Dans La Familia Grande, publié le 7 janvier 2021 aux éditions du Seuil, la juriste Camille Kouchner accuse son beau-père, le politologue Olivier Duhamel, d’inceste à l’encontre de son frère jumeau. Une semaine après sa publication, l’autrice a accordé une interview à François Busnel pour La Grande Librairie, mercredi 13 janvier, sur France 5. Un entretien au cours duquel elle a accepté de parler du constitutionnaliste.

  • Camille Kouchner
  • Olivier Duhamel

C’est un livre qui fait l’effet d’un tsunami. Un livre nécessaire, à mettre entre toutes les mains, qui libère la parole sur l’inceste et sur les mécanismes du silence entourant ce crime. Dans La Familia Grande, publié jeudi 7 janvier 2021 aux éditions du Seuil, la juriste Camille Kouchner accuse son beau-père, le célèbre constitionnaliste Olivier Duhamel, d’avoir abusé de son frère jumeau lors d’agressions sexuelles incestueuses. L’autrice y écrit qu’Olivier Duhamel fait subir des “fellations” à son beau-fils “Victor” – le prénom a été modifié par Camille Kouchner pour préserver son anonymat – dès ses 13 ans, et pendant plusieurs années. Camille Kouchner révèle par ailleurs qu’Olivier Duhamel fut longtemps adoré par les trois enfants de sa femme, Evelyne Pisier, et qu’il a longtemps comblé l’absence de leur père biologique, l’ancien ministre Bernard Kouchner, décrit dans l’ouvrage comme étant trop occupé (et qui, depuis, a prouvé son amour et son soutien à ses enfants, nuance-t-elle). Enfin, Camille Kouchner raconte comment sa mère a préféré protéger son mari jusqu’à sa mort, en 2017, “abandonnant” ses propres enfants. Trois jours avant la sortie du livre, Olivier Duhamel a annoncé sa démission via Twitter. Faute de procès, le politologue reste, pour l’heure, présumé innocent. Le parquet de Paris a toutefois ouvert le 5 janvier une enquête préliminaire, le but étant de découvrir d’éventuelles nouvelles victimes et de vérifier les délais de prescription. Jeudi 13 janvier, une semaine après la publication de La Familia Grande, Camille Kouchner était l’invitée de François Busnel dans La Grande Librairie, diffusée sur France 5. Sur le plateau, l’écrivaine a livré un témoignage poignant et important au sujet de l’histoire de sa famille, et de l’inceste en général. Une interview au cours de laquelle elle a bien sûr évoqué le sort actuel de son beau-père.

« J’ai eu à me taire pendant des années, 30 ans de silence. Maintenant, le silence est pour lui »

À la fin de l’entretien, le journaliste littéraire demande Camille Kouchner : “Et pour votre beau-père, qu’attendez-vous ?” L’autrice répond alors, avec force et sincérité : “Mon beau-père, je l’ai mis dans ce livre, j’aimerais qu’il reste dans ce livre […] La réalité, c’est très difficile parce que c’est mon beau-père. Et c’est ça, l’inceste, en fait. Ce qui fait qu’au bout du bout, c’est difficile. Il a fait un truc qui est impardonnable. Impardonnable. Donc je ne lui pardonne pas. Moi, j’ai eu à me taire pendant des années. 30 ans de silence. Donc maintenant, le silence, il est pour lui. Moi, j’ai eu à vivre avec cette réalité.” La juriste de 45 ans poursuit : “Il y a un moment où je me suis dit ‘Ok, le droit ne permet pas une condamnation’ et d’ailleurs, je ne sais même pas si je serais capable de le condamner via les voies juridiques, tellement le droit me fait peur. Et pourtant, c’est ma réalité depuis des années, la réalité de mes frères et sœurs, la réalité de mes cousins, la réalité de ma tante, etc. Et lui, depuis un moment, vit hors de cette réalité, ça a l’air d’aller très bien.” Camille Kouchner ajoute, toujours à propos d’Olivier Duhamel : “Je trouve ça injuste. On a une réalité qu’il est le seul à avoir créé… eh bien il faut vivre avec. On va tous vivre avec. Nous, on ne peut pas nous retirer cela. Ce n’est même pas une question de punition, il faut juste qu’il entende que c’est impardonnable et que cela va durer toute la vie, et là, maintenant, on est en train, nous, avec mes frères et ma sœur, sans doute, d’en parler à nos enfants, d’essayer d’expliquer, pourquoi parfois ça ne va pas.” Elle conclut, avec pudeur : “Je voudrais qu’il reste dans ce livre.”

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