L’actrice et mannequin transgenre s’impose comme la première femme, de couleur et transgenre à figurer dans les pages de Sports Illustrated. En décembre dernier, elle évoquait son parcours et les difficultés qu’elle a dû surmonter dans sa carrière.
«Etant une femme, de couleur et transsexuelle, marcher la tête haute dans ce monde est une forme d’activisme. » Dans la campagne Christian Dior Parfums, #DiorStandsWithWomen #DiorChinUp, qui invite onze personnalités de différents horizons à s’exprimer sur leur parcours, le choix de l’actrice et mannequin Leyna Bloom, 26 ans, s’imposait.
Racisme, homophobie, sexisme… : les épreuves que la vie a placées sur sa route se sont additionnées, comme pour la dissuader de s’exprimer. «Souvent, les gens ne m’ont pas donné ma chance, parce qu’ils ne me trouvaient pas légitime. Peu d’opportunités s’offrent à des personnes comme moi. Nous sommes assez peu visibles dans l’espace public, et nous sommes les derniers maillons de la chaîne alimentaire.» Mais cette native de Chicago, née de parents philippin et afro-américain, n’a pas baissé les bras, ni accepté de se taire. «Faire les choses que j’aime, être vue là où je ne suis pas la bienvenue et où je ne suis pas acceptée, c’est ma manière de combattre tout ça. Et je me dois de le faire changer pour notre avenir.»
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Sa présence au sein de l’iconique numéro spécial maillot de bain de Sports Illustrated en est une nouvelle preuve. Leyna Bloom s’impose ainsi comme la première femme transgenre de couleur à figurer dans ces pages. «Ce moment dépasse mes rêves les plus fous, a-t-elle déclaré sur son compte Instagram en dévoilant une photo. À ce moment précis, je représente toutes les communautés dans lesquelles j’ai grandi, et toutes celles que j’essaie de faire grandir.»
Une motivation qui lui vient notamment de son père, qu’elle cite longuement dans la campagne réalisée par Dior. «Il m’a toujours dit que si je faisais quelque chose, je devais le faire de la meilleure façon possible. De toujours viser le sommet, et ne pas me contenter d’être juste ordinaire. D’être extraordinaire.» Son père peut être rassuré. Leyna est tout sauf ordinaire. Elle se fait d’abord remarquer au sein des bals emblématiques de la scène LGBT quand elle arrive à New York. La danse comme moyen d’expression, mais aussi comme moteur.
«C’est un langage universel d’amour et de bonheur. Il suffit de trouver la bonne musique et de se lancer, il n’y a pas de meilleur antidépresseur.» Le vrai tournant arrive avec Port Authority, de Danielle Lessovitz, où elle est choisie pour tenir le premier rôle. Le film, où elle interprète Wye, une danseuse de voguing qui semble être son double, est sélectionné dans la catégorie Un certain regard lors du Festival de Cannes 2019, mais sort en pleine pandémie. Un malheureux timing qui l’empêche de rayonner comme l’aurait souhaité son interprète. «Il y a de nombreux films incroyables qui bousculent les codes de notre société et qui n’ont pas eu la chance d’être vus par une grande majorité. Alors, j’espère que quand tout sera terminé on pourra trouver une manière de les célébrer…». Du festival de cinéma français, elle retient surtout la fierté qu’une femme de couleur transgenre trouve enfin une visibilité dans un événement au rayonnement mondial. «C’est une avancée majeure. Et, en même temps, je me demande pourquoi il a fallu attendre si longtemps pour que cela arrive !»
Parmi les femmes fortes qui l’ont inspirée et lui ont ouvert la voie, elle cite la militante Angela Davis, la romancière Toni Morrison ou encore la danseuse Joséphine Baker, «des femmes qui ne se sont pas contentées d’être belles, mais qui se sont dit : je vais me servir de ma beauté, de mon talent pour changer le monde. Je vais utiliser la force de ma féminité pour changer les choses là où je suis».
Dans les causes qui lui tiennent à cœur, il y a aussi l’éducation. «Le savoir et la connaissance sont les meilleures revanches que l’on peut avoir dans la vie», explique celle qui, avec une pointe d’humour, désigne la bibliothèque de New York comme l’un de ses endroits favoris, après… son lit. Dior soutenant le CTAOP, la fondation de son égérie Charlize Theron, cela a donné une raison supplémentaire à Leyna Bloom d’intégrer la campagne. Le Charlize Theron Africa Outreach Project a pour but d’encourager un réseau d’organisations éducatives agissant auprès de la jeunesse des pays d’Afrique subsaharienne. L’actrice oscarisée prend d’ailleurs elle aussi la parole dans cette campagne. «Je suis si fière de figurer aux côtés de femmes, qui, comme Charlize Theron, sont fortes, intelligentes, et veulent être vues et respectées comme telles», dit Leyna Bloom. Car, si elle se sent investie d’une mission, c’est aussi dans un esprit d’héritage, celui d’un combat qu’elle se doit de poursuivre. «Les femmes se battent depuis plus de cinquante ans. Pour le droit de vote, pour l’égalité des salaires, pour ne pas être cantonnées à la vision traditionaliste dans laquelle la société les a enfermées si longtemps… Nous avons déjà parcouru un très long chemin pour en arriver là où nous sommes.» Évidemment, elle s’enthousiasme de l’arrivée de la vice-présidente Kamala Harris sur l’échiquier américain. «Je me réjouis de voir certaines d’entre nous à des postes-clés. Il est temps de ramener le pouvoir là où il a commencé. Chez les femmes. Ne parle-t-on pas de Mère Nature ?»
Cet article, publié en décembre 2020, a fait l’objet d’une mise à jour.
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