Il était l’un des experts invités à rencontrer nos lecteurs sur la scène
de VIS!ONS,  la Maison des Océans à Paris mercredi 4 décembre. Ganaël Bascoul, fondateur de
Monsieur Barbier, est un prospectiviste écouté. Il s’intéresse pour nous au combat que se livrent les marques pour capter notre attention :

« « Le contenu est roi. Le contexte c’est Dieu. » Belle maxime d’un certain Gary V.* qui a le chic du gourou pour vous remettre les idées d’aplomb par quelque épiphanie. Notre capacité d’attention ne se marchande plus aussi bien qu’à l’époque du « temps de cerveau humain disponible »** : non pas qu’elle ne soit plus à vendre, mais son cours est devenu très variable en fonction du contexte.

Qui dit forte volatilité, comme sur les marchés financiers, dit recettes magiques et outils nanomètrés. Du temps des Mad Men, on est passé à celui des brokers de la donnée, à coups d’algos et d’IA, pour que malgré tout, la marque puisse être là tout le temps, sur tous les canaux. Au final, la capacité à interpeller les consommateurs y est, en effet, et l’attention d’autant plus vampirisée, on ne peut le nier, mais… Mais cette artillerie lourde promeut davantage la notoriété d’une marque (on pense à moi, parce que je suis là) que l’attachement qu’on lui porte (on pense à moi, parce que c’est moi), alors que l’art du contexte réside bel et bien dans l’à-propos, le propos bienvenu.

Les moments magiques

Parlons concrètement. Si ma jardinerie veut être entendue, elle saura me vendre une table de jardin alors que j’en ai déjà une, en mobilisant de l’IA et en me proposant par exemple le nouveau modèle tendance qui a attiré mon regard sur Instagram. Mais si elle veut être reconnue pour son savoir-faire, alors elle devra plutôt me dire qu’il est temps de tailler cet arbuste acheté quelques mois auparavant, en accompagnant ce conseil d’une vidéo me dévoilant quelques gestes savants. Alors non seulement je penserai à elle, mais j’en oublierai presque toutes les autres.

OK, OK, tout le monde ne vend pas des fleurs ! Ceci dit quelle que soit l’industrie, les clients souhaitent cultiver leur jardin, avec des préoccupations qui leur sont propres. Donc le noble et beau contenu sera toujours le bienvenu à la conjonction des questions du moment et de la trajectoire du client. Un assureur éclairera mes choix de rénovation pour ma maison, une mutuelle me proposera les meilleurs médecins pour ce pépin de santé si particulier, ce fabricant de croquettes me dira comment tout au long de sa vie, prendre soin du chien que je chéris. Le tout, aux moments magiques (comment font-ils ?) les plus appropriés. Et c’est par ces attentions qu’on aura mon attention.

L’attention ne se force pas

A partir de ce paradigme, tout ce qui pouvait sembler secondaire devient vecteur d’un entendement meilleur : un commentaire sous un post, une riche interaction lors du service client (qui par pitié ne doit jamais être externalisé, car c’est le canal de communication le plus économique, le plus riche d’enseignements, et le plus prompt à générer de l’attention, mais c’est une autre bataille), une prise de parole éclairante et différente dans un débat sans nuances, un tuto quelques heures avant l’heure fatidique, un clin d’œil niché dans une skill d’Alexa…

Bref, l’attention ne se force ni ne s’impose. La capter demande beaucoup d’efforts humains, d’intelligence affective et surtout relationnelle – et certes un peu d’intelligence artificielle (ou plus exactement de statistical learning), qui ne sera quoi qu’on en pense, qu’un outil parmi d’autres, dont l’attrait excessif du jour, fera le trait d’esprit du lendemain. »

* Gary Vaynerchuk, serial entrepreneur et auteur américain.
** « Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible ». Expression formulée en 2004 par Patrick Le Lay, alors président-directeur général du groupe TF1.

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