Durable, high tech et antirides, dotée de propriétés exceptionnelles, la cosmétique marine est entrée dans une nouvelle ère. Cap sur les dons de la mer pour une pêche miraculeuse.
La mer est un vivier de nouvelles ressources pour le futur, si d’ici là, la pollution ne nous prive pas de ses bienfaits. D’autant qu’elle n’a pas livré tous ses mystères. «Il existe des centaines de milliers d’espèces marines, et on n’en connaît seulement 1 %», rappelle Romuald Vallée, directeur scientifique de Codif (Phytomer). Pourquoi tant d’inconnus ? La majorité de ces espèces sont microscopiques et difficilement atteignables. Même celles qui sont répertoriées et étudiées cachent leurs secrets aux spécialistes, qui n’ont pas encore identifié la fonction de toutes les molécules qu’ils découvrent et dont beaucoup sont impossibles à copier chimiquement. Ce qui est sûr, c’est que la «blue cosmétique» est aussi l’avenir de notre peau et de notre bien-être. Toutes les bonnes raisons de plonger.
La mer est écolo
Utiliser des extraits marins épargne les ressources hydriques. «Les algues cultivées sur ligne en eau de mer ne réclament pas d’arrosage comme les végétaux terrestres», explique Éric Bordron, le président d’Algologie. De plus, elles le sont sans pesticides. Depuis peu, certaines peuvent même être bios, et Phytomer sort sa première gamme labellisée. Les algues qui ne s’adaptent pas à la culture sont achetées à des goémoniers, qui les récoltent à marée basse selon un strict cahier des charges pour ne pas épuiser le milieu naturel.
Mais les labos spécialisés choisissent de plus en plus une nouvelle option : les extraits obtenus par biotechnologie, une méthode peu énergivore, qui permet de préserver le milieu naturel. «À partir d’une seule microalgue ou d’une seule cellule-souche, on peut en reproduire à l’infini», souligne Éric Bordron. En contrôlant parfaitement le milieu dans lequel ils les cultivent (température, lumière), les scientifiques sont ainsi capables de pousser la concentration des molécules qui les intéressent. Les laboratoires abritent ainsi moult couveuses d’actifs marins pleins de promesses. L’aspect local est un autre atout, car nombre de marques marines ont les pieds dans l’eau. Daniel Jouvance à l’île de Houat, Algologie face à l’archipel de Bréhat, Phytomer à Saint-Malo. Des zones qui concentrent la plus grande diversité d’algues au monde.
Les soins marins de la « blue cosmétique »
Crème Auracéane, Daniel Jouvance : un shot d’extraits marins et d’eau de mer anti-âge. 45 €/75 ml
danieljouvance.com
Élixir de Pen Lan, Algologie : une huile qui dope la peau. 49 €/ 30 ml
algologie.com
Crème Marine Nourrissante, Algotherm : l’antisèche du corps. 16,20 €/150 ml
algotherm.com
Crème Marine Nourrissante, Algotherm : l’antisèche du corps. 28 €/150 ml
thalgo.fr
La mer aime notre peau
L’eau de mer, berceau de la vie sur terre, a une grande affinité avec notre enveloppe cutanée. Elle renferme plus de 90 oligoéléments et sels minéraux, les mêmes que ceux du liquide physiologique dans lequel s’épanouissent nos cellules. La seule différence, c’est le taux de sel. «Dans les produits, nous utilisons une eau de mer dont la quantité de sel est ramenée à celle du corps, soit 9 g/litre», indique Éric Bordron. Déjà à la fin du XIXe siècle, le biologiste René Quinton avait donné le nom de « plasma marin » à l’eau de mer dessalée, connue aujourd’hui sous le nom d’Eau de Quinton. Sous l’effet de ce sérum physiologique naturel, les cellules profitent d’un environnement de vie idéal. Le métabolisme cutané est optimisé, l’inflammation est calmée. De plus, l’assimilation des actifs est optimisée», poursuit le Breton. La similitude entre le corps et le milieu marin va encore plus loin. «Une coupe de peau et une coupe de macro-algue se ressemblent», renchérit Romuald Vallée. À la différence que pour se protéger, la peau fait de la kératine et l’algue des polysaccharides, des sucres, plus à même d’absorber beaucoup d’eau.
La mer est source d’actifs musclés
Les végétaux marins et de bord de mer n’ont pas la vie facile. Pas étonnant qu’on les dise extrêmophiles. Quel que soit le cas de figure, la gestion des éléments extérieurs n’est pas de tout repos. «Dans la presqu’île de Pen Lan, nous sommes soumis à des marées parmi les plus fortes au monde, la mer se retire à des kilomètres et les algues situées sur cette portion passent 70 % du temps hors de l’eau», raconte Éric Bordron. Elles doivent donc développer des systèmes qui leur permettent de survivre à ce changement radical de condition, au manque d’eau, à l’exposition aux UV et au vent. «Certaines fabriquent une sorte de muscus, enveloppe sur laquelle rebondissent les UV», poursuit le président d’Algologie. D’autres, qui vivent plus au large dans les grandes profondeurs, sont capables de faire de la photosynthèse en quasi-absence de lumière.
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D’autres encore, comme la Laminaria esculenta, vivent en zones agitées et doivent s’agripper aux rochers pour résister à la pression des courants extrêmes. Ce sont leurs fibres élastiques qui leur permettent de tenir bon. Du côté des plantes de bord de mer, la résistance est aussi organisée. Pour s’épanouir les pieds dans le sable mouvant et balayées par un vent salé asséchant, les plantes dites halophytes disposent souvent de feuillages épais et huileux, c’est le cas de la criste marine. «Ces plantes sont des guerrières, et leurs combats génèrent des molécules qui sont pour nous des actifs intéressants», résume Éric Bordron. Pour hydrater, préserver la peau des agressions, renforcer les fibres de soutien qui assurent la jeunesse de la peau, les algues, microalgues et plantes halophytes ont tout ce qu’il faut
Elle ne sent pas la vase
Il fut un temps où se tartiner de produits aux extraits d’algues donnait la sensation d’être en plein enveloppement de boue marine en thalasso. C’est heureusement terminé. Les formulateurs arrivent mieux à masquer les odeurs et à gérer les consistances des poudres ou extraits huileux des algues, mais surtout l’usage de la biotechnologie a permis d’obtenir des actifs sans odeurs et plus facilement gérables. Mieux, certains polysaccharides délivrent des sensorialités qui rivalisent avec le meilleur des silicones. «La cosmétique marine est devenue extrêmement technologique, parfois plus que la cosmétique traditionnelle», assure Romuald Vallée.
La note est salée
Destination propice aux rêves, la mer inspire toujours les parfumeurs. Mais avec des notes moins iodées, chères aux années 1990. «Aujourd’hui, on l’évoque de façon plus subtile, par son environnement», estime Alexis Dadier, parfumeur chez Robertet. Les créateurs mêlent à des extraits naturels d’algues des notes végétales qui rappellent le littoral. On pense à Un Air de Bretagne, de L’Artisan Parfumeur, avec ses notes de cyprès rappelant la lande. À Acqua Di Scandola, de Parfum d’Empire, et ses genévriers et immortelles corses. Plus exotique, Embruns d’Ylang, de Guerlain, convoque un paysage solaire d’ylang-ylang et d’épices, rafraîchi de notes aquatiques. Et pour celles qui rêvent d’embarquer pour Venise, Un Jardin sur la Lagune, d’Hermès, recrée l’air salé des jardins secrets.
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