Claire est une « slasheuse », un terme qui désigne ceux qui cumulent fièrement plusieurs activités professionnelles. Elle nous raconte.
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Claire Sanchez, 35 ans, dirige deux entreprises : dans l’une elle est formatrice en informatique (C plus Claire) et dans l’autre, cheffe-traiteur à domicile (Pluche). Mais elle est aussi mère de deux petites filles. Une vie bien remplie dont elle témoigne dans Je suis une slasheuse (éditions Dunod)
« Après mon BTS (graphisme et communication visuelle), j’ai travaillé dans la restauration. A ce moment-là, ma première fille est née. Après une parenthèse pour m’occuper d’elle, j’ai été recrutée par Apple pour former les clients et les employés aux produits de la marque. Mais des événements ont bouleversé ma vie comme l’attaque du Carrousel du Louvre où je travaillais, qui a ravivé l’angoisse de l’attentat du Bataclan pendant ma première grossesse. Puis ma grand-mère est décédée et, peu après, on m’a refusé une promotion : la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Je ne me sentais pas à ma place. Ma santé a commencé à se détériorer, mon corps tirait la sonnette d’alarme. Je me suis inscrite à un programme de coaching en reconversion professionnelle.
« J’avais une grande soif d’autonomie »
Puisque la vie pouvait basculer du jour au lendemain, il ne fallait pas perdre de temps. J’avais besoin de créer, de décider par moi-même, d’être autonome. Déjà, en 2014, j’avais demandé un congé individuel de formation à mon entreprise pour passer un CAP de cuisine, une passion qui m’avait prise à la naissance de ma première fille. Avec le coaching, cette idée est revenue à la surface. Je trouvais opportun de la tester, mais j’aimais profondément mon métier de formatrice. Si je manquais de confiance en moi pour la cuisine, secteur très concurrentiel, j’étais rassurée par l’activité de formation qui pouvait me permettre de gagner facilement ma vie. J’ai choisi de ne pas sacrifier une activité pour l’autre. Mon conjoint m’a approuvée. Quant à mes parents, ils ont craint de me voir quitter une situation stable pour un avenir moins sécurisant. Mais ils se sont vite rendu compte que je m’épanouissais ainsi. Eux-mêmes avaient changé de vie après 40 ans, ma mère en reprenant des études et mon père en se reconvertissant dans la boulangerie, ce qui m’a certainement inspirée à mon insu.
« L’envie d’exploiter mon potentiel à 100% «
J’ai d’abord lancé mon activité de formation sous le statut d’autoentrepreneur, ce qui simplifie énormément la partie administrative. Quelques mois après, je me suis attelée à la création de mon activité de traiteur, sous la forme d’une SASU (société par action simplifiée unipersonnelle). Deux activités très complémentaires : l’une créative, l’autre rationnelle. Elles satisfont mon besoin de faire ce que je veux de mes mains et de mon cerveau, et d’exprimer ainsi toute ma personnalité. Mais tout n’a pas été simple et j’ai dû m’adapter aux aléas.
« Les épreuves m’ont révélé que je pouvais rebondir »
Dans mon activité de formatrice, une grosse société de technologie a fait opposition à ma marque et il a fallu que j’en crée une autre (que j’ai nommée C plus Claire). J’ai dû refaire tous mes supports de communication et mon site internet. Et en tant que traiteur, je me suis rendue compte que c’était compliqué d’assurer seule la livraison aux particuliers. J’ai donc opté pour l’événementiel en entreprise : des petits-déjeuners et des déjeuners végétariens… Les doutes et la colère passées, j’ai découvert que j’avais la capacité de rebondir. Une bonne nouvelle !
« J’ai formé un réseau grâce à internet »
Travailler seule à la maison était difficile. Je sentais que la solitude allait devenir pesante. Alors, assez rapidement, j’ai créé un groupe Facebook de parents entrepreneurs, les Mumpreneuses. On se rencontrait entre mères parisiennes pour des déjeuners et des échanges autour de nos activités et de nos problématiques de parents. J’ai également côtoyé pas mal d’entrepreneurs lors de réunions organisées sur différents réseaux. Cela m’a aidée à gagner en confiance, à me faire connaître et à trouver des clients – et parfois des partenaires -, offrant des prestations complémentaires (réparations informatiques, par exemple)… J’ai aussi utilisé des espaces de coworking pour des formations ainsi qu’une cuisine professionnelle partagée avec d’autres entreprises. Alors que j’avais très peur de ne pas réussir à créer un réseau, cela s’est finalement avéré assez facile.
« Un exemple pour mes filles »
Dès le début, je me suis refusée à sacrifier ma vie de famille pour mes activités. Hors de question de travailler le week-end ! Et dans l’idéal, j’éteins mon ordinateur à 18 heures. Je voulais prouver à mes filles qu’une femme peut s’accomplir, être heureuse dans sa vie professionnelle, jongler avec sa casquette de mère tout en restant indépendante. Il n’y a pas que les hommes pour oser ! Aujourd’hui, ma vie a du sens et je suis fière de pouvoir en parler à mes filles.
En me mettant en difficulté, la pandémie m’a poussée dans mes retranchements. Depuis des mois, je réfléchissais à faire de la formation à distance mais je doutais de mes capacités à mener ce projet. Lors du premier confinement, j’ai réalisé que c’était possible et que cela ouvrait d’autres perspectives. Si bien que j’ai travaillé pendant tout le confinement. Si je n’avais gardé que mon activité de traiteur, aujourd’hui, je serais désespérée comme nombre de mes amis. Mon statut de slasheuse a sauvé ma vie professionnelle ! «
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