Abandonnée depuis huit ans dans un hôtel dont la dégradation s’accélère, la chambre Napoléon, qui a accueilli l’empereur à Autun (Saône-et-Loire), suscite l’inquiétude d’une ville en pleine bataille pour son classement.

Deux lits-bateaux ornés de bronzes dorés, une coquette table ronde, une élégante armoire et une confortable banquette, le tout d’époque Empire : c’est dans cette chambre gracieuse que Napoléon séjourna en 1802 avec Joséphine de Beauharnais, puis seul en 1815, lors de son retour de l’Île d’Elbe. La pièce tranquille et son mobilier historique d’acajou ont traversé les siècles, derrière la large façade grise de l’hôtel Saint-Louis, au coeur d’Autun où Napoléon fut collégien une partie de l’année 1779.

La suite Napoléon conservée avec son mobilier d'origine…

Mais, à l’abandon depuis 2013, l’ex-relais de poste âgé de 350 ans, et ses 44 chambres en sommeil, souffrent des assauts du temps. « L’hôtel Saint-Louis continue à se dégrader fortement et de manière très accélérée », s’inquiète le maire MoDem d’Autun, Vincent Chauvet, dans une lettre où il rappelle au propriétaire « sa responsabilité de ne pas laisser disparaître cet héritage impérial, en particulier en cette année 2021 qui marquera le bicentenaire de la mort de l’empereur« .

L’affaire de l’hôtel Saint-Louis d’Autun début février

Début février, des craintes avaient surgi après un tweet du web-magazine « Coupe-File Art » accusant le propriétaire de vouloir « dépouiller » la chambre de ses boiseries historiques. Dominique Lens, directeur général de Chez France Hôtels, la société actuellement propriétaire, s’en défend. « L’intention était de mettre les meubles provisoirement à l’abri des travaux dans des expositions sur le bicentenaire », affirme-t-il à l’AFP.

Twitter et le patrimoine : retour sur l’affaire de l’hôtel Saint-Louis d’Autun

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Par @NicolasBousser

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Les défenseurs du patrimoine napoléonien se sont également aperçus avec effroi que l’hôtel, un ensemble immobilier de 1.800 mètres carrés, était mis en vente pour la modique somme de 250.000 euros sur le site leboncoin. « Rien n’est conclu », assure M. Lens, précisant que le prix de l’hôtel sera établi « en fonction du coût des travaux nécessaires » à sa rénovation.

Un affront à l’histoire

Le maire, lui, n’est pas rassuré. Affirmant que le propriétaire a bel et bien « envisagé de céder cet ensemble immobilier à la découpe », il met en garde contre une vente des meubles qui « constituerait, au-delà d’une faute morale et d’un affront à l’histoire d’Autun, une incohérence de fond pour la reprise de l’établissement ».

Dans sa lettre au propriétaire, dont l’AFP a obtenu copie, M. Chauvet s’inquiète en particulier qu' »aucuns travaux n’ont été réalisés depuis plus d’une dizaine d’années« . L’hôtel Saint-Louis est protégé par le Plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) en vigueur sur l’ensemble de la vieille ville d’Autun. Mais ce dernier ne couvre pas le mobilier, pourtant historique, de la chambre.

En 1997, les couchages enchâssés dans une alcôve, avec deux tables de nuit coiffées d’un marbre noir, une commode et une coiffeuse d’une manufacture exceptionnelle, avaient été estimés à environ 20.000 euros. Pour les protéger, le maire a décidé du « lancement d’une procédure de protection patrimoniale (…) de l’ensemble de l’hôtel » en vue de son

classement.

« Il est indispensable qu’une sauvegarde soit effectuée », juge également l’historien David Chanteranne, qui souligne l’intérêt patrimonial de la chambre. « Dans l’histoire de Bonaparte, on a tendance à oublier les étapes essentielles d’Autun », rappelle le rédacteur en chef de la Revue du Souvenir Napoléonien. Outre le couple impérial, le Saint-Louis a logé à Autun d’illustres autres hôtes : le duc d’Orléans (1832), George Sand (1836), la reine Christine du Portugal (1841) ou le Comte de Paris (1873). Vers la fin des années 1980, il a également accueilli à maintes reprises Oona Chaplin, veuve du célèbre acteur et cinéaste Charlie Chaplin.

« C’était une cliente discrète et généreuse », se souvient une ancienne employée de l’hôtel qui préfère garder l’anonymat, rappelant en souriant qu’elle « prenait volontiers un whisky avec son petit-déjeuner ».

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