persécution politique». Si l’on ignore encore les conditions dans lesquelles s’est déroulée la fuite de Carlos Ghosn, son épouse, Carole, serait déjà à ses côtés, a révélé le New York Times. Tous deux vivraient désormais «dans une maison avec des gardes à l’extérieur», au Liban, indique une source proche au quotidien.
Depuis le début de l’affaire, Carole Ghosn cultive la discrétion, et ne s’exprime que pour défendre son époux. «Tout ce qui m’importe, c’est que mon mari soit traité dignement», confiait-elle en janvier à Paris Match, dans une interview exclusive. L’homme d’affaires le plus scruté de la planète (après Jeff Bezos, peut-être) pouvait compter sur le soutien sans faille de sa très discrète épouse depuis le début du scandale.
Carlos Ghosn, arrêté à l’aéroport de Tokyo le 19 novembre 2018, est sous le joug de nombreux chefs d’inculpation (dissimulation de revenus, abus de confiance, soupçons d’emploi fictif…) et de vastes interrogations sur ses dépenses liées à sa privée, notamment celle concernant son mariage à la susdite Carole. Alors, qui est vraiment madame Ghosn ?
Une vie avant Carlos
Née Carole Nahas en 1966 à Beyrouth, celle qui partage avec son mari la nationalité libanaise (il est aussi français et brésilien) a passé une grande partie de sa vie à New York, à l’image de l’ex-patron de Renault – un temps responsable des opérations Michelin en Amérique du Nord. C’est dans cette ville qu’elle crée en 2009 une marque de caftans de luxe fabriqués au Liban, «Calm», avec la designer Alison Levasseur.
De son premier mariage – dont on ne sait rien (si ce n’est le nom de famille de son époux, Marshi) – Carole a trois enfants, tous passés par le très élitiste lycée français de New York. Sa fille Tara est aujourd’hui étudiante à l’université de Brown ; ses fils Anthony et Daniel, deux loups de la finance (le premier est associé du bureau new-yorkais du cabinet de conseil BCG à New York, le second travaille chez Morgan Stanley). Ce sont d’ailleurs ces derniers qui l’ont prévenue en premier de l’arrestation de son mari.
En vidéo, Carole Ghosn en appelle à Emannuel Macron pour la libération de son mari
Relation clandestine
Si les détails de la rencontre entre Carlos et Carole Ghosn ne sont pas connus, on sait que la première épouse du patron de Renault, Rita Khordahi (rencontrée en 1984, épousée en 1985), découvre leur liaison en 2013, alors que Monsieur est en poste au Japon. Rita et Carlos sont alors mariés depuis vingt-et-un ans, et sont les parents de quatre enfants, Caroline, Anthony, Maya et Nadine.
Une fois le divorce prononcé, Carlos Ghosn s’affiche publiquement avec sa nouvelle compagne au brushing blond impeccable, partageant leur temps entre leur pied-à-terre parisien (500 m² dans le 16e arrondissement), le penthouse de Rio et la luxueuse villa de Beyrouth (payée 8,75 millions de dollars puis rénovée pour 6 millions de dollars supplémentaires…). Ensemble, ils montent les marches du Festival de Cannes chaque année entre 2015 et 2018 ; assistent aux Jeux Olympiques de Rio en 2016, fêtent le cinéma à l’Alliance Française de New York en 2013…
Mariage à la Versaillaise
Le couple se marie civilement en mai 2016 à la mairie du XVIe arrondissement. Ils célèbrent leur union quelques semaines plus tard, en grande pompe au Grand Trianon de Versailles. Pour l’occasion (elle fête ses 50 ans en même temps), Carole porte une robe créée par son compatriote Rabih Kayrouz, qu’elle ressortira pour monter les marches de Cannes en 2017. Le mariage a des airs de… Versailles, les serveurs sont en tenue d’époque Marie-Antoinette. Au programme : du clavecin, du champagne servi dans des verres en cristal Saint-Louis et une pièce montée de 1,50 mètre de haut. Le magazine américain Town and Country rapporte cette phrase – parlante – de Carlos Ghosn : «Quand vous invitez des gens chez vous, ils répondent peut-être, quand vous les invitez à Versailles, ils accourent.» Un bling-bling peu goûté en France mais très apprécié au Liban où l’homme est populaire au point d’avoir des timbres à son effigie. Le coût de la fête demeure secret mais depuis que l’affaire a éclaté, le «Cost Killer» a proposé de rembourser les 50.000 euros de la location du Trianon. Une enquête a été ouverte.
En images, les moments marquants de l’histoire de Carole et Carlos Ghosn
Carole et Carlos Ghosn au festival de Cannes. (Cannes, le 11 mai 2018.)
Carole et Carlos Ghosn au Grand Prix de Formule 1 de Monaco. (Monte Carlo, le 25 mai 2014.)
Carole et Carlos Ghosn sur le tapis rouge du 69e Festival de Cannes. (Cannes, le 20 mai 2016.)
Carole et Carlos Ghosn à l’Alliance Française pour le « Trophée des Arts Gala ». (New York City, le 15 novembre 2013.)
Une confiance à toute épreuve
Toujours gracieuse sur les photos, on connaît peu le son de la voix de Carole Ghosn. Très silencieuse les premiers temps de l’incarcération de son mari, elle écrit à l’ONG Human Rights Watch le 28 décembre dernier une lettre de neuf pages pour dénoncer sa situation. Elle exhorte l’organisation à «faire la lumière sur les rudes conditions de détention» de celui qui est «cruellement et inutilement détenu par les autorité japonaises depuis le 19 novembre 2018». Carole Ghosn met aussi en avant l’honnêteté de son mari en assurant : «Mon époux est largement crédité pour avoir sauvé Nissan des risques de faillite en 1999 et rétabli la profitabilité de l’entreprise.»
Quelques semaines plus tard, elle confie à Paris Match s’inquiéter pour la santé de son mari, tout en restant en dehors des décisions prises par l’entreprise : «C’est un véritable cauchemar, et ma seule raison de vivre, actuellement, est de me battre pour lui. Cette injustice m’en donne la force, alors que je devrais m’effondrer. Je tiendrai pour lui, pour être à ses côtés quand il sortira.» Déterminée, elle a aussi écrit à Emmanuel Macron pour qu’il défende le citoyen français qu’est son époux. Après la première garde à vue de ce dernier (qui prend fin le 6 mars après paiement d’une caution de 8 millions d’euros), Carole Ghosn supplie les journalistes de les laisser tranquilles. Le répit est de courte durée : il repart le 4 avril en garde à vue, au moins pour dix jours. Habituée à vivre entre deux avions, Carole Ghosn est forcée de vivre entre deux parloirs, dans l’attente d’un procès qui s’annonce long et douloureux.
Privée de son passeport libanais par les Japonais, elle peut se servir de l’américain pour voyager. Partie en catimini de Tokyo et escortée à son avion par l’ambassadeur de France au Japon, elle vit à Paris, où elle continue à se battre pour prouver l’innocence de son mari. Elle témoigne alors auprès du JDD : «Dans les médias, Carlos est déjà coupable. On oublie ce qu’il a fait pour Renault et Nissan ; il a redressé ces entreprises, sauvé des emplois, contribué à la grandeur de la France. Tout ça, on l’oublie.» Au micro de RTL, elle explique rester temporairement en France pour appuyer le dossier de son mari. «L’idée de le savoir tout seul est vraiment très dure à accepter.»
Devant la justice japonaise pour témoigner «de bonne foi»
Jeudi 11 avril, Carole Ghosn était de retour au Japon pour répondre aux questions de la justice. Son avocat François Zimeray a déclaré à l’AFP : «Elle est retournée au Japon : ce qui est la preuve qu’elle n’a jamais entendu fuir qui que ce soit. Elle est très à l’aise pour dire la vérité car elle est d’une bonne foi totale.» Carole Ghosn, soupçonnée d’avoir fait transiter de l’argent détourné par son mari via une structure dont elle est dirigeante, est entendue comme témoin par le parquet de Tokyo. Pendant ce temps, l’avocat de son mari dépose un recours devant la Cour Suprême du Japon pour tenter de le faire libérer. Ce dernier se dit désormais «abasourdi» par la fuite de son client. Le rôle de Carole Ghosn dans ladite fuite demeure, quant à lui, bien mystérieux.
*Cet article initialement publié le 11 avril 2019 a fait l’objet d’une mise à jour.
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